Ludovic Lamant et Jade Lindgaard ont rencontré Jean Luc Godard à Rolle en décembre 2021, sans photos ni caméras. Alors pour retrouver « à tout prix » une image de Jean Luc Godard et d'Anne Marie Miéville sa compagne cinéaste, il faut aller sur google street rue du temple à Rolle devant la devanture d'un magasin de vêtements « A tout prix ». On y voit depuis dix ans, immobiles et figés pour l'éternité d'Internet, les cinéastes de culture protestante, rue du temple, dans une scène de retour des courses.

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Google street le 5 décembre 2021
Le visage Jean Luc Godard est maintenant flouté parce qu'il est « représenté » ou « affiché » sans son accord, alors que vous pouvez visualiser l'Arc de Triomphe, avec en fond la Défense et l'Arche de la Défense, sur la place Charles de Gaulle, depuis le haut des Champs Elysées en actionnant Google street.
Google ne savait pas en filmant automatiquement qui était le personnage rue du Temple. C'est le public qui l'a signalé pour le faire disparaître. C'était l'innocence assassine de l'algorithme sans auteur. Et son rôle d'éditeur revient à effacer partiellement ce qu'il a produit.
Godard face à Lindgaard et Lamant dit le 3 décembre 2021 : « « Je ne parle plus de cette langue qui est faussée, je la parle pour parler avec vous ou faire mes courses, sinon je ne m’y intéresse pas. » Google ne sait pas quand sa voiture robot va saisir le couple dans les années 2000 que Godard fait ses courses et qu'il redéfinit le monde. Qui, Godard ou Alphabet de Google ?
Godard en visionnaire extra lucide dit dans son entretien : « Mais tout ça, c’est l’alphabet. Et quand j’ai vu que Google allait sûrement s’appeler Alphabet, je me suis dit : « Ça y est, c’est fait. » Et donc le grand coupable, pour moi, s’il faut employer le mot coupable, ou une espèce de promoteur, ou le diable, si on est religieux, c’est l’alphabet.
Pourquoi ? Le grand coupable de quoi ?
Mais parce que les lettres – qui sont ensuite devenues des chiffres –, on peut les tordre dans tous les sens. Si on lie ça un peu à Cézanne, disons aux images pour employer le mot courant, eh bien, on peut survivre. Si on ne le fait pas, si on ne fait qu’interpréter une image, ou une image donnée comme les caricatures, ça ne sert à rien. Donc je suis assez seul, dans une prison comme ça. »....
« Depuis l’invention de l’alphabet, on est un peu maudits. Si le diable est dans les détails, il est dans les détails des 26 lettres qui sont devenues très vite, grâce aux mathématiciens, des milliards et des milliards de chiffres. Je ne dis rien d’autre. »...
«« Un fait est ce qui se fait. Mais il ne faut pas oublier que c’est aussi ce qui ne se fait pas. » Et pour moi, ce qui ne se fait pas aujourd’hui est plus un fait que ce qui se fait. Si je dois le dire comme ça. Le vivre, c’est autre chose. Tout ce que je peux vous dire aujourd’hui, c’est que ce qui ne se fait pas entre nous est beaucoup plus important que ce qui se fait. Et qu’en particulier, Mediapart ne fait que ce qui se fait. Il cherche toujours qui a touché quel argent. Il ne cherche pas ce que la personne qui a touché l’argent n’a pas fait. »....
« Vous m’avez déjà rencontré autrefois, où on a dit tout et le contraire de tout. Maintenant je vous dis le contraire de rien. »
Godard à la fin de l'entretien cite 5 phrases dont une de Claude Lefort :
« « Les démocraties modernes, en faisant de la pensée un domaine politique séparé, prédisposent au totalitarisme. »
Alors entre Zemmour qui réécrit l'histoire publiée par Cnews de Bolloré et Google qui s'empare des mots pour formater le monde à travers son alphabet, restent les créateurs d'images et les insoumis.
Godard dit : "On ne peut pas parler" et Google le fait avec votre place, mais l'important est dans ce qu'il ne fait pas. Godard joue son rôle dans Google Street à Rolle face à Alphabet, le holding.