“Implosion de l'Université des Antilles en Guyane ou Recentrage des Pôles universitaires des dernières colonies françaises de la Caraïbe et d'Amérique du Sud ?”
(Par Raymond Charlotte).
Dix-sept ans après le déclenchement de la grève victorieuse des lycéens de Cayenne pour l'obtention d'un rectorat qui avait donné lieu à des affrontements violents avec les forces militaro-policières françaises basées dans la colonie, est-ce un pur hasard de calendrier, que les étudiants, les enseignants et le personnel administratif du Campus de Trou-Biran viennent à travers un front intersyndical de se mettre en grève depuis ce matin.
Privés de Centre Hospitalier Universitaire (CHU), les étudiants pourraient ajouter à la liste des revendications la transformation du Centre Hospitalier de Cayenne en CHU, en plus des autres défaillances qui sont pointées du doigt : absence des filières de langue castillane, d'anthropologie, enfin toutes les sciences humaines dont le pôle de Guyane est le parent pauvre. Ce lourd handicap peut être perçu comme une persistance du fait colonial qui se dédouane sur l'attitude zélée des commis qui se satisfont d'un semblant de pouvoir exercé plus dictatorialement que le maître à partir des centres administratifs de Martinique et de Guadeloupe. Ce pôle guyanais de 2850 étudiants éloigné de 2.000 kilomètres des Antilles françaises et de 8.000 kilomètres d'une tutelle ministérielle française exige une gestion de proximité tenant compte de ses particularismes totalement différents de ceux des Antilles.
Hier partisans du statu quo jusqu'alors proches de l'Etat occupant, aujourd'hui évolutionnistes, ils apparaissent en minorité dans leur propre pays. Cependant il a fallu trouver un consensus autour d'une intersyndicale où le syndicat corporatiste guyanais STEG-UTG, et des syndicats français retrouvent leur compte en réclamant une "autonomie" pour l'université de la Guyane. Il s'agit à notre avis d'un net recul. Certes, pour d'autres qui partagent un avis contraire par rapport à une université guyanaise, avec une précarité entretenue par le recrutement de personnel en situation précaire en provenance d'autres horizons et la présence diffuse de professeurs guyanais, en plus de dysfonctionnements rituels, de retards de paiement, d'absence de plateaux sportifs, culturels, et d'absence de restauration qui conduit (pour des raisons d'économie) aux menus européens suivants : haricots verts, œufs durs, ou merguez-frites.
A l'assemblée générale de ce matin, les intervenants tels Elie Brême, Elie Stephenson, Dimitri Guard ancien meneur de la contestation lycéenne de Novembre 96, ont reçu une vive écoute du monde étudiant. Cet après-midi c'était au tour des cofondateurs de l'Organisation Guyanaise des Droits Humains (OGDH) d'intervenir dans certains ateliers. Jean-Michel Aupoint a parlé de la passerelle obtenue par les étudiants brésiliens. Quant à Raymond Charlotte il a salué l'auditoire en différentes langues nationales et suggéré la gratuité du transport pour tous les étudiants du territoire géographique. Cette suggestion devait séduire les étudiants de Saint-Laurent-du-Maroni, Maripasoula, Gran-Santi, Camopi et de l'Oyapock. Le jeune rapporteur français n'a pas bien perçu la portée de nos propos et a censuré des passages. On ne peut pas prétendre obtenir gain de cause avec des éléments exogènes.
Un peu plus tard à l'atelier quatorze lié à la formation, nos deux intervenants ont soutenu les articles de droit international, CBG, 8 j de la biodiversité consécutive à la propriété des richesses, des retours aux peuples autochtones. Le père vivant de la nation a conclu sur le monde des vivants dont foisonne le pays Guyane et pour le transfert des capacités technologiques.
Monsieur Gérard Clervaux a évoqué la création d'une industrie pharmaceutique. Jean-Michel Aupoint a rétorqué que la firme SANOFI était ici, et il devait insister pour la prise en compte des pouvoirs du Chaman en tant qu'autorité coutumière. Monsieur Dimitri Guard a voulu l'inscription pour un inventaire des richesses marines.
La présence du Président du pôle Martinique a été jugée indésirable à la séance des rapporteurs, et il devait quitter l'amphi. Monsieur Raymond Charlotte lui a clairement signifié que la Martinique à 2000 kilomètres n'a pas à donner de leçons aux Guyanais chez eux.
Le conflit a gagné les médias de France, et les tournures que ce conflit pourrait prendre en Guyane seraient susceptibles de provoquer l'implosion de l'université des Antilles-Guyane. Les étudiants du pôle de Guadeloupe ont les yeux rivés vers la Guyane. En fin de soirée les rapporteurs français ont recentré le débat sur des questions administratives.
En attente que l'arc-en-ciel ramasse la pluie, vendredi prochain, pluie ou clim, le président du pôle Guyane recevra une délégation d'étudiants.
Cayenne, le 08 octobre 2013
O. G. D. H. (Organisation Guyanaise des Droits Humains)