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Billet de blog 21 mars 2014

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L'avis des autres

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ce n’est pas tant ce que Nicolas Sarkozy veut dire aux Français que ce pour quoi il les prend, qui devrait s’imposer à l’esprit des citoyens de ce pays.

Après avoir joué pendant cinq années durant le rôle de président de la République, le rôle du président de tous les Français, parlant pour les tous les Français, après avoir été la voix de la France en ouvrant la voie du pays vers l’avenir, voilà que Nicolas Sarkozy joue désormais le rôle de la victime expiatoire de cette même République pour laquelle il a tant donné, pour cette « France éternelle » dont il a porté le nom à travers le monde entier, tel un apôtre du christ apportant la bonne nouvelle au reste du monde. Mais si l’on en croit la tribune que lui offre le Figaro, le fruit est amer et la France bien ingrate, qui, au lieu de lui être redevable pour tout ce qu’il a fait pour Elle, est devenue une dictature ne reculant devant rien pour le piéger en employant les méthodes de la Stasi, cette fameuse police politique de l’ex-RDA dont parle La vie des autres (film de Henckel Von Donnersmarck, sorti en salles en 2006).

Comment, lui, qui porta la voix de la France à travers le monde et qui lui indiqua la voie à suivre, sans ménager sa peine ni compter ses efforts, comment lui, qui porta la croix de la France cinq années durant, pourrait-il être mis en croix par la France ? Comment un tel renversement de situation est-il possible (sans l’intervention du Malin) ? 

Mais qui donc veut la peau de Nicolas Sarkozy ? Les juges, évidemment. Car tout l’appareil judiciaire s’est ligué contre lui. C’est un complot d’État. Et puis François Hollande, cela tombe sous le sens, puisqu’il est le premier magistrat de France. Et avec lui tous les siens, des félons, plus vénéneux que les frelons asiatiques.

Non, ce n’est pas tant ce que Nicolas Sarkozy veut dire aux Français que ce pour quoi il les prend, qui vaut son pesant de sens. Et cette posture qu’il prend dans cette tribune, la posture du tribun trahi, cette dignité bafouée dans laquelle il se drape, cet honneur sali, tout cela relève de la comedia dell’arte. Est-ce parce que Carla Bruni descend de la botte italienne que son mari poursuivi par le sort monte sur les planches pour marcher sur les traces de cette culture-là ? Celle du tartuffe ?

Et si Nicolas Sarkozy se prend pour un messie, ce pour quoi il prend les Français, en revanche, ne vole pas très haut. Il les prend au mieux pour de pauvres idiots. À moins que ce ne soit pour de francs abrutis. Car l’avis des autres, Nicolas Sarkozy s’en moque comme d’une guigne. Les autres ne l’intéressent que dans la mesure où ils lui apportent leur voix, où  ils contribuent à sa gloire en lui gonflant l’ego comme l’hélium gonfle la toile d’une montgolfière.   

Ce n’est pas tant ce que Nicolas Sarkozy veut dire aux Français qui est important que le fait qu’il ait été président de la République et ce que cela veut dire de la France, de son état réel, de l’État français tout court. Et ce que cela veut dire laisse sans voix. Comment un homme pareil a-t-il pu accéder au pouvoir suprême ? Qui sont donc les Français pour avoir porté à la présidence de la République un homme de cette espèce-là, qui traite sans vergogne la République française de dictature dès lors qu’elle ne sert plus ses intérêts particuliers ? Quel est donc ce pays qui a permis à un tel homme d’exercer les plus hautes fonctions ? La patrie des droits de l’homme ? Quelle est donc cette farce grotesque que déploie Nicolas Sarkozy pour faire diversion et escamoter les soupçons de faits d’une gravité sans précédent pour un homme ayant exercé sa charge ? 

Si Thierry Herzog devrait être poursuivi par la justice pour outrage à magistrat en traitant de « bâtards » les juges de Bordeaux  lors de ses échanges téléphoniques avec son client présidentiel, une ligne placée sur écoute, comme nul n’est censé l’ignorer désormais, comme la loi, Nicolas Sarkozy, lui, devrait être poursuivi pour se permettre de décrier de la sorte les institutions du pays dont il a présidé les destinées cinq années durant. C’est cela, le scandale d’État : que cet homme-là ait atteint le sommet de l’État.

Ce que regrette Nicolas Sarkozy, en assimilant les institutions républicaines à la Stasi, ce n’est pas tant l’absence de l’État de droit (qu’il a foulé aux pieds allègrement le temps de sa mandature) que de celle de l’État de droite qu’il s’est employé à mettre sur pied quand il était président de la République. C’est cela, que dit Nicolas Sarkozy dans sa tribune. Et rien d’autre.

Mais les Français qui pensent que Nicolas Sarkozy veut leur dire quelque chose ne sont pas de cet avis : l’avis des uns, contre l’avis des autres.  

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