« On croyait que la Grèce, c'était l'Europe. Mais ici, on mange dans les poubelles, les gens nous insultent et nous jettent des pierres, la police nous vole et nous bat. On veut partir de Grèce pour arriver en Europe. »
Des propos tenus par des exilés en Grèce, entendus de multiples fois.
Auxquels il est si difficile de répondre. Ils ont effectivement une chance de voir leur demande d'asile examinée sérieusement en Italie ou en France, mais ils seront à la rue pendant des mois, et ils seront parfois victimes de violences policières ou d'agressions racistes. En Hongrie, ils seront enfermés et fréquemment battus. La majorité des pays européens, aujourd'hui, ne respectent pas leurs propres règles en matière d'accueil des demandeurs d'asile.
Et, quand ils arrivent enfin dans un pays qui respectent les standards internationaux d'accueil des demandeurs d'asile, comme le Royaume-uni, la Suède ou la Norvège, un autre piège se referme sur eux, qui s'appelle Dublin II.
Le règlement Dublin II prévoit qu'on ne peut demander l'asile que dans un pays de l'Union européenne, et le plus souvent c'est le pays par lequel on est entré dans l'UE. Le plus souvent, il s'agit du pays dans lequel on s'est fait prendre ses empreintes digitales par la police, qui les a rentrées dans une base de donnée appelée Eurodac.
Quand ils arrivent en Angleterre ou en Scandinavie, les demandeurs d'asile ont toutes les chances d'avoir laissé leurs empreintes digitales en amont de leur parcours. Alors ils sont renvoyés vers des pays qui ne respectent pas leurs droits et ne leur offrent pas de perspectives d'intégration. Alors ils en repartent, et remontent vers le nord, en quête d'une vie meilleure.
Et nous les voyons repasser une fois, deux fois, cinq fois, toujours plus usés par l'errance. A cours d'argent, ils doivent aider les passeurs, se livrer à de petits trafics, se prostituer parfois, pour survivre. S'ensuivent des peines de prison, qui s'ajoutent à des périodes d'enfermement en rétention. Et ce système les détruit, au fil du temps.
Pour la France, Dublin II est un jeu à somme nulle:elle reçoit autant de demandeurs d'asile qu'elle n'en renvoie.
La première chose à faire : suspendre l'application par la France du règlement Dublin II. Rien à perdre, rien à gagner, on arrête juste de détruire des vies.
Indissociable et qui va sans dire : on respecte la loi en matière d'accueil des demandeurs d'asile, notamment pour l'hébergement et l'accompagnement.
A plus long terme, on agit au niveau européen pour une refonte de Dublin II, qui garantisse que tout demandeur d'asile voit sa demande examinée dans le pays de son choix, pour mettre fin à l'errance des demandeurs d'asile d'un pays à l'autre.