Philippe Wannesson
Blogueur et militant
Abonné·e de Mediapart

265 Billets

0 Édition

Billet de blog 17 juillet 2022

Philippe Wannesson
Blogueur et militant
Abonné·e de Mediapart

Journalismes en temps de guerre – 1870 – à propos de Nompatelize

Alors qu’avec la guerre en Ukraine la pression est sensible pour choisir un camp, deux exemples historiques dans lesquels les journalistes ont fait le choix du devoir d’informer. Aujourd’hui, comment la presse française s’approprie en temps de guerre les termes du débat autour d’une bataille dans le nord-est des Vosges, en 1870.

Philippe Wannesson
Blogueur et militant
Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le 6 octobre 1870 a lieu un combat entre les forces françaises hétéroclites repliées sur le département des Vosges et les troupes badoises, renforcées suite à la reddition de Strasbourg, autour du village de Nompatelize, en rive gauche de la Meurthe.

L’information est reprise par la presse française le 9 octobre sur la base d’une dépêche des autorités françaises, très brève, disant en substance que les troupes françaises sont restées maîtresses du terrain (« Pas de résultats. Général Dupré blessé. Avons gardé nos positions. » dans le Journal des Dépêches, « nous avons gardé nos positions » dans le Courrier de Saône-et-Loire, qui ajoute « On compte tués 10.000 Prussiens. »)

On est à ce moment dans la situation classique de la presse en temps de guerre, qui reproduit les informations venues de son camps.

Mais dans les jours suivants, la presse française va aussi rendre compte de la version officielle allemande des événements. Certains journaux reprennent la dépêche du grand-duc de Bade, comme le Courrier de Saône-et-Loire, dans toute sa grandiloquence (« À cette heure, l’ennemi s’est retiré en pleine déroute sur Rambervillers. » « C’est un jour glorieux pour les Badois. » Suit une dépêche du quartier général du roi de Prusse à Versailles, également reprise par le Journal des débats politiques et littéraires du 17 octobre (« La brigade Degenfeld, troupes badoises, a eu une rencontre victorieuse […] L’ennemi a été dispersé. »). Le temps, lui, publie le 18 octobre la traduction d’un article paru le 10 octobre dans le Globe, journal britannique, qui rend compte des positions officielles française et allemande, mais se termine par « les Allemands bivouaquèrent sur le champ de bataille » (l’enjeu de la discussion étant de déterminer qui, à la fin de la journée de combat, était resté maître du champ de bataille). Ce texte est repris le 19 octobre par le Tribun du peuple.

Le débat sur la situation militaire dans les Vosges se poursuit, un accord se faisant dans la presse pour considérer qu’il y a bien un recul des troupes françaises. Le Courrier de Saône-et-Loire du 23 octobre retrace le déroulé des événements dans l’est vosgien du 1er au 8 octobre à partir de sources prussiennes, le Temps du 2 novembre intègre le combat de Nompatelize dans une évaluation plus large de la situation dans l’est de la France après la reddition de Bazaine à Metz, le Gaulois du 17 novembre essaye de reconstituer un tableau de la situation militaire dans les Vosges.

Est-ce un effet de la chute de l’empire et de la proclamation de la république (le 4 septembre 1870), toujours est-il que la presse française reprend les positions officielles tant française qu’allemande, voire trouve des sources d’information dans les journaux de pays tiers. En s’appuyant sur ces sources diversifiées, elle essaye de saisir la situation sur le terrain, elle réévalue l'événement avec le recul et en fonction de données nouvelles, alimentant le débat public.

On peut retrouver les journaux cités sur le site Retronews de la Bibliothèque nationale : https://www.retronews.fr/

La bataille de Nompatelize a sa fiche wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Nompatelize

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Bienvenue dans Le Club de Mediapart

Tout·e abonné·e à Mediapart dispose d’un blog et peut exercer sa liberté d’expression dans le respect de notre charte de participation.

Les textes ne sont ni validés, ni modérés en amont de leur publication.

Voir notre charte