La démagogie dans ses œuvres !
L'assemblée nationale a approuvé en première lecture le projet de loi qui assouplit le régime de la légitime défense. Or, le régime actuel protège déjà les policiers qui sont déjà en mesure, juridiquement parlant, de se défendre et de faire usage de leur arme. Dans le cas de l’affaire d’Aulnay-sous-Bois où des policiers ont fait l'objet de coktail Molotov, ils auraient parfaitement eu le droit de faire usage de leur arme. C'est un mensonge que de prétendre le contraire, mais les syndicats de police et les politiciens font comme si, pour masquer les défaillances graves de l'institution policière. Car voilà, si les policiers ont le sentiment d'être juridiquement nus, d'être la proie de la vindicte populaire, ce n'est pas parce que la Justice est sévère à leur égard. Au contraire, les cas de condamnation de policiers sont assez rares, ou alors pour des faits outrageusement choquants. Ce dont a besoin la police, ce n'est pas d'assouplissement juridique des règles d'utilisation de leurs armes. Ce dont ont besoin les policiers, c'est de meilleures formations juridiques et pratiques. De mise en situation. Parce que s'ils ne savent pas qu'ils ont le droit de faire usage de leur arme pour se protéger, c'est que leur formation est grossièrement bâclée. Et s'ils sont mal formés sur leur propre protection, que dire de leur formation des autres personnes ? De ce point de vue, il est urgent d'allonger la formation des gardiens de la paix à deux années et de renforcer les moyens de cette formation.
Mais plutôt que de pousser en ce sens, certains syndicats de police veulent une immunité totale. Ils veulent l'impunité. Ils sont prêts à défendre mordicus leurs collègues qui ont commis des actes d'une gravité exceptionnelle. Théo s'est violemment pris une matraque dans l'anus. Ses lésions sont très graves et les dégâts risquent d'être permanents. Et que disent les policiers ? Que c'était un accident. Une matraque ne s'enfonce pas de dix centimètres dans un anus de manière accidentelle.Comment un tel mensonge ne discrédite-t-il pas d'office les auteurs de ces actes ? Car ils ne nient pas être les auteurs des lésions, ils prétendent que c'était un accident ! Et il y a des gens qui viennent dire qu'on ne connait pas le contexte, ou que Théo se serait débattu pendant son arrestation. Le contexte de l'arrestation ne peut pas justifier le viol et la torture.
Alors quoi ? Il y a des policiers qui, diront-ils, font parfaitement leur travail avec dignité et honneur et qui subissent du ressentiment de la population et c'est sans aucun doute vrai. Ils ont l'impression qu'il y a là une injustice. Mais, d'une part, cette injustice n'est pas aussi traumatisante que celle qu'a vécue Théo, ou Adama Traoré, et d'autre part, ce n'est pas une raison pour tout excuser. Au contraire, c'est parce que la police fait bloc, parce qu'elle refuse publiquement l'autocritique que la population, aussi, a du ressentiment. La police est responsable de son image, elle est responsable de ses actes. Refuser de condamner fermement ces actes, protéger dans un mouvement corporatiste, humainement compréhensible mais politiquement et moralement désastreux, voilà qui explique aussi le ressentiment. Il ne s'agit donc pas seulement de la mise en cause individuelle de quelques canards boiteux, mais bien d'un problème de l'institution toute entière qui laisse faire ce genre de comportements. C'est pourquoi, face à cette obstination, la distance entre la police et la population ne va pas cesser de s'agrandir. Et les violences, de part et d'autres, se multiplier.