Ceci n’est pas une belle histoire ni un jeu comme beaucoup de Mediapartiens les apprécient. Non, ceci est une sale histoire et un témoignage vécu.
Un terrain vague, territoire incertain où l’on erre – c’est pour cela qu’on l’appelle vague, ce terrain –où tout peut être imaginé, où tout peut être vécu, même le pire…
Que ce soit en plein soleil, sous la pluie ou dans la neige, il faisait paisible ce matin là en Bosnie, en Tchétchénie, au Kosovo, au Sud Liban et même en Afghanistan, aux abords de Kandahar…
La guerre n’était pas tout à fait absente… Elle est encore proche… On se bat là-bas, au-delà des montagnes. Mais ici, dans cette vallée, c’est fini semble-t-il, si Dieu le veut…. Inch’Allah !...
Tant bien que mal, les activités reprennent et, d’abord, sortir des abris de fortune ou des caves sans la peur au ventre, marcher à l’air libre sans craindre d’être abattu(e)… Oui vraiment, réapprendre à vivre avec ce petit bout de paix, mégot de bonheur que l’on savoure goulûment, presque clandestinement, à la sauvette…
La petite fille est allée jouer dans le terrain vague, devant ce qui reste de la maison. Assise sur le pas de porte, sa mère la surveille en préparant des boulettes de semoule, l’œil aux aguets,… l’habitude de situer les siens dans l’espace, de manière instantanée, quand le feu de la guerre s’abat aveuglément et qu’il lui faut protéger « en réflexe » ses enfants….
Mais aujourd’hui, elle ne craint plus rien. Le regard se repose et revient aux tâches habituelles….
Soudain un léger bruit sec,…elle redresse la tête,…sa fille a buté sur un objet, une petite voiture en plastique…La mère aussi l’a vue…L’enfant se baisse, toute souriante…La mère bondit, se précipite, hurle :"Non !...Non !..." Un bruit mat, comme celui que fait une pile de planches qui s’écroule, une légère fumée blanche et, à terre, un petit corps meurtri, désarticulé.
L’enfant vient de ramasser ce qu’elle croyait être un jouet , en fait un jouet de mort, une mine anti-personnel…
Toutes les huit minutes, de par le monde, une personne est tuée ou mutilée à vie par cette arme des lâches qui frappe, à retardement, là où la paix tente de revivre, là où l’on essaie d’oublier les horreurs de la guerre…
Huit petites minutes, à peine le temps de faire une pause-café, le temps de réchauffer quatre parts de tarte au micro-ondes, le temps de la pub. à la télé, le temps qu’une autre personne, principalement un ou une enfant meurent ou soient mutilés à vie !...
Cette arme de barbares, en quoi est-elle utile ? En quoi est-elle efficace, après la guerre, alors que les anciens adversaires, guerriers chargés d’honneurs à l'oeil humide de fraternité, se congratulent d’avoir été des adversaires valeureux, à longueur de banquets et de cérémonies commémoratives ?...
Et pendant ce temps, dans le concert moralisateur des nations feutrées, dites civilisées, certaines – des plus puissantes- refusent de signer le document qui interdirait la fabrication, la vente et l’utilisation de ces armes de lâches !... Pourquoi ?...
A qui profite l’assassinat d’un enfant, d’un adulte innocents ?... Quelle est leur faute à ceux-là qui ont cru à la paix qu’on leur avait annoncée ?...
Dans cette vallée, la guerre était finie ; Qu’oserons-nous répondre à cette mère déchirée qui hurle : « Mais où est Dieu ?... Où est Yahvé ?... Où est Allah ?... à présent qu’elle doit vivre meurtrie par la lâcheté des hommes ?...
* Extraits de « Chroniques de la folie ordinaire »