Le Ministère ukrainien des Affaires étrangères a déclaré que les territoires occupés par les séparatistes russes sont désormais hors du contrôle administratif ukrainien. L’ intégrité territoriale proposée à l’Ukraine, incluant ces zones aux mains des séparatistes, était un cadeau empoisonné tant que la situation de ces régions n’aura pas éclaircie et stabilisée. Pour pouvoir les réintégrer sous le contrôle administratif ukrainien, deux conditions prévues par les accords de Minsk sont indispensables : le retrait des armées étrangères (russes) de ces territoires et le contrôle de la totalité de la frontière russo-ukrainienne par le gouvernement de Kiev. Ainsi est déjoué le piège tendu par Poutine avec ces territoires qui auraient été un véritable cheval de Troie permettant d’influer sur l’Ukraine entière. Les plus ardents partisans de l'intégrité territoriale de l'Ukraine (Crimée non comprise) étaient Poutine et son ministre des affaires étrangères Lavrov. Ils désiraient inoculer dans le corps de l'Ukraine cette tumeur cancéreuse afin d’empêcher le rapprochement du pays avec l’Europe. Lorsque l’on discute avec des Russes, soumis à la propagande de Poutine, à propos de la situation économique du pays, ceux-ci s'exclament: « En Ukraine, est-ce mieux ? » La réponse est évidemment : « Non. » Cela signifie qu’en Russie tout va bien. Selon une vieille anecdote russe, on rapporte que l’on avait annoncé à un propriétaire que son isba avait brûlé. Le malheureux était désolé. Puis il posa la question : « Et l’isba du voisin ? » On lui dit que celle-ci avait brûlé aussi. Après avoir entendu cela, l’homme dit : « Alors, tout va bien. » L’instabilité tant économique que politique de l’Ukraine est un faire-valoir pour la politique du Kremlin et une dissuasion pour de futures révolutions colorées. La survie de ces républiques autoproclamées du Donetsk et de Louhansk, soumises aux mafias russes armées, est tout à fait incertaine. Personne n’investira dans la reconstruction de ces régions soumises actuellement à l’anarchie. Ni Moscou ni Kiev. Pour ce dernier, l’urgence est tout d’abord de sauver ce qui peut l’être, c’est-à-dire la partie de l’Ukraine non occupée par les milices et armées russes en l’isolant de cet appendice malade et incontrôlé qu’est le Donbass occupé.
Suite à cette décision, Moscou est dans la confusion. Il perd le contrôle d’un levier qui lui aurait permis d’influer sur la situation ukrainienne. La création d’un État paralytique, composé de régions désarticulées, incontrôlables de l'intérieur, aurait eu pour effet d’empêcher toute résolution de la crise ukrainienne .Ce projet « bosniaque » de coexistence pacifique, proposé par la Russie à l'Occident, était un marché de dupes. Il a échoué. La situation semble bloquée à présent pour le Kremlin.
Il reste deux solutions à Poutine : marche avant ou arrière.
- Marche avant : si le Kremlin augmente le niveau de son agression en Ukraine, il y aura une élévation des sanctions économiques contre la Russie, des armes létales seront cédées à l'Ukraine. La population russe est-elle prête à endurer une nouvelle aggravation de ses conditions de vie et à accepter de nouvelles pertes en Ukraine pour une chimérique « Novorossia » ? L’oukase signé par Poutine, déclarant « secret d’État » les pertes militaires en temps de paix, laisse penser que personne n’ acceptera le retour de ses enfants dans des cercueils.
- Un recul serait humiliant pour Poutine. Le soutien aux Russes ethniques de l’étranger était l’argument principal de son discours qui lui a permis de récupérer en 2014 une popularité en baisse. Cette reculade clamera l’échec de son entreprise personnelle et provoquera une grave crise politique intérieure.
Poutine considère la population comme une matière première qu’il peut sacrifier à merci pour ses expériences au succès incertain. Napoléon et Hitler avaient enrôlé les adolescents pour tenter de sauver leur empire condamné. Comme tous les dictateurs, Poutine sacrifiera la vie des autres plutôt que perdre la face en reconnaissant ses propres erreurs. Il a décidé une sortie vers l’avant . Sa réponse est soviétique : l’escalade militaire et la confrontation avec le reste du Monde.
Il réagit instinctivement. Son attitude belliqueuse envers les USA lui donne l’impression de réincarner les grands leaders soviétiques . Cette sensation le grise et flatte la population. La Fédération de Russie, dont le PIB est actuellement comparable à celui du Mexique, se retrouve rehaussée spirituellement au rang de puissance mondiale par cette adversité avec les USA. Quel honneur ! La géopolitique planétaire devient un exutoire permettant d’oublier les manquements criants du régime en matière sociale. Rudoyez autant que vous voulez les USA, ils sont loin. Ainsi, vous ne pourrez en aucun cas blesser notre président. Au contraire ! Lors d’une discussion, votre interlocuteur russe citera immanquablement, au cours de sa première phrase, les USA. Si vous répondez en critiquant le régime, si vous prononcez le nom du président, vous verrez qu’il prendra ses distances immédiatement et cessera la conversation. Si vous insistez, il dira : « Que veux-tu de moi ? » « Que je monte sur les barricades ?» Alors, vous comprendrez que vous lui faites violence et qu’il veut s’éloigner de vous, car vous pourriez compromettre sa sécurité. Chacun sait que le régime de Poutine est mafieux. Mais chacun se tait, car il a peur. L’ exécution démonstrative de l’opposant Nemtsov à 100 mètres du mur du Kremlin confirme que cette peur est tout à fait justifiée. C’est dangereux et même mortel d’être opposant à Poutine en Russie. Il était aussi très dangereux de s’opposer à Hitler. Mais il a été encore plus dangereux de le suivre le Führer dans ses folles aventures. Six millions d’Allemands ont perdu ainsi la vie. Quel est aujourd’hui le véritable danger pour les Russes. Être pour ou contre Poutine. Voilà une question.
Poutine nous mène à la mort.
Poutine doit choisir entre une mort politique ennuyeuse et lente, sans gloire s’il était contraint de rapatrier ses mercenaires et ses chars du Donbass. Ce serait pire s’il abandonnait « Notre Crimée » face à la pression de la communauté internationale.
Par contre, il pourrait avoir une mort glorieuse et romantique en chef déclaré du « monde russe » en affrontant les plus puissants de ce monde. Dans un geste de désespoir, il pourrait mettre fin à la civilisation humaine en se transformant en kamikaze nucléaire. Écoutant les déclarations de certains personnages politiques russes, connus pour dire tout haut ce que Poutine pense tout bas, on est en droit de penser que cette dernière variante est tout à fait possible. M Prokhanov, rédacteur du journal nationaliste russe « Zavtra », dans une émission de télévision récente a dit : « Nous avons le choix entre une deuxième pérestroïka ou une troisième guerre mondiale. Nous perdons probablement la perestroïka, mais la troisième guerre mondiale, nous avons une chance de gagner. Alors nous devons choisir la troisième guerre mondiale. » Ces thèses sont confirmées par les diatribes publiques du député Jirinovsky qui crie que l’on doit brûler Paris, bombarder non seulement Berlin, mais toute l’Allemagne et bombarder les hôpitaux et les maternités ukrainiennes, déporter la population ukrainienne en Oural. Les lois contre l’extrémisme faites dernièrement par Poutine permettent de poursuivre et de condamner les auteurs de tels propos. Si Poutine ne les poursuit pas, c’est qu’il est d’accord avec eux. Jirinovsky avait formulé le voeu que Poutine prenne le titre d’empereur Vladimir. Un Bokassa russe en quelque sorte.
Y a-t-il en Russie des forces raisonnables capables d’entraver cette course folle vers le suicide collectif ? Les Français n’avaient pas pu arrêter la folie napoléonienne. Les Allemands, l’hitlérienne. Seules les capitulations militaires ont pu leur faire entendre raison. Le dictateur, s’il est acculé comme une bête fauve traquée, n’aura plus entre ses mains une simple ampoule de cyanure et un révolver d’ordonnance pour expédier dans l’autre monde, sa propre personne, sa maîtresse et son chien, mais un arsenal nucléaire capable de détruire toute la planète. Nous connaissions déjà les suicides au gaz détruisant toute une montée d’immeuble et celui avec un Airbus détruisant tous les passagers du vol« Germanwings ». On n’arrête pas le progrès.
Garry Kasparov dit que Poutine est un joueur de poker qui bluffe. Le champion du monde explique qu’à l’inverse d’une partie d’échec où toutes les données sont évidentes, car exposées sur l’échiquier, au poker chacun cache ses cartes. Le bluff joue un rôle essentiel. Poutine a déclaré qu’il avait mis en état d’alerte ses forces nucléaires lors de la conquête de la Crimée. Il convient tout d’abord de remarquer que cette déclaration est un changement radical de la doctrine nucléaire russe qui n'est plus destinée à défendre le territoire national sous le commandement d’un triumvirat composé du Chef d’état-major, du ministre de la Défense et du chef d’État, mais commandée à présent par le seul Poutine entreprenant des guerres de conquête et d’annexion. Il est peu probable que trois hommes deviennent fous en même temps. Qu’un dictateur à vie perde la tête en fin de carrière, cela s’est déjà vu. La menace d’utiliser l’arme tactique nucléaire contre l’Ukraine non nucléarisée a été répétée plusieurs fois. Ce n’est pas parce que les médias occidentaux ne vous ont pas retransmis ces menaces qu’elles n’existent pas. Ici, en Russie elles ont été prononcées tout à fait clairement et concrétisées par des images télévisées afin de rassurer le public russe qu'en dernier recours il reste le plus fort. Et si ce n'était pas le cas, on sera tous transformé en cendres nucléaires selon le présentateur TV Kessilev. Est-ce du bluff, comme nous le dit Garry Kasparov ? . Dans une situation critique, l’humanisme de Poutine sera-t-il plus fort que son instinct de survie ou son orgueil? Pour répondre à cette question, examinons son passé. Poutine est un produit du KGB qui a par le passé assassiné des millions de personnes. À l’âge de 17 et 18 ans, le frère et la soeur de ma voisine de palier ont été pendus par le KGB dans leur appartement sous couvert de suicide, afin de les empêcher de retourner en Angleterre auprès de leur famille maternelle, car ils étaient enfants d’espion russe fugitif. Hier, la corde, aujourd'hui, le polonium. Mais revenons à Poutine.
Ex-collaborateur de la STASI est-allemande, cet homme de l’ombre inconnu en Russie a acquis une popularité en organisant en 1999 une série d’explosions d’immeubles d’habitation en pleine nuit afin de tuer le maximum de personnes pour obtenir l'effet psychologique optimal. Il a réveillé dans la personne humaine les instincts les plus vils par un langage de voyou appelant ses troupes à aller « pisser sur les terroristes même dans les chiottes ». Le résultat fut 100.000 morts dans la Tchétchénie martyrisée.
Depuis sa résidence de Sotchi, où il se reposait, il a refusé l’aide de la marine étrangère pour sauver les 200 sous-mariniers du Koursk gisant à 100 mètres de profondeur en Mer Blanche. Cinq jours plus tard, lorsqu’il a interrompu ses congés pour se rendre sur place, tous les marins étaient déjà morts.
Il a donné l’ordre de prendre d’assaut la salle de spectacle du Nord-Ost à Moscou avec des gaz de combat qui ont tué 150 spectateurs-otages.
Son règne est celui des assassinats politiques, empoisonnement au polonium de Litvinenko, balles dans le dos pour Nemtsov, des procès politiques condamnant lourdement les opposants, affaire du 6 mai 2012 et des guerres renouvelées en Géorgie, Crimée, Donbass.
Après les espoirs démocratiques inspirés par la pérestroïka, le pays est revenu aux heures les plus sombres du stalinisme avec Poutine, ex-directeur de Loubianka, devenu dictateur à vie de Russie. Quel est le niveau maximum d’assassinats que peut bien autoriser à Poutine sa propre conscience ? En situation critique, il est sûrement prêt à bien plus que ce qu'il n'a fait jusqu'à présent. Poutine ne bluffe pas. Il est très sérieux lorsqu'il profère des menaces. Ce serait une grave erreur de ne pas les considérer.
L’échec de la Russie, en conflit avec le reste du monde, est inévitable. Tous les secteurs de l’économie ont été abandonnés à l’exception de celui de l’armement devenu pilier du régime. Le pays est totalement dépendant économiquement de ses adversaires dont le PIB cumulé est, plusieurs dizaines de fois, supérieur au sien. Poutine avait menacé d’utiliser le gaz comme arme en fermant le robinet alimentant l’Europe. Un an plus tard, les livraisons de gaz par Gasco Norwegian à l’Europe sont supérieures de 30% à celle du Gazprom. La Chine vient de livrer un méthanier géant aux USA, premier d’une série de huit qui inonderont l’Europe de gaz de schiste US dans un délai de deux à trois ans. Pierre le Grand, voulant moderniser la Russie, avait ouvert une fenêtre sur l’Europe, selon l’expression de Pouchkine. Poutin la ferme. La mise en place de ce nouveau rideau de fer précipitera la catastrophe économique et géopolitique de la Russie. Nous savons que la culture russe est une partie organique de la culture européenne. La volonté de se confiner dans une citadelle virtuelle assiégée par l’Occident flatte le personnage et invite le peuple à se blottir autour de lui pour trouver protection. Le fantaisiste veut faire de la Chine son allié stratégique principal. Poutine est un personnage TV. Ses répliques n’ont qu’un effet d’annonce et ne sont absolument pas le résultat d’une réflexion approfondie par des spécialistes.Son manque de professionnalisme et de prévoyance est évident. L’entourage du Président, ses amis de la coopérative « Oséro », de Saint-Petersbourg et de Loubianka ne lui sont d’aucun conseil, sinon pour l’aider à piller le pays. Personne ne croit à cette réorientation stratégique asiatique soudaine, surtout avec une Chine hégémonique ayant des ambitions expansives en Extrême-Orient russe. Poutine a fait voter secrètement par la Douma la loi « TOR ». Elle donne en exploitation à la Chine 175.000 hectares pour 49 ans en Extrême-Orient. Les entreprises chinoises peuvent importer de la main-d’œuvre chinoise sans quota et sans autorisation des services d’immigration russe. Dans l’immédiat, elles vont construire 25 millions de m2 d’appartements pour leurs travailleurs. En 2025, il y aura 25 millions de Chinois en Russie. Ce sera la première nationalité après les Russes. Pour satisfaire l’urbanisme chinois dans ces régions, les entreprises chinoises construisent 4 centrales hydrauliques sur les affluents de l’Amour et un pont sur ce dernier afin de faciliter les communications avec la Chine. L’argent issu de la cession de ces territoires, incapable de rafistoler le budget russe mis à mal par la baisse du cours des carburants, va se volatiliser . La Chine met à profit l'isolement économique et politique du pays dans lequel l’incapable de Poutine l’a placé. Le Kremlin est en train de tout faire pour contribuer à la prise en douceur par la Chine du contrôle économique et démographique de l’Extrême-Orient et de la Sibérie. Le flirt russo-chinois n’est que sporadique. Dans un proche avenir, le conflit frontalier russo-chinois des années 1970 va se réactiver, mais le rapport de force entre les deux pays n’est plus à présent à l’avantage de la Russie.
La Fédération de Russie, sous produit de désintégration du bloc socialiste et de l’URSS, va elle-même se décomposer rapidement. Le conflit ukrainien dans lequel s’entre-déchirent des Slaves, chrétiens, européens, est hautement destructeur pour la Fédération russe elle-même composée de peuples qui ne sont ni Slaves, ni chrétiens, ni européens. Un divorce à la Yougoslave se profile, car à présent, ce n’est pas l’humaniste Gorbatchev qui est à la tête de la puissance déliquescente, mais le KGB représenté par Poutine. Les mercenaires de tout poil et les coupeurs de tête de Kadirov, partis faire le djihad de Poutine au Donbass, avaient acquis une solide expérience en Tchétchénie. Prêts à écraser les futurs Maïdan, ils poursuivront leur carrière dans les conflits interethniques qui menacent de détruire la Fédération de Russie. Son effondrement pourrait entraîner avec elle la disparition de millions de personnes et peut-être de l’Humanité tout entière.