« La démocratie, le pire des systèmes à l’exception de tous les autres. »
Winston Churchill
L’UMP, on ne le sait plus, ou presque plus — mis à part les initiés, les affidés et autres hiérophantes de ce parti politique —, c’est le sigle pour dire l’Union pour un Mouvement Populaire. Depuis une dizaine de jours, depuis le vote des militants pour élire le président du parti, c’est peu de dire que l’UMP en voit de toutes les couleurs, au-delà même du spectre bleu-blanc-rouge convenu. Au cours du règlement de comptes qui suivit le décompte des voix, un décompte pour le moins faussé si l’on en croit toutes les manœuvres illicites sans oublier les omissions de la COCOE, la fameuse commission de contrôle coupable d’avoir d’oublié les voix de trois fédérations d’Outre-mer (soit celles de Nouvelle-Calédonie, de Mayotte et de Wallis-et-Futuna), on apprit de la bouche même de François Fillon qu’un parti ne devait pas être une mafia, ce qui suggère que l’UMP entrait dans cette catégorie-là. L’UMP, une mafia ? Allons donc ! La fracture à laquelle on assiste à l’UMP depuis l’auto-proclamation de Jean-François Copé à la présidence du parti ne fait jamais que souligner la ligne de démarcation qui sépare la droite traditionnelle, une droite plus « vieille France » qu’incarne François Fillon, et une droite « décomplexée », pour reprendre le mot de Jean-François Copé, une droite plus à droite, au point de franchir sans complexe la ligne discontinue qui la sépare de l’extrême droite, où circule gaillardement le Front National. Cette fracture à l’UMP n’est jamais que l’héritage de NicolasSarkozy depuis son virage à droite lors de la dernière campagne électorale pour la présidence de la République, une stratégie largement inspirée par Patrick Buisson, conseiller officieux de l’ex-président dont les affinités avec l’extrême droite ne sont plus un secret. Il y avait donc bien une faille à travers l’UMP qui séparait ceux qu’on allait appeler les Fillonnistes des autres, les Copéistes, une faille que le séisme de la mauvaise gestion de l’élection pour la présidence du parti allait révéler au grand jour, une fracture qui n’eut de cesse de s’élargir les jours suivants le cataclysme à l’UMP pour devenir une plaie béante entre deux camps, un abîme entre deux clans que tout semblait opposer. Il y eut bien une tentative de médiation esquissée par Alain Juppé appelé en renfort pour essayer de refermer les lèvres de la plaie, mais ce dernier déploya si peu d’empressement dans cette mission impossible que la médiation en resta au stade de la tentation. Finalement, il ne restait plus que Nicolas Sarkozy, le seul dont le charisme politique pouvait faire des miracles, lequel somma Fillon et Copé de parvenir à un compromis pour ne pas envoyer l’UMP par le fond. C’est alors que François Fillon eut une idée lumineuse, l’idée de donner un nom au groupe de dissidents dont il était le chef et qui menaçait de faire sécession d’avec l’UMP copéiste : le groupe reçut RUMP comme nom de baptême (RUMP, pour dire selon toute probabilité Rassemblement pour l’UMP). Mais voilà, dans son empressement, François Fillon le baptiste avait oublié que nous vivions dans un monde global où tout se côtoie ou presque, un monde plurilinguistique que domine encore l’idiome anglais en attendant que le mandarin prenne la relève. Or, dans l’idiome dominant du moment, le vocable rump signifie croupe (d’où le rumsteak, tiré de la croupe du bœuf). Le RUMP désigne-t-il la croupe de l’UMP ? La partie arrondie, douce et moelleuse de ce corps politique d’une rectitude sèche qui parfois rebute l’humaniste, la seule partie qui semble faire appel à toute la tendresse humaine. Mais voilà, s’il n’y a pas loin de l’UMP à la guerre de tranchée, il n’y a pas loin non plus de la croupe au coup de pied derrière, un peu comme si Fillon avait voulu mettre la dernière main au naufrage final, le coup de fion.
Pierre CAUMONT