Cette peine est assortie d'une inéligibilité de cinq ans d'application immédiate. Cela signifie une interdiction de se présenter aux élections présidentielles, même en cas d'une procédure d'appel qui n'est pas suspensive de cette mesure.
Il y a bien trop longtemps que nos élus politiques se croient au dessus des lois. Qu'un tribunal se permette de rappeler à nos politiciens voyous qu'il y a des règles à respecter est parfaitement légitime et il ne doit être possible de revenir sur une condamnation pénale, prise par un tribunal après un examen approfondi des faits, que par un recours devant une autre instance judiciaire. Une éventuelle procédure d'appel doit suivre son cours en excluant toute mesure d'amnistie ou grâce présidentielle, qui serait un outrage au principe de la séparation des pouvoirs.
Passons outre à ces indignations vertueuses de racailles américaines ou russes, qui se croient habilités à nous donner des leçons de démocratie au nom de principes qu'ils bafouent ouvertement. Les discours d'Elon Musk, complice d'une censure de la Science américaine, ou celui de Vladimir Poutine, assassin de ses opposants politiques, doivent être traités par le mépris. Pour les commentaires qui viennent d'autres pays européens, il faut constater que l'essentiel d'entre eux vient de personnalités d'extrême droite. Tiendraient-ils le même langage si c'était Jean-Luc Mélenchon qui était sur le banc des accusés ?
La seule question qui vaille débat est l'application immédiate de l'inégibilité : Selon Jean-Luc Mélenchon ou Eric Ciotti, ce serait aux électeurs et non aux juges de décider s'ils accordent leur confiance à Marine Le Pen et à son parti. L'expérience américaine montre que la tenue d'un procès en appel suspensif de la première instance donnerait lieu à des manoeuvres dilatoires qui aggraveraient encore la lenteur naturelle de la justice. En outre, il faut rappeler que les malversations du RN lui ont donné un avantage de 4 millions d'euros que n'avaient pas ceux qui avaient respecté les règles, en termes de financement des campagnes électorales. Pour ces raisons, l'inégibilité à caractère immédiat est une mesure de protection de la démocratie. Le fait qu'un Premier Ministre, qui pourrait lui aussi se retrouver sur le banc des accusés pour des faits similaires, se dise "troublé" ne change rien à l'affaire.
D'ailleurs, l'inégibilité prononcée contre Marine Le Pen ne vaut nullement interdiction pour le RN de présenter un autre candidat, car les électeurs votent - ou devraient voter - pour le programme d'un parti et non pour une personne. Si ce parti ne peut pas trouver, dans l'intervalle de temps qui nous sépare des élections présidentielles, un candidat qui tienne la route pour défendre son programme, cela sera surtout révélateur de sa vacuité. Une éventuelle défaite tiendrait alors de la sélection darwinienne, plutôt que d'une prétendue carence de la Démocratie.