A l'heure où trois communes du Val d'Oise (Montmorency, Groslay, Deuil la Barre ont voté à l'unanimité des conseillers municipaux une motion contre le boulevard intercommunal du Parisis (BIP), la minorité au conseil municipal de Soisy-sous-Montmorency a, à son tour, fait mettre à l'ordre du jour le 26 novembre une motion d'opposition au projet. Mais la tentative s'est conclue par la déconfiture de cette opposition, car le maire de cette commune, qui a pris parti en faveur du BIP dont le tronçon Est arrive à proximité du champ de course d'Enghien, contrôle une majorité écrasante du Conseil, bien que réélu de justesse (78 voix d'avance aux dernières élections). Comment, dans ces conditions, peut-il prétendre parler au nom d'une majorité qui serait en faveur du projet sans même avoir fait un sondage d'opinion sur le sujet ? Mais il faut rappeler qu'en 2015, le maire de Soisy a été condamné par le tribunal Administratif de Pontoise pour "non-respect des droits de l'opposition". C'est dire que monsieur Strehaiano ne s'embarrasse pas de démocratie !
La présentation de la motion par le porte-parole de la minorité a été précédée d'une introduction rappelant les effets néfastes du projet : aggravation de la pollution sonore, diminution de la qualité de l'air, augmentation de la circulation automobile à l'heure où l'on devrait plutôt tabler sur une décroissance, mort de la biodiversité et, sur un autre plan, comme à Montmorency, une ville coupée en deux et aussi une gabegie financière engloutissant des investissements dont on a besoin pour réaliser la transition écologique. Le texte de la motion elle-même, très laconique, tenait en quatre points : une prise de position résolue contre le projet du BIP ; un engagement à mobiliser les moyens juridiques et politiques pour le combattre ; une demande adressée aux instances régionales et départementales pour qu'elles abandonnent le projet ; une demande aux instances départementales de mise à disposition des emprises prévues pour le BIP en vue de réaliser des espaces verts.
Dans sa réponse, le maire commence par une pirouette digne de la dialectique jésuitique : comment,dit-il, peut-on prendre parti contre un projet qui n'existe pas ? On peut lui rétorquer : Comment pouvez-vous dire qu'il n'y a pas de projet alors que vous vous êtes clairement positionné pour la prolongation du BIP ? Tout au moins, dit la Gazette du Val d'Oise, dans la traversée de la commune de Soisy. En outre, le projet , même suspendu depuis 2016, est en cours de réalisation : deux tronçons, à l'est et à l'ouest sont déjà fonctionnels et attendent les travaux qui permettront leur jonction. Le projet existe donc au moins dans les intentions des autorités départementales et régionales et c'est à ces intentions que se sont opposées les trois communes citées plus haut.
Un autre point, soulevé par l'opposition, est l'engorgement de l'avenue Kellerman en sortie de la section ouest du BIP, sous l'effet d'un nombre croissant de véhicules de transit. C'est un problème, sinon créé de toutes pièces, au moins aggravé par la municipalité qui a aménagé cette avenue de deux fois deux voies en une fois deux voies, sous prétexte de créer des parkings le long de l'avenue. Une mauvaise synchronisation des feux aggrave encore le problème. Mais, plutôt que de rétablir l'ancienne configuration, le maire de Soisy préfère transférer ses problèmes sur la commune voisine de Montmorency. Il justifie cela par les difficultés des riverains à s'insérer dans le flot de voitures, sans réellement convaincre, car le passage en deux fois une voie est plutôt de nature à empirer ces difficultés. Bien plus encore, la création du BIP aura pour résultat un nouvel accroissement de la circulation de transit, dont le passage de nombreux poids lourds que l'on constate déjà sur la partie Est déjà réalisée. On aura ainsi mis en place une solution pire que le mal. Et l'opposition a beau jeu de constater que, plutôt que d'étudier les alternatives qu'elle présentait dans son programme aux élections municipales (rétablissement de l'avenue Kellerman en 2x2 voies, mise en place d'une application sur smartphone signalant des itinéraires alternatifs), le maire choisit la solution de facilité : proposer une autre nuisance et en faire "profiter" l'ensemble des communes concernées par le projet.
Monsieur le Maire a aussi donné la pleine mesure de son côté manipulateur : à la motion présentée par l'opposition, il en substitue une tout à fait différente qu'il ose qualifier d'amendement. Un extrait de cette motion annonce clairement la couleur : "Le conseil municipal de la ville de Soisy-sous-Montmorency rappelle que notre commune ne saurait se satisfaire d'un abandon pur et simple du projet de déviation sur la ville de Montmorency" (on croyait pourtant qu'il n'y avait pas de projet !). Ainsi le stratagème politique de "l'amendement" justifie qu'il passe outre aux demandes de vote de l'opposition pour faire voter sa propre motion et enterrer celle de l'opposition. Mais, à en juger par son palmarès judiciaire déjà chargé (condamnation pour favoritisme de marchés publics, puis pour indemnités illégalement versées), ce maire, qui refuse toute transparence concernant les affaires de la commune et ne craint pas de mentir comme il respire, n'en est plus à une malhonnêteté près.