Parce que, lors d’une interview dans les locaux d’Europe 1, le tout nouveau patron de Bercy a prononcé le mot « beaucoup » s’agissant des femmes qui sont illettrées parmi le personnel de l’abattoir Gad, tout le monde lui est tombé dessus ou presque. Or, selon Rue89, l’illettrisme est effectivement un vrai problème au sein de cette entreprise, qui concerne un salarié sur cinq (soit 20% contre 7% pour toute la France), à telle enseigne, que depuis 2010, des formations de remise à niveau sont même dispensées au sein de l’abattoir.
On aurait dit que tout le monde attendait au tournant Emmanuel Macron, pour lui faire payer d’avoir été banquier de Rothschild. Or il n’y avait rien de méprisant dans les propos du nouveau ministre de l’Économie et des Finances, bien au contraire, il dénonçait seulement la réalité de l’illettrisme en France, une réalité qui fabrique des exclus quand à ce fardeau se rajoute le poids d’un licenciement. Certes, le propos était maladroit, il a même pu blesser des employées de l’abattoir Gad, raison pour laquelle le ministre s’est empressé de présenter ses « plus plates excuses » devant la représentation parlementaire, mais en aucun cas le propos du ministre ne visait à stigmatiser les concernées, bien au contraire, il ne faisait jamais que rendre compte de cette triste réalité.
Quel est donc ce pays de Tartuffes où l’on nous fait prendre des champignons de Paris pour des truffes ? Comme si le seul véritable faux pas commis par le ministre ne résidait pas tant dans la formulation de la dénonciation de cette réalité que dans le simple fait d’avoir évoqué l’existence de l’illettrisme dans le monde du travail. Et qu’on ne vienne pas avancer comme argument que, parce qu’il a travaillé pour Rothschild, le nouveau ministre aurait perdu de vue le sens des réalités, car en fait ce qu’on lui reproche est le tout contraire, c'est d’avoir parlé sans fard d’une réalité tabou au sein du monde de l’entreprise. La preuve, pour les employées interrogées à la sortie de l’abattoir, l’illettrisme dans leur entreprise était comme l’île aux enfants, une fiction ou presque. Comme si, pour lutter contre l’abattement socio-économique et l’indigence de leur condition, les gens préféraient verser dans le déni de la réalité et se chercher un bouc émissaire d’autant plus marron qu’il porte le nom de Macron.