"Réussissons une réforme juste", que la formule est belle !
Comme elle sonne faux pourtant dans cette chorale des "faux culs" complaisants à l'égard des fraudeurs du fisc ! Mais non seulement ils chantent faux, faut-il encore qu'ils chantent fort ?
Xavier Bertrand a condamné avec fermeté le procès politique instrumentalisé par l’opposition sur la personne d’Eric Woerth. « Le PS veut nous empêcher de parler des retraites », a-t-il manifesté, rappelant que lorsque les Français ont des problèmes « il faut leur apporter des solutions, il faut apporter une vision politique » à notre pays.
Alors voilà, ce serait donc cela. Le PS ferait de l’obstruction idéologique, adopterait une attitude irresponsable en organisant « une cabale » contre le Ministre du Travail, ex-Ministre du Budget soupçonné « honteusement » dans l’affaire Bettencourt de financement illégal de parti politique, trafic d’influences pour avoir fait embaucher sa femme au service d’un « family office » chargé de l’optimisation fiscale de la première fortune de France, qui plus est s’est révélée être fraudeuse du fisc… et que sais-je encore !
Mais de quoi s’agit-il ?
Laissons un instant de côté la polémique politicienne et revenons au fond sur la réforme des retraites.
- Est-il capital oui ou non de réformer le régime des retraites par répartition ?
- Pour que cette réforme réussisse, ne doit-elle pas être comprise du plus grand nombre et donc être juste, comme le rappelle le Ministère du Travail dans son slogan « Réussissons une réforme juste » ?
- N’est-il pas nécessaire alors de prendre le temps d’un débat parlementaire au grand jour, en associant les français par la publicité des débats de la représentation nationale ?
Oui, oui et encore oui.
Parce que le système de retraite par répartition repose sur la solidarité intergénérationnelle, qu’il est une des clés de voûte du pacte social républicain, qu’il met en jeu l’idée qu’après une vie de travail rémunéré, l’accumulation de trimestres de cotisations, la collectivité des salariés octroie le repos aux aînés.
Au fond, ce sont des notions même de solidarité de justice dont il s’agit.
Mais rappelons nous à présent l’adage populaire « le temps, c’est de l’argent ».
Appliquons le au cas des retraites… dont le temps du repos est donc financé par la collectivité laborieuse.
Que dire alors de l’évasion fiscale récemment constatée dans ce contexte, si ce n’est qu’elle consiste à dissimuler tout ou partie de la richesse produite collectivement (il faut bien qu’il y ait des salariés qui produisent quelquepart une valeur par le concours de leur travail associé au capital d’une entreprise…), et donc, de voler au fisc représentant l’intérêt général, non seulement de l’argent mais aussi la valeur du temps qu’il représente ?
D’aucun vont m’accuser d’amalgame, mais tout de même :
Sur 78 millions d’euros dissimulés, le redressement fiscal de Madame Bettencourt devrait représenter quelques trimestres de smicards ? Et le bouclier fiscal dont elle bénéficie dans ce contexte, que symbolise-t-il si ce n’est le cynique déni de repos mérité après une vie de travail pour les plus faibles, les plus vulnérables, les « petites gens » ? Bref de « l’antirépublicanisme » abjecte ?
On m'objectera alors qu'il ne s'agit pas des mêmes caisses, que les cotisations retraites ne proviennent pas de l'impôt. Je répondrais alors qu'il me paraît intéressant à l'occasion de cette réforme d'envisager d'élargir l'origine des ressources, pour "réussir une réforme juste" ! Mais je suis trop naïf, tout cela ce n'est que de la "communication". Ce n'est pas ce que les citoyens sont en droit d'attendre d'un Gouvernement responsable qui tienne en bon ordre ses comptes, s'assure du bon fonctionnement de la collecte de l'impôt, et conserve le cap républicain de l'intérêt général, au lieu de se fourvoyer sur la voie de la ploutocratie et du clientèlisme...
Car monsieur de Maistre pourra bronzer tranquille sur son yacht au large de l’île d’Arros. Le récipiendaire de la légion d’honneur n’a pas eu besoin de calculer sa retraite en rassemblant ses fiches de paye, Madame Bettencourt a simplifié le calcul :
- Cinq millions d’euros… pour ses bons et loyaux services.
Je m’abstiendrais d’évoquer la retraite des époux Woerth… La nausée monte…
L’ex-Ministre du Budget nous assène chaque jour avec indécence qu’il n’a "rien à se reprocher" et ne rend même pas de comptes sur l’évasion fiscale avérée de l’employeur de son épouse, ni davantage sur le fait qu’il connaissait la domiciliation d’un compte en Suisse de celui-ci. Le rapport de l'IGF commandé par le Président suffirait à le "laver"... Il a dû manqué une dose "d'assouplissant"... l'affaire ne glisse pas vraiment dans l'opinion.
Les sondages en atteste, le Président n'a trompé personne :
le même qui était en charge des comptes de l'Etat, et donc de veiller au bon fonctionnement de la collecte d'impôts, semble avoir été passablement dissipé par l'activité partisane de la collecte des fonds du parti majoritaire... Soyons noble dans notre jugement, ne l'accablons pas davantage qu'il ne l'est, enfin pas encore :
Eric Woerth me fait penser à la guêpe engluée dans le pot de confiture... sous le feu des projecteurs.
Comment dans ces circonstances « faire de la pédagogie », expliquer, rassembler, renforcer le socle républicain par la nécessité d’une concorde nationale afin de « sauver » notre régime de retraite par répartition ? Ne devrions pas dans un premier temps, "nettoyer au kärscher" les comptes du premier cercle de l'UMP ? Voire plus simplement en exiger la dissolution pure et simple, avant de reposer calmement la question de la réforme des retraites, dans un dialogue sincère et respectueux des organisations syndicales ?
Non décidément Monsieur Bertrand, vous avez tord. Sur le fond, comme sur la forme :
Bien sûr le PS est un parti politique animé par des calculs en vue de l’accès au pouvoir. Mais en l’occurrence, les arguments que ses député(e)s produisent pour réussir une réforme juste dans le cadre du jeu légitime de l’opposition parlementaire sont fondés. Ou à tout le moins mériteraient-ils discussion, au lieu d’être escamotés dans le « huis clos » des sous-sols de l’Assemblée !
Car voyez-vous Monsieur Bertrand, l’opacité des débats rappelle l’opacité de comptes en Suisse ou ailleurs. Je ne me soucie guère pour la retraite dorée des membres du premier cercle de l’UMP, ni même la vôtre davantage. Je crains pour la justice sociale que vous foulez au pied chaque jour.
Vous avez raison sur un point. En ces temps difficiles, il est nécessaire "d'apporter une solution, une vision politique" au pays. Je vous répondrais, qu'il est urgent d'ajourner la réforme des retraites, au moins le temps qu'il sera nécessaire pour crever l'abcès insupportable de l'affaire Woerth-Bettencourt. Rendez-nous d'abord les trimestres volés, avant de nous demander d'acheter du temps par l'augmentation de l'âge légal du départ en retraite ! En un mot : Soyez crédibles !
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ACHETER DU TEMPS
Un jeune homme ambitieux revanchard sur lui même
Trop longtemps endormi incapable d'amour
S'éveilla désireux de sortir de sa flemme
De quitter son ennui pour voguer au long cours...
De se réveil brutal, douloureux à tout rendre
IL transforma sa vie, modifia les contours
Des plus beaux aux plus gais et surtout aux plus tendres
Du Cassandre qu'il était, il partait sans retour;
Mais encore faut-il prendre le contre-pied d'honneur
De ceux quimènent le Mondre, ces marchands de sommeil,
Qui vous apportent à table, le sirop, la liqueur,
De cet asservissement à leurs monts et merveilles.
"Trop peu pour moi Messieurs, de vous je n'ai que faire !
De vos brosses à reluire, de votre ordre social !
De vos vaines vanités, redoutables somnifères
Qui réduirait ma vie à votre espace vénal ?
Vous me voulez complice d'un système bien huilé,
Servile,docile, craintif, bien rangé dans ma case,
Où des traites de fins de mois occuperaient mes pensées,
Agrippé au fauteuil et vos murs que je rase ?
Lecteur des cours de Bourse, qui décident de mon sort,
J'apprendrai chaque matin si je reste ou je pars,
Crétin petit porteur, survivant bientôt mort,
D'avoir fait la putain, en cravate et costard ?
Jouez sans nous Messieurs, (car les femmes sont exclues)
Les vôtres tout comme celles qui respirent la gaité
Pissez plus haut, plus fort, sans compter votre jus,
Je préfère les rejoindre vers la sensualité."
Ce vaste continent de vous inexploré,
C'est l'Eden regretté, le paradis perdu
Et pourtant il est vierge encore peu visité
Par l'homme sensible qui sait, sans honte, se mettre à nu.
C'est Lesbos l'archipel, au large de l'Antique Grèce,
Où les femmes rassemblées s'étreignent de douceur,
Exilées, oubliées, perdues elles n'ont de cesse
qu'à demander l'Amour en attendant leur heure.
Cela fait deux mil ans que le Monde est ainsi,
Baigné d'une culture de douleur et d'ennui
De règles aliénantes à votre unique profit
Où encore l'ingérence dans le bonheur d'autrui.
Ce fût la Religion qui "au Nom de la Rose"
Lors de l'inquisition, maintint dans l'ignorance,
C'est à présent l'argent qui répand sa névrose
Outil de soumission aux Dieux de la croissance !
Laissez nous prendre le temps, de vivre, d'être et d'aimer
Le temps vous le volez, dictateurs du travail
Tyrans de lapensée, hypocrites canailles :
Vous n'aurez pas mon temps : Dussé-je vousl'acheter !
Pierre PEYRARD
Fevrier 2002