Les autorités tentent d’occuper le terrain nationaliste, affirme Dmitri Demushkin leader du parti « Les Russes ». Pour ce faire, elles pourchassent nos militants, dit-il. Il note également l’apparition d’une crise économique en Russie et prédit une aggravation de la situation économique et politique dans le pays.
— Bonjour. Permettez que nous commencions. L’association politique « les Russes » est sur le point d’être interdite en Russie. En général, si une personne apparaît souvent sur notre chaîne TV, c’est qu’elle a des ennuis. Malheureusement, en ce qui vous concerne, c’est ainsi.
Dmitry Demushkin est aujourd’hui notre interlocuteur. Dmitry, vous êtes un de nos habitués. Pourquoi interdit-on aujourd’hui le parti « Les Russes » ?
— L’association « Les Russes » est officiellement fermée pour non-conformité de ses objectifs avec la législation russe. Cependant, c’est un euphémisme de dire que c’est une chicanerie, puisqu’en avril 2013, aucune violation n’a été constatée lorsque le procureur de Moscou avait déjà vérifié ces mêmes objectifs et statuts.
. Mais apparemment, en 2015, quelque chose a changé, et des transgressions sont apparues.
— Avez-vous le sentiment que vous gênez quelqu’un ? Qui ?
— La plainte vient du procureur. Mais, bien sûr, nous ne nous le gênons en rien personnellement. Je pense que nous gênons des personnes beaucoup plus élevées.
Aujourd’hui, il y a une situation paradoxale, malgré un amendement, moi et Alexandre Belov, nous sommes évincés du procès sous prétexte que nous n’avons pas de formation juridique supérieure. Cela est récent, mais voyez, maintenant, c’est nous qui sommes éjectés.
D’ailleurs, la première fois en Russie, il y a un procès avec quatre parties. C’est assez incroyable. En plus de nous, qui serons absents à présent, le procureur, le ministère de la Justice, le Service fédéral de sécurité. Nous devons maintenant embaucher un avocat qui devraient leur faire un rapport sur notre mouvement, ses buts et objectifs. Mais de plus, la Cour sera « de facto » une partie accusatrice qui mettra en pièces notre avocat sans justification.
Cependant, la question n’est même pas sur le mouvement. Notre association contrarie leurs plans et met des bâtons dans les roues au nationalisme russe dans sa forme actuelle. Pour nous, cela est évident. Je peux confirmer cela non seulement par des suppositions, mais aussi par des faits. Leur tâche est de détruire le nationalisme russe. Et nous savons même à quelle date. Ils doivent rendre compte à ce sujet.
Je sais que, avant la manifestation « marche russe » du 4 novembre, ils doivent me mettre en garde à vue. Pour cela, ils ont déjà préparé un dossier en vertu de l’article réprimant l’« extrémisme ». Mais, comme on me l’a dit, cela ne leur convient pas tout à fait et ils essaient d’inventer un délit quelconque contre moi. Je ne sais pas ce que ce sera : hooliganisme, vol, arrestation dans un bordel, viol, ou, comme Belov, vol au Tadjikistan de 15 ou 25 milliards de dollars, préparation d’une insurrection sur Mars. Mais pour le FSB, ce n’est pas un problème d’inventer quelque chose. En outre, on m’a informé que des agents du FSB ont demandé à des personnes de déclarer que je leur avais volé leur téléphone mobile. Si on ne m’accuse que de cela, ce sera vraiment insignifiant.
— Niveau très intéressant ! Bientôt, vous volerez des cigarettes dans la rue.
— Oui, sans doute. Ils ont besoin d’un petit délit, pour discréditer. Ils ne veulent pas faire de nous des prisonniers politiques, car les raisons de notre persécution seraient évidentes. Ils veulent un petit délit pour dire : « regardez, il vole un téléphone mobile ».
Pour cela, il se prépare un film de propagande contre nous. Il sera diffusé sur NTV. Nous avons été informés. Pour la réalisation de ce film, ils ont même transféré de Sibérie à Moscou le prisonnier bien connu George Borovikov. Il a été filmé à Moscou. Je ne sais pas ce qu’il a dit, mais je pense que le FSB l’a transféré ici pour une bonne raison.
Cet épisode se prépare pour la « Marche russe ». Il servira de prétexte pour discréditer le mouvement patriotique, en particulier, moi personnellement et Alexander Belov, qui est emprisonné actuellement à « Matrosskaya Tishina ». Il est accusé de détournement de milliards de dollars, de préparation d’un coup au Kazakhstan et autres balivernes.
— Dmitry, supposons que l’on interdise votre parti « Les Russes ». Qu’il disparaisse de la vie politique. La nature a horreur du vide. Qui voient-ils à votre place ?
— Les agents du FSB (KGB) nous laissent entendre depuis longtemps que nous les gênons. Ils veulent reformater le nationalisme. Dans le même temps, ils se rendent compte qu’il disparaîtra complètement si je disparais. Ils ne savent pas qui mettre en place. Aujourd’hui, le mouvement est un terrain brûlé au napalm. À ce jour, il n’y a pas un seul membre du conseil d’administration du parti « Les Russes » en liberté. Soit, ils ont fui en Ukraine, ou sont en prison. Budnikova Sophia et Basmanov sont en fuite. Le 5 août, doit débuter le procès contre Denis Tioukov, membre de notre conseil. Alexander Belov est en prison. Qui doivent-ils mettre en tête du mouvement nationaliste ? Les agents du FSB m’ont laissé entendre que le nationalisme russe sera reformaté et que d’anciens combattants du Donbass devraient raviver un nouveau nationalisme. Sous le slogan « Pour le monde russe », ils devraient participer à la manifestation « Marche russe ». Mais pour eux, le « monde russe » est à l’extérieur de la Russie.
— Ce serait Strelkov (Girkin) ?
— Strelkov, Boroday, mais encore une fois, je ne peux pas confirmer, parce que personnellement, je ne parle pas de ce sujet avec eux. Mais selon le FSB, ce sont eux qui doivent déterminer ce qu’est le nationalisme russe. Son drapeau doit être dans leurs mains.
Pour cela, sans aucun doute, ils doivent nous mettre en prison. Parce que dans une compétition honnête, ils ne nous vaincront jamais. Tous en sont conscients. Que de fois, le Kremlin a tenté de doubler « La Marche Russe » en créant des organisations pseudo nationalistes. Il n’a jamais réussi, malgré l’argent, les moyens et campagnes de TV prodigués.
Par conséquent, la clé d’un succès minimum est mon emprisonnement et la condamnation de Belov pour que ce dernier ne réapparaisse pas. Le pouvoir doit aussi achever les nationalistes blessés, qui gisent, ci et là. Sans cela, ils n’ont aucune chance de réussir.
— Dmitry, passons sur le thème international. La Russie bombarde la Syrie. Votre association, tant qu’elle existe encore, a-t-elle une opinion à ce sujet ?
— Je vais exprimer mon opinion personnelle. Dans une situation difficile actuelle, quelque chose est à cacher. Tous se plaignent de la crise économique. Personnellement, la crise économique est un phénomène absolument secondaire. La première chose, c’est la crise politique...
Il court une blague à l’administration présidentielle : « Nous avons besoin d’un expert pour liaison avec la réalité ». C’est vraiment ainsi !
Si le Q.I. du moujik russe est 100, son niveau de conscience de la réalité n’est que de 50.
En effet, ces gens, au cours de ces 25 dernières années, n’ont vu la vie qu’au travers des verres de leurs limousines blindées allant de leurs cottages résidentiels au Kremlin. Ils ne comprennent pas ce qui se passe. Comme Marie-Antoinette qui a répondu : « Que le peuple mange de la brioche s’il n’a plus de pain. »
Ici, c’est la même chose.
L’économie n’est autre que la conséquence de cela. L’impasse ukrainienne dans laquelle ils se sont fourrés eux-mêmes. Pour le Russe ordinaire, la Crimée, l’Ukraine, la guerre sont directement liées à la détérioration de sa vie, responsables de ce qui arrive. Les sanctions ont suivi et nous en souffrons. En outre, les gens n’ont pas encore totalement consommé leur pain blanc. Ils pensent que cela s’arrangera. Mais, ça ne fera qu’empirer. Maintenant, ils vont épuiser leurs réserves et commencera ce qu’on appelle la « crise ». Non pas du secteur bancaire. Ce ne sera pas une conversation d’économistes. Ce sera une réalité dans la rue. Quand les gens se rendront compte que l’on mange moins, les revenus baissent. Qu’il n’y a pas de travail, et que le crédit à la consommation est hors de prix.
À mon avis, c’est pour cela qu’a été conçue la nouvelle grande idée : la lutte contre le terrorisme international.
La Russie s’est enferrée là dedans pour trouver une excuse. Ce n’est pas à cause de nos erreurs politiques et géopolitiques que tout irait mal, mais parce que nous nous battons contre le reste du monde, et contre le terrorisme.
Il y aura une réponse. Ce sera des explosions, attaques terroristes et autres actes de violence dont, bien sûr, les terroristes seront responsables. Cela sera prétexte pour acclamer le leader national.
Mais, contrairement à l’Union soviétique, ces messieurs ont beaucoup moins d’énergie, de l’influence et d’esprit.
J’observe ce qu’ils font. Je suis lauréat en économie et je peux dire qu’ils n’ont aucune solution. Ils essaient de réagir à la situation actuelle. Depuis 2001, l’année où ils ont pris l’habitude de réagir à l’information. Maintenant, ils tentent de faire pression sur l’Ukraine, de la fusionner, de faire une sorte d’accord afin de ne pas perdre la face, et maintenant, il y a un nouveau thème. Je suppose que tous ces bénévoles passionnés iront là-bas combattre et mourir. Pourquoi donc ne veulent-ils pas résoudre la « question russe » ici ? Ils veulent la résoudre quelque part dans le désert en Afrique, l’Ukraine, en Chine ou encore ailleurs.
L’État trouvera toujours ces niches, en Serbie ou ailleurs. Qu’ils aillent là-bas et qu’ils y restent.
— Dmitry, dernière question. Après la crise économique, la crise politique est inévitable. Quand la prédisez-vous ?
— La crise politique est arrivée. À mon avis, la crise économique est la conséquence de la crise politique, à savoir, l’effondrement du système. Cependant, je voudrais, de souligner, non pas l’effondrement de la Russie elle-même, mais l’effondrement de la Fédération de Russie en tant que système de commande administratif. Je pense que cela va se passer d’ici deux ans. Pas plus.
Il y a les pessimistes qui disent trois ans. Des optimistes disent dans un an. Mais, ces types n’en ont pas pour longtemps à rester au pouvoir. Un officier de haut rang du FSB (KGB) m’a dit qu’il allait bientôt nous emprisonner. Que c’était fini pour nous ! Je lui ai répondu que c’était les maîtres du Kremlin qui n’ont pas de perspectives politiques et son propre patron... quoiqu’il pourra encore retourner la veste...
Aux personnes qui sont prêtes à aller se battre quelque part pour le « monde russe », je veux leur dire : « Inutile de partir ». Bientôt, tout commencera ici. Vous pouvez déjà creuser des tranchées ici et maintenant. Parce que le Kremlin a enfanté, bientôt cela surgira chez nous.
— Merci, Dmitry, pour la conversation. Nous ne voulions pas replonger dans les années répressives de 1937. Mais il semble que ce sera pire. La Russie retournera en 1917.
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