Interdites par le pouvoir, ces actions de protestation ne durent que quelques minutes. Aussitôt terminées, les militants se dispersent avant l’arrivée de la police pour éviter une arrestation.
Journée des tatars de Crimée. Elle a lieu les 18 du mois, en commémoration du 18 mai 1944. Ce jour-là, les forces du ministère de l’intérieur soviétique ont déporté la totalité des Tatars de Crimée, soit 200.000 personnes, en Ouzbékistan et au Kazakhstan. Il s’agissait pour la plupart de femmes, enfants et vieillards. Les hommes valides mobilisés dans les rangs de l’armée soviétique étaient absents, car ils combattaient alors sur le front. Démobilisés après la guerre, ils ont été également déportés. Cette population a été traitée comme du bétail. Contrainte à coups de crosse de fusil de pénétrer dans des wagons à bestiaux, elle a été transportée dans des conditions sanitaires horribles. Beaucoup ont péri en chemin. Les réfractaires ont été abattus sur place.
Alors que tous les peuples déportés sous Staline, Ingouches, les Lituaniens ou les Circassiens par exemple ont été autorisés après la mort du dictateur de retourner sur leur terre ancestrale, les Tatars de Crimée ont été autorisés à retourner seulement sous Gorbatchev en 1989.
Aujourd’hui, après l’annexion de la Crimée par la Russie de Poutine le martyr des Tatars de Crimée resurgit : assassinats extrajudiciaires, déportations de dissidents, perquisitions, arrestations. Des affaires de terrorisme, d’extrémisme sont fabriquées de toute pièce. L’organisation religieuse « Hizb ut-Tahrir » a été interdite en Russie et ses membres sont lourdement condamnés. Les peines atteignent 17 ans de prison et plus. « Hizb ut-Tahrir » est une organisation non violente autorisée en Ukraine et dans la plupart des pays européens. De nombreux Tatars de Crimée sont accusés de terrorisme sur le simple fait de leur foi musulmane. En annexant la Crimée, les occupants russes ont pris les Tatars de Crimée en otages.
Les avocats des prisonniers Emil Kurbedinov, Eden Semedlyaev et de bien d’autres estiment que les persécutions se fondent sur le seul motif religieux. L’Ukrainien ethnique Vadim Siruk est également poursuivi pour sa seule conversion à l’islam.
L’occupation russe de la Crimée ukrainienne a débuté en hiver 2014. Les Tatars de Crimée et les Ukrainiens qui ont refusé d’accepter la citoyenneté russe ont été les premiers à subir la répression. Il s’agit de la continuation de la politique stalinienne contre les peuples « frères » de l’URSS.
L’invasion de la Crimée par les troupes russes a été qualifiée d’occupation par la Cour internationale de La Haye. Les droits du peuple tatar de Crimée ont été anéantis par la dissolution du Congrés des tatars de Crimée « Majlis ». Ses militants sont persécutés par les services secrets russes. La haute juridiction internationale a estimé cela être une discrimination raciale.
Journée du Politzek. Ces manifestations de soutien se répètent également tous les 30 du mois, jour du « Politzek », soit journée du prisonnier politique. Débutée sous l’ère soviétique, cette tradition est à nouveau honorée aujourd’hui par des opposants au régime de Poutine.
Dans toute la Russie, les arrestations à caractère politique se multiplient également. Les organisations humanitaires estiment à 350 le nombre de prisonniers politiques à l’heure actuelle en Russie. Leur nombre est égal à celui de l’époque d’Andropov. Andropov et Poutine, tous deux, directeurs du KGB, devenus dirigeant du pays.

Les partisans de Poutine clament qu’ils vont refaire « 1937 », année la plus noire des purges staliniennes. Sans aucune preuve ou décision de justice, tout opposant est déclaré extrémiste ou terroriste. Un site (http://fedsfm.ru/documents/terr-list) expose ces personnes à la vindicte publique. Il ne reste plus qu’à les arrêter et à les condamner. En ce qui concerne l’arrestation, cela est déjà fait pour le pacifique démocrate Marc Galpérin. Son nom apparaît sur ce site-pilori. Les accusations qui lui sont faites sont secrètes. Lui et ses avocats ont signé une obligation de non-divulgation. Marc Galpérin est assigné à domicile en attente d’un procès qui sera à huit clos et qui le menace de cinq ans de prison.
Malheureusement, ceci est le visage la Russie contemporaine. La Fédération de Russie n’a pu réussir à devenir un pays européen moderne. Elle s’embourbe dans le système dictatorial du siècle dernier. Elle ne peut se défaire de son héritage soviétique. Les monuments dédiés à Staline, tyran qui a anéanti des millions de personnes innocentes, témoignent de cette nostalgie impériale.

Agrandissement : Illustration 3

Dernièrement, un sondage d’opinion réalisé par le centre Levada met en évidence ce syndrome post-impérial. 38 % des personnes interrogées estiment que Joseph Staline est le principal personnage historique. Avec 34 %, Vladimir Poutin et Alexandre Pouchkine occupent la deuxième place.
Ceci est le résultat d’un travail de propagande fantastique qui a contraint les citoyens russes à oublier leur propre passé et les crimes de ceux qui sont revenus au pouvoir avec Vladimir Poutine.