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Billet de blog 10 août 2021

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Médiapart et ses partis pris, le parti du pire

Dans un article en date du 9 août 2021, intitulé « Emmanuel Macron, le président de la discorde », Edwy Plenel s’en prend une nouvelle fois au chef de l’État.

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« Le président de la discorde » ?  C’est pourtant bien le même Edwy Plenel, qui,  à l’occasion des journées portes ouvertes à Médiapart, le 2 décembre 2020, déclarait d’un ton satisfait (en visioconférence avec des journalistes de la rédaction) : « Nous décrédibilisons la parole publique  en révélant les dysfonctionnements de l’État dans sa gestion de la pandémie, son impéritie, ses mensonges (…) »,  une déclaration grave en cette période troublée ayant pour effet d’alimenter la défiance des citoyens à l’égard des autorités et par ricochet le complotisme.

C’est bien Edwy Plenel, lui, le fondateur de Médiapart, qui dit sonner le tocsin depuis des lustres pour dénoncer le comportement de l’actuel pouvoir qui, à ses dires, ferait « la courte échelle au Rassemblement national », qui s’emploie à jeter en permanence de l’huile sur le feu par la manière dont le Médiapart rend compte de l’actualité avec ses partis pris, ses prises de position récurrentes, qui font de Médiapart non pas un journal digne de ce nom en traitant l’information avec recul et hauteur de vue, mais un média partie prenante, un journal d’opinion, d’opposition et de contestation. 

Edwy Plenel a beau jeu de parler de « président de la discorde » quand Médiapart n’a de cesse d’alimenter la discorde en contestant constamment le bien fondé de l’action gouvernementale, quelle qu’elle soit, en passant son temps à pointer du doigt les tâtonnements du pouvoir dans sa gestion de la crise sanitaire, ses ratés, ses erreurs aussi il est vrai (cf. l’obsession pathologique de Médiapart à élever au rang de « mensonge d’État » la mauvaise gestion des masques sanitaires),  l’impéritie inévitable de tout gouvernement dans ce genre de situation (en effet, comment avoir l’expérience d’une crise sans précédent ?). Oui, Edwy Plenel a beau jeu de qualifier Emmanuel Macron de « président de la discorde » alors qu’en Europe, la France, sous l’impulsion du président, est sans doute l’un des pays qui a le plus accompagné sa population à travers cette terrible crise sanitaire doublée d’une crise économique par la mise en place de mesures socio-économiques considérables pour limiter les dégâts.

Alors évidemment, tout n’a pas été parfait, et si un journal n’a pas vocation à chanter les louanges de l’exécutif, il n’a pas non plus à instruire en permanence un procès contre l’actuel pouvoir en passant sous silence ce qui a été fait pour le pays et l’action positive menée par le gouvernement pour lutter contre la crise sanitaire. 

   C’est Edwy Plenel qui déclarait il y a peu que Médiapart était le seul journal indépendant du paysage médiatique français, accusant au passage tous les autres organes d’information de « se coucher devant le pouvoir ». On peut se poser la question de l’indépendance d’esprit de Médiapart  (cf. le slogan : « Seuls nos lecteurs peuvent nous acheter ») quand on voit à quel point le site d’information cultive son image de marque auprès d’un lectorat dont il entretient la radicalité. Une radicalité qui n’a cessé de se renforcer depuis l’avènement du mouvement des Gilets jaunes apparu en France en novembre 2018. Un mouvement de contestation sociale où Edwy Plenel avait voulu voir un mouvement d’expression démocratique. On se souvient de ce terrible samedi 1er décembre 2018, où, dans la ville du Puy-en-Velay, les Gilets jaunes, enfiévrés, mirent le feu à une dépendance de la préfecture de Haute-Loire. C’est donc cela, l’expression d’un mouvement démocratique ? Cela se caractérise par la manifestation de la violence et de la destruction ? 

Et que penser de l’initiative du journal en présentant sa fameuse balance bénéfice-risque  s’agissant de la vaccination contre le Covid-19, un outil dont le simple principe, en laissant entendre qu’il peut y avoir un point d’équilibre possible entre les risques et les bénéfices (alors que les bénéfices de la vaccination sont sans commune mesure avec les risques encourus), alimente le complotisme ambiant et l’incivisme d’une certaine partie de la population française en la confortant dans sa suspicion vis-à-vis de la vaccination (dont on remet indûment en cause les bienfaits incommensurables)? Qu’est-ce que pareille chose vient faire dans un journal ?

Ce même Edwy Plenel, qui, à une époque, fut le rédacteur en chef du journal Le Monde,  semble avoir complètement perdu de vue la formule de Hubert Beuve-Méry, le fondateur du quotidien, qui, en parlant du journalisme, disait que « c’est du contact et de la distance ». Chez Médiapart, il n’y a plus de distance, il n’y a que du contact. Chez Médiapart, on ne pratique plus que le  full contact  en tapant toujours sur les mêmes figures du pouvoir, qui font office de punching ball.

Ce qui n’empêche pas Edwy Plenel, soit dit en passant, en présentant le manifeste de la nouvelle Charte de participation de Médiapart, de  formuler le vœu (pieux) que l’exercice démocratique de la liberté d’expression tende à « élever le débat et non à l’abaisser », ignorant au passage à quel point la modération, au sens littéral du terme, n’est pas le fort de Médiapart dont l’intransigeance le dispute à la radicalité. Pour ne pas dire l’aveuglement.

Alors pourra-t-on penser, pour quelle raison faire part de tout cela, dans cet espace de libre expression (ce qui, au passage, est la marque distinctive de Médiapart, et est à porter au crédit du journal) ? Après tout, si l’on n’est pas satisfait de la direction que prend Médiapart, pourquoi y rester ? Pourquoi ne pas se désabonner et quitter définitivement ces rivages numériques au lieu de m’élever de la sorte et de prêcher dans le désert ? Sans doute parce que j’estime qu’il est important de dénoncer ce que je considère être un dévoiement de la pratique journalistique que j’observe de la part d’un organe d’information qui pense devoir son succès à son indépendance et à son pluralisme. Ce qui est aussi une manière de tester ce pluralisme théorique, qui, en réalité, fait surtout la part belle à tous ceux qui entrent en résonance avec l’opinion dominante du journal, tous ceux qui entrent le sillage de la lutte permanente que livre Médiapart contre l’actuel pouvoir. Une démarche périlleuse qui, de mon point de vue, « fait la courte échelle à l’extrême droite » pour reprendre la formule d’Edwy Plenel.

     En cette époque placée sous le signe de tous les dérèglements, le dérèglement climatique, le dérèglement sanitaire mondial (avec l’effondrement de la barrière des espèces supposée protéger l’être humain des maladies d’origine animale), le dérèglement des consciences et du bon sens (que révèle notamment l’hystérisation en France de la question de la vaccination contre le Covid-19), se résigner à cette radicalité invasive sans la dénoncer (une radicalité symptomatique en France des divisions croissantes au sein de la société) serait une forme de démission, de désertion, de lâcheté qu’exaucerait  le silence (la solution de facilité).   

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