Le constat
Déjà commençons par le constat. La Primaire populaire est un succès. Christiane Taubira sort gagnante avec 18.01% de Bien et 49.41% de Très bien ce qui fait 67% de Bien au minimum. Trouver une personnalité avec autant de plébiscite n'est pas évident. Cependant, Christiane Taubira n'a pas été élue sur un programme en vérité. Il apparait évident que son entrée en scène dans cette primaire et sa candidature à la présidentielle sont le fait du plébiscite pour sa personne en termes de parrainage alors qu'elle n'avait aucun programme. Christiane Taubira est donc une "figure" apprécié par les Français de gauche.
Le socle commun étant une condition de la primaire populaire, nous pouvons acter qu'il s'agisse d'une partie du programme de tous les candidats soumis au vote et donc plébiscité par les plus de 460 000 inscrits. Christiane Taubira a été élue sur sa personnalité et c'est bien uniquement sur ce point qu'il faut lire son résultat personnel. Pour rassembler, Christiane Taubira ne doit donc pas imposer ou ajouter un programme. Je préconiserais ceci dit une mesure pour des raisons d'efficacité plus loin.
Le choix du programme : un choix stratégique de rassemblement
Sans programme "déterminant" associé à sa candidature, elle dispose donc d'un moyen de rassembler par le programme. Et le programme, c'est le premier Ministre aujourd'hui (qui obéit actuellement souvent au Président). Les deux choix suivants dans le classement de la primaire populaire sont Yannick Jadot et Jean Luc Mélenchon. Deux personnalités dont les programmes, à l'inverse de Taubira, font l'objectif de la candidature et ont été partagé. Celui de Jadot a été choisi via la primaire écologique et celui de Mélenchon a été plébiscité et travaillé par les insoumis. Le bon résultat de Jadot s'explique aussi par le caractère "bobo" de la primaire populaire reproché par certains, qui fait que les électeurs sensibles au charisme de Taubira, sont, en tout état de cause, sensibles au profil de Jadot qui est victime des mêmes préjugés. Ainsi, même si les résultats compilés ne permettent pas de le montrer, une grande partie des personnes appréciant Christiane Taubira ont certainement apprécié Yannick Jadot. Ce qui n'est probablement pas le cas pour Jean Luc Mélenchon.
EELV : La partie "facile"
La proximité avec Yannick Jadot permet probablement de simplifier le rassemblement avec ce dernier. Représentant l'écologie, domaine très important également du programme l'Avenir en Commun défendu par Jean Luc Mélenchon, c'est donc un point essentiel à noter. Christiane Taubira doit être une candidature écologiste. D'ailleurs, en parlant rassemblement, EELV a bien précisé qu'il y aurait une candidature écologiste, ce qui ne signifie pas, au mot, un candidat EELV. Une candidature reprenant le programme défendu par Yannick Jadot serait donc, à priori, une candidature écologique. Yannick Jadot peut alors devenir Ministre de l'environnement.
La partie Insoumise : Des garanties et un peu de remise en question
Pour intégrer Jean Luc Mélenchon, il faut forcément reprendre son programme en très grande partie car c'est le fer de lance des Insoumis, vantant leur programme pour défendre leur candidat. Ce qui n'est pas tant un problème car le programme est relativement bon, audacieux et de gauche. Le problème de la candidature insoumise réside dans le personnage de Jean Luc Mélenchon et le manque de confiance qui lui est accordé pour être en mesure de dialoguer diplomatiquement avec d'autres chefs d'état sans s'emporter. C'est son caractère. Et on ne change plus quelqu'un à 60 ans (ni à 40). Par contre, le rôle de premier ministre est un rôle national qui peut être arbitré et modéré par la présidente, l'assemblée ou par le conseil des ministres. Il n'y a donc pas trop de risque à donner un ticket à Jean Luc Mélenchon pour être premier ministre et appliquer son programme (dans la mesure où l'assemblée y est favorable, sans 49.3).
La composante citoyenne : incluse naturellement pas le concept même de primaire populaire
Je parlerais immédiatement de la composante "citoyenne". Encore une fois les résultats compilés de la primaire populaire ne permettent pas de le certifier, mais il serait intéressant de voir le résultat des autres candidats "politiques" chez les électeurs ayant plébiscité les mentions citoyennes. Car même si les candidatures de Charlotte Marchandise et Anna Agueb Porterie arrivent en dernière, elles ont tout de même reçu un nombre non négligeable de mentions favorables. La dimension citoyenne est la plus simple à rassembler, dès l'instant où elle est respectée.
Séduire par la promesse d'une nouveau monde dont ils organisent la conception
Les 3 composantes LFI - EELV - Citoyen tendent à vouloir un autre monde même si EELV est plus 'flou' sur ce point. Ainsi, une garantie qui peut être offerte est la suivante :
- Confier à Jean Luc Mélenchon et son équipe l'organisation d'une assemblée constituante selon les termes de son programme
- Confier aux candidates citoyennes l'organisation d'une Convention Citoyenne pour une nouvelle constitution
- Confier à Yannick Jadot et son équipe, la mise en place d'un comité de rédaction d'une nouvelle constitution formé de personnes choisies par les partenaires du rassemblement.
Puis soumettre au référendum au jugement majoritaire les projets issus de ces 3 institutions, en plus de celle actuelle. Cette méthode, en plus d'assurer un renouveau démocratique, permet à chacune des composantes de construire le modèle du futur.
Le parti socialiste : le sacrifice au profit du rassemblement
Pour le cas du Parti Socialiste et Anne Hidalgo, l'équation est plus compliquée. Il y a un rejet complet du Parti Socialiste, lié à la trahison de François Hollande et la fuite des socialistes vers Macron. Il devient évident que le parti socialiste est un handicap pour rassembler la gauche. L'image de Taubira associée au mandat de Hollande est en outre un des points qui à nuit à son résultat chez les soutiens de Mélenchon ayant voté à la primaire populaire. Il faut donc être en rupture avec ce Parti Socialiste pour faire vivre la gauche. La simplicité voudrait de croire qu'il est plus facile de se rassembler avec le Parti Socialiste, mais en vérité il faut absolument faire la démarche inverse. Il est compliqué d'intégrer Anne Hidalgo dans le processus même si nous pouvons penser que les personnes ayant plébiscité Hidalgo ont également plébiscité Taubira ou Jadot. Alors que faire du parti socialiste ? Je crois que c'est au parti socialiste de faire amende honorable en se mettant en retrait. En décidant de renoncer à cette élection, sans demander aucune contrepartie. Et bien sûr en proclamant haut et fort leur responsabilité d'avoir mis François Hollande au pouvoir sans avoir su mener les réformes démocratiques et écologiques nécessaires. Seul un Mea Culpa et un geste de mise en retrait temporaire pourrait excuser la faute "Hollande". Ensuite, aux législatives, il peut être acceptable de leur "réserver" des circonscriptions ancrées à droite (oui oui à droite) simplement pour réaliser le score de 1% dans 50 circonscriptions et obtenir un financement public. Il est préférable de ne rien garantir à ce stade. Ainsi, pour le parti socialiste, le rassemblement signifie l'effacement pour défendre les idées de gauche. En seront-ils capables ?
Pour le cas de Pierre Larrouturou, son désir de s'impliquer, son engagement à défendre la primaire populaire est à son honneur et je suis certain qu'ensemble, ils trouveront la place qui convient dans l'équipe. J'avoue que je le verrais bien en ministre du travail pour défendre sa proposition de la semaine de 4 jours mais la position de 4ème est toujours moins importante.
Gérer les divergences
Enfin, reste les divergences. Pour les régler, il y a une méthode. D'une part la mise en place du référendum multichoix au jugement majoritaire. Cette proposition, en plus des différentes institutions de rédaction constitutionnelle évoqué plus haut, est la seule qui pourrait être adossé à la candidature de Christiane Taubira, afin de permet de gérer les divergences démocratiquement.
L'idée est que, en cas de victoire, bien que les programmes de l'Avenir en Commun et des écologistes ont certainement des points communs, ils ont aussi des divergences. Si ces divergences ne se règlent pas à l'assemblée, c'est à dire qu'une proposition d'un des programmes est refusée, alors le président s'engage à mettre, à la demande du partenaire (LFI ou EELV), la proposition au vote par référendum. L'idée est de regrouper un ensemble de propositions tous les 6 mois.
Ainsi LFI et EELV disposent ensemble du pouvoir exécutif. Les législatives accordent des places pour LFI, EELV mais aussi un troisième groupe constitué par Les Citoyens, Nouvelle Donne, le PCF, le NPA voir d'autres membres (Jean Lasalle ?) afin que le troisième groupe puissent être juge de paix/arbitre.
Rassembler les partis ou les électeurs des partis ?
Ainsi, en proposant une femme plébiscitée pour son image, un programme plébiscité par les 2 acteurs majeurs à gauche (hors parti socialiste) et compatible dans les grandes lignes sur l'urgence écologique, la garantie pour les trois composantes de pouvoir mener à bien leur réflexion constitutionnelle et de disposer d'une tribune médiatique privilégiée, il devient possible de provoquer le rassemblement.
Ainsi, la méthode serait pour résumer :
- choisir Christiane Taubira comme candidate présidentielle, sans programme
- Adosser le programme l'avenir en commun au programme écologiste
- Nommer Jean Luc Mélenchon 1er Ministre et Yannick Jadot Ministre de l'environnement
- Ajouter un processus constituant à trois composantes, chacune organisée par l'un des trois pôles du rassemblement.
- Ajouter l'outil de référendum au jugement majoritaire
- Mettre en place un contrat de répartition des candidatures aux législatives
- Mettre le programme au vote à l'assemblée
- Donner la possibilité aux partenaires de mettre au vote les propositions refusées à l'assemblée au cours d'un référendum au jugement majoritaire
Il n'est en vérité pas nécessaire que les partis acceptent avant l'élection comme il n'est pas forcé que les propositions d'un programme soient mises en place avant la victoire. Il est possible de présenter la candidature tel quel, liberté ensuite à chacune de rejoindre ou non. Il sera assez cocasse de voir certaines personnes vanter les mérites du programme et finalement refuser de se prononcer en faveur d'une personne qui propose aussi de le mettre en place, qui plus est de manière plus démocratique. La primaire populaire proposait déjà de mettre les noms de personne refusant de participer au vote, la solution ultime est de proposer une candidature de rassemblement sans que les concernés ne la rejoigne. Mais cela risque de les desservir.