C'est l’historien Luciano Canfora qui m’en parla le premier, en me recommandant l’édition française qu’il avait faite de sa Fabuleuse histoire du faux papyrus d’Artémidore dans la collection qu’il dirige aux éditions Anacharsis. Le travail était de fait particulièrement soigné : le livre offre au lecteur une refonte, admirable de clarté, de tous les écrits de Canfora (trois livres et près d’une dizaine d’articles) sur cette affaire aussi complexe que rocambolesque, où se donnent rendez-vous deux maux de notre temps, la marchandisation de la culture et la dégradation de la recherche, assortie d’une bibliographie exhaustive et d'une postface remarquable du critique d’art Olivier Cena.
Cette collection est la seule en France à proposer au grand public des livres de philologie. Qui donc, pensais-je, sinon un esprit intègre, passionné et vaillant, a pu convaincre un éditeur de fonder une collection où paraîtraient, sous le titre L’Art de lire, une réédition des articles d’Henri Weil (1818-1909) ; une édition d’un des plus anciens papyrus grecs, comprenant un long fragment d’une tragédie perdue, les Perses de Timothée de Milet ; une traduction admirable (par ses soins) d’un des chefs d’œuvre de la philologie et, plus généralement, de la pensée européenne : je veux parler de la Critique textuelle (Textkritik) de Paul Maas, qu’il publie hardiment sous ce titre : Les Dessous de la littérature grecque. Qui donc pouvait être cet homme qui publiait encore un essai-roman borgésien de Sophie Rabau, L’Art d’assaisonner les textes, consacré tout entier à la question de l’interpolation ?
Je tentai de m’informer. Je trouvais un très bel entretien radiophonique avec Antoine Perraud (« Henri Weil retrouvé »), et un article que j’invite chacun-e à lire : « La philologie classique et l’apprentissage de la lecture intelligente ». Mais c’était à peu près tout. Je voyais encore que Laurent Calvié était « docteur en littératures anciennes », et préparait une édition critique des Écrits sur le rythme d’Aristoxène de Tarente, ce qui ne me disait pas grand-chose ; qu’il enseignait le français et les langues anciennes au collège (où je me figurais aussitôt qu’il devait être chéri par sa hiérarchie, on verra dans cet entretien qu’il n’en est rien), ce qui aujourd'hui n’est pas aussi étonnant qu’on pourrait le penser : car le manque de postes dans la recherche et l’enseignement supérieur est tel qu’on voit bien des docteur-e-s obligé-e-s d’enseigner dans le secondaire, voire de changer complètement de profession. Et ce sont hélas souvent les meilleur-e-s. Mais ce qui m’étonnait encore, c’est, dans un temps où tout le monde est invité à se vendre comme une marchandise appétissante[1], cette discrétion à peu près totale dont il s’entoure, quand il pourrait facilement faire parler de lui.
Plus d’une fois il m’est arrivé de vouloir lui écrire, mais je craignais trop de le déranger dans ses activités secrètes. Ce qui m’a fait surmonter mes scrupules, c'est la recherche de la vérité, pour laquelle ceux qui en sont véritablement épris perdent toujours de toute façon toute pudeur. Je menais une enquête sur un événement fondamental de la vie de Paul Maas, sa mise à la retraite forcée en tant que « non-aryen », au titre de la loi raciste du 7 avril 1933 dite de « restauration de la fonction publique » (Gesetz zur Wiederherstellung des Berufsbeamtentums), et je savais ne pas pouvoir trouver de meilleur connaisseur que Laurent Calvié. Je le contactai donc, et ce fut le début d’une correspondance nourrie.
Je crois qu’au-delà du plaisir qu’on prendra à lire ses réponses, il est d’intérêt public de savoir qu’un tel homme existe en France, et de savoir que ce professeur, pour lequel l’État ne devrait avoir que reconnaissance, est menacé par lui d’être laissé sans ressources autres que le RSA, tout simplement parce qu’il n’a pas voulu se plier aux consignes toujours plus absurdes qu’on impose aux enseignants.
Je fais suivre l’entretien d’une bibliographie de ses travaux, afin qu’on puisse se faire une idée exacte de leur ampleur.
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Est-ce que vous pourriez-vous présenter en quelques mots au public ? D’où vient votre passion pour la philologie ? Comment en êtes-vous venu à diriger la seule (à ma connaissance) collection de philologie destinée au grand public et non exclusivement à un public scientifique ?
Je suis professeur certifié de Lettres Classiques, docteur en Littératures anciennes et directeur, depuis 2009, de la collection « Essais-Philologie » aux Éditions Anacharsis (Marseille-Toulouse), dont je suis également le plus ancien collaborateur. Depuis plus de trente ans, mon activité s’est déployée dans quatre directions : (1) le militantisme socio-politique (anarcho-syndicalisme), (2) l’enseignement (collèges, lycées, grandes écoles, universités, académies, MJC), (3) la recherche (philologie grecque et histoire de la philologie) et (4) l’édition (Anacharsis et Éditions de la Nuit).
Je suis né à Aix-en-Provence en 1969, dans une maison pleine de livres, où le langage (le λόγος) occupait une place centrale. Athées, anticléricaux et acquis aux idées socialistes du 19e siècle, mes deux parents, mes quatre grands-parents et deux de mes arrière grands-parents étaient enseignants, et ils étaient pleinement conscients qu’ils devaient à l’étude du langage et des lettres d’avoir échappé aux pénibles travaux des champs et de l’usine. J’ai ainsi compris très tôt que l’étude des langues et des lettres était une affaire politique.
Si l’origine sociale de mes parents était à peu près la même (petits paysans, artisans et ouvriers), ils n’étaient pas originaires des mêmes pays et n’usaient pas exactement de la même langue : mon père était un homme du midi (haute vallée de l’Hérault), dont les grands-parents parlaient la langue d’oc, tandis que ma mère était à demi bretonne (Trégor) et à demi morvandelle (Clamecy) : mon grand-père maternel n’avait ainsi connu que le breton jusqu’à l’âge de sept ans ; et ma mère émaillait la langue de Colette (Puisaye) qu’elle parlait à merveille de quelques bretonnismes trégorois et autres idiotismes laripois, c’est-à-dire de manières de parler propres au hameau morvandiau de quinze habitants où elle avait grandi chez ses grands-parents et où j’ai la chance de vivre depuis quelques années (La Ripe, du latin ripa, ae : « la rive » [de l’Yonne]). Comme ils étaient tous les deux linguistes (ma mère enseignait le russe et mon père l’allemand), notre foyer était une sorte d’atelier philologique permanent, où l’on ne s’entendait même pas sur l’emploi du vocabulaire usuel, et où les discussions appelaient systématiquement la consultation des textes (les sources).
Mes parents avaient fait leurs études à une époque (les années 50) où le latin était partie intégrante du cursus littéraire et où l’on apprenait les langues par les textes, si bien qu’ils étaient à la fois linguistes et philologues : ma mère, qui était ainsi latiniste, angliciste et russisante, était spécialiste de Tchékhov et a donné quelques traductions de révolutionnaires russes sous différents pseudonymes ; mon père, qui avait mal appris le grec ancien, mais savait très bien le latin, la langue d’oc, l’italien, le catalan, le castillan et les dialectes allemands de toutes les époques, a donné la première édition des Discours et écrits politiques de Louis Uhland, a traduit Rosa Luxemburg, Karl Jungklas, Bertolt Brecht, Léon Trotsky et Georg Christoph Lichtenberg et a laissé à sa mort d’importants ouvrages inédits sur la théorie de la traduction et son histoire. Dans les années 90, à l’Université de Provence, il a même gracieusement donné un cours d’Allemand philologique ouvert à tous, où on lisait des articles de la Realencyclopädie de Pauly-Wissowa (1890-1980).
Ma passion pour l’Antiquité classique remonte, je crois, à l’état d’extase dans lequel m’a plongé, à la Toussaint 1978, à Florence, la contemplation de la Vénus de Sandro Boticelli, qui est la première femme que j’ai vue nue de ma vie : il paraît qu’en entrant dans la salle degli Uffizi où elle se trouvait, j’ai perdu l’usage de la parole et la faculté de me mouvoir pendant un long moment, et que, les yeux grand ouverts, j’ai alors serré très fort la main de mon père... Depuis cet instant, j’ai toujours voulu apprendre le latin et le grec, comme les hommes de la Renaissance. Fondé sur mon amour de la vie et de la réalité sensible, mon goût pour les langues et la littérature gréco-latines n’a donc jamais été bien distinct de mon intérêt pour ce que les modernes en ont fait par la suite.
Mon engouement pour la philologie classique, qui résulte de mes amours anciennes pour les langues, la grammaire, les livres, l’Antiquité classique, la Renaissance et l’histoire de la musique, remonte à la découverte que j’ai faite, en 1982, de l’excellente rubrique « L’apprenti-philologue » du Cours de langue grecque (Paris, 1976) d’Alain Frontier et à ma lecture, en 1986, de la deuxième édition du Manuel de philologie classique (1883) de Salomon Reinach (un cadeau de mon père). C’est là que j’ai appris que « la philologie embrasse l’étude de toutes les manifestations de l’esprit humain dans l’espace et dans le temps » et que j’ai rencontré pour la première fois les mots magiques de bibliographie de la bibliographie, épigraphie, papyrologie, paléographie, critique des textes, grammaire comparée, métrique et rythmique, etc. Ma ferveur philologique a ensuite été fortifiée par les cours de Jean-Victor-Vernhes (grammaire historique et comparée), les deux inventaires que j’ai faits de la Bibliothèque d’Antiquité de l’Université de Provence (bibliographie) et les séminaires de Didier Pralon (herméneutique critique) et de Gilles Dorival (paléographie, histoire et critique des textes).
La fondation des Éditions Anacharsis (2000) a été avant tout un acte politique. Elles devaient en effet faire entendre une autre voix que celle de l’idéologie dominante, en s’inscrivant dans la tradition éditoriale, héritée de l’Encyclopédie, d’une éducation populaire de qualité et de tendance libertaire (Pierre Larousse, Éditions de Minuit, François Maspero, Jean-Jacques Pauvert, etc.). Le projet était clairement d’abolir les frontières entre l’Est et l’Ouest, le Nord et le Sud, le passé et le présent, la littérature et les documents, l’essai et la fiction, la connaissance et le loisir, la culture et l’érudition. Les fondateurs de cette maison d’édition tout d’abord associative étaient tous titulaires d’un DEA (en Histoire, en Philosophie ou en Études grecques), mais aucun d’entre nous n’appréciait particulièment le decorum et la cuistrerie universitaires : notre souci de la vérité historique ne nous empêchait pas d’aimer la rue, les troquets, l’alcool, les clopes, le rock, le sexe, la bande dessinée, les romans d’aventure, les polars, les films de pirates et les westerns. Nos six premiers livres sont sortis en 2002, dans la collection nommé depuis « Famagouste ». Deux étaient de moi : La Boucle de Bérénice. Un poème de Catulle et Le Cymbalum mundi de Bonaventure des Périers.
J’ai rédigé le premier, qui est un essai de philologie classique en même temps qu’un texte littéraire, à partir d’un cours de Licence que j’avais donné en 2000-2001 aux étudiants de Lettres Classiques de l’Université de Saint-Étienne ; et j’ai respecté la consigne que nous nous étions fixée de réduire autant que possible le nombre de notes en bas de page : le livre n’en présente ainsi aucune, les 189 notes originelles ayant été synthétisée dans une unique « Note critique » imprimée en petits caractères en fin de volume (p. 94-96). Le second, qui est un ouvrage de philologie moderne, a une visée plus nettement politique, car il contient une adaptation en français contemporain du Cymbalum mundi (1537) qui permet au grand public de lire enfin cette « Bible de l’athéisme ». Là encore, le texte lui-même ne présente aucune note de bas de page, mais il est accompagné d’un riche appareil critique.
Mon Cyrano dans tous ses états, paru en 2004 dans la collection « Famagouste » et réédité en poche (« Griffe – Essais ») en 2019 (sous le titre de Cyrano avant Rostand. Mythe, thème et variations), est encore un ouvrage de vulgarisation, qui donne à lire les sources du mythe moderne de Cyrano de Bergerac : les méthodes de la philologie la plus scrupuleuse, enrobée dans une prose littéraire, y sont mises au service de l’illustration d’une figure de la culture populaire. Quant à mon Fontan Crusoé. Aventures d’un déclassé racontées par lui-même (2009), c’est l’édition critique d’une nouvelle méconnue de Jules Vallès sur le coup d’État de Louis-Napoléon de Bonaparte, dont la réédition et la préface constituaient clairement un appel à l’insurrection populaire contre la politique du Nabot-Léon-le-Tout-Petit qui venait d’être élu président de la République en 2007.
C’est pour accueillir les ouvrages que proposait Alban Bensa (1948-2021), qui a rejoint les Éditions Anacharsis en 2004 et s’y est beaucoup investi dans les années suivantes, qu’a été créée en 2006 notre première collection d’essais (« Essais – Anthropologie »), qui a été suivie par la série « Essais – Histoire » en 2009. La même année, comme j’étais entre-temps devenu docteur en littératures anciennes (2007) et que j’avais été qualifié par le CNU pour les fonctions de maître de conférence (2008), Frantz Olivié m’a confié la direction de la collection « Essai – Philologie ». J’ai ainsi pu concentrer mon travail éditorial sur le domaine de la philologie classique et sur la poésie grecque en particulier. Mais, au détail près que je pouvais désormais faire imprimer autant de notes de bas de page, d’appareils et d’apparats critiques que je le souhaitais, mon projet éditorial est demeuré inchangé dans son orientation clairement politique : mettre la philologie au service de l’éducation populaire, en attendant de pouvoir la mettre au service de la Révolution !
Comment définiriez-vous la philologie ? Que représente-t-elle pour vous ? En quoi est-il important selon vous de la faire connaître au public le plus large ?
Le terme de philologie est de ceux qui a été pris dans les acceptions les plus diverses : il a par exemple été employé pour désigner l’étude des lettres, l’enseignement des humanités, l’érudition encyclopédique, la connaissance de ce qui est déjà connu, les sciences de l’Antiquité, l’art de lire (« lente lecture »), la linguistique (historique et comparative), l’étude rationnelle des documents historiques (critique des sources), l’ensemble des sciences auxiliaires de l’histoire (codicologie, paléographie, bibliographie, etc.), une méthode pédagogique, l’ecdotique critique, la critique historique des textes littéraires et l’herméneutique critique (une méthode de lecture).
Pour peu qu’on élimine les acceptions clairement atrophiques (linguistique, critique des sources, méthode pédagogique, ecdotique critique, critique historique des textes littéraires et herméneutique critique) et hypertrophiques (enseignement des humanités, érudition encyclopédique, connaissance du déjà connu, sciences de l’Antiquité et ensemble des sciences auxiliaires de l’histoire) du terme, on ne peut guère définir la philologie autrement que comme un art de lire, mais un « art de lente lecture » qui, considérant les textes comme des objets historiques, en contrôle l’authenticité, en vérifie la lettre et en limite l’interprétation en recourant à une foule de disciplines plus ou moins scientifiques, comme la grammaire historique, la lexicographie, la parémiographie, la métrique, l’épigraphie, la papyrologie, la codicologie, la paléographie, la bibliographie matérielle, l’Histoire, l’histoire du livre, de la littérature, de la philosophie, des textes, des sciences, etc. Tel est ce qui distingue la lecture philologique des lectures historiques, sociologiques, biographiques, psychanalytiques, structuralistes ou déconstructionnistes qu’on peut faire des mêmes textes. Autrement dit, la lecture philologique fait du lecteur un éditeur virtuel du texte lu.
De toute évidence, la philologie n’est ni une science, ni une méthode, car il n’existe pas de lecture parfaite d’un texte (même pour une époque donnée) et encore moins de système de procédures permettant d’aboutir à une telle lecture. C’est au philologue d’inventer, pour chaque texte, la méthode qui va lui permettre d’en donner la lecture la plus féconde possible ; et l’élaboration de cette méthode, qui est certes suggérée par le texte à lire ou à éditer, dépendra de sa sensibilité propre, de ses lectures personnelles, de ses connaissances singulières, de ses compétences scientifiques particulières et de la sûreté de son jugement, c’est-à-dire de son génie. Une édition de Jean Schweighäuser (1742-1830), par exemple, vaut avant tout par l’étude que ce philologue fait de ses sources manuscrites et imprimées, tandis qu’un texte établi par Gotfried Hermann (1772-1848) brille plutôt par la fulgurance divinatoire de ses corrections. Mais la philologie est un art difficile et le génie y est rare.
Il faudrait également préciser ce qu’on entend par lecture. Dans les instructions officielles et les manuels scolaires qui dispensent depuis trop longtemps l’« opium pédagogique » à la mode, on parle beaucoup de lecture de l’image, alors même que les arts plastiques échappent manifestement à l’étude philologique : c’est là un abus de langage. Il existe en revanche une philologie musicale, qui a été brillamment promue en France par Jacques Chailley (1910-1999), car une musique s’écrit, se copie, s’imprime, se lit et s’interprète comme un texte, même si elle n’est pas faite de mots : c’est à cette philologie particulière que l’on doit l’exhumation de la musique dite baroque et l’activité commerciale qu’elle a suscitée. Dans notre langue, un film se regarde, mais je crois que le regard qu’on porte sur un écran de cinéma est beaucoup plus proche de celui d’un lecteur de livres que de celui de l’observateur d’une toile peinte. À cet égard, il est tout à fait regrettable que n’ait pas encore été fondée une philologie cinématographique, à l’heure où l’industrie multiplie les copies de films, qui vont de versions doublées ou tronquées (éditions populaires) à d’ambitieuses restaurations fondées sur la recension, le classement et la comparaison des copies conservées (éditions critiques). La création d’une philologie cinématographique rendrait à coup sûr de grands services à l’histoire et à la critique du septième art.
« La philologie, écrivait jadis l’historien catholique Henri-Irénée Marrou, ça rend les gens intelligents ». C’est pour moi un très puissant remède contre la bêtise et donc une inépuisable source de joie.
Il est capital de faire connaître la philologie au plus large public possible, car la lecture philologique est éminemment émancipatrice et subversive : elle suppose un examen critique de l’histoire de l’établissement et de l’interprétation des textes lus, c’est-à-dire une critique de la tradition qui débouche ordinairement sur une lecture nouvelle, sur une compréhension inédite des œuvres du passé. La lecture philologique n’est pas seulement la lecture d’un texte, c’est aussi celle des traces qu’y ont laissées les lectures précédentes : il appartient au philologue de les repérer et, le cas échéant, d’en débarrasser le texte pour en libérer le lecteur et lui permettre de donner libre cours à une interprétation plus juste et plus fructueuse.
Que répondriez-vous à ceux qui disent que le latin et le grec sont des matières élitistes ?
Je n’emploie pas le mot élitiste, qui n’est d’ailleurs pas dans le TLF ; je ne sais, à vrai dire, pas bien ce qu’il signifie et dois, sur ce point, m’en remettre au Petit Robert, où je lis qu’il veut dire « qui favorise l’élite (sans se soucier du niveau moyen) ». Ce qui est amusant, c’est qu’il ne figure pas non plus dans le Littré (1872), alors que ce dictionnaire date d’une époque où il existait une aristocratie réelle et où le système éducatif était assurément élitiste, puisqu’il visait précisément à instruire l’élite de la nation. Quant à ceux qui forment aujourd’hui les élites, il y a beau temps qu’ils ne sont plus frottés de grec et de latin : il paraît qu’ils fréquentent les festivals et les boîtes de nuit huppées, raffolent de la cocaïne, jouent à des jeux vidéos et s’intéressent au sport…
L’apprentissage du latin et du grec nécessite certes de l’intelligence, de la mémoire, de la rigueur et de la patience, mais ni plus ni moins, par exemple, que celui de la philosophie, des mathématiques, de l’histoire, du français, des autres langues vivantes, du dessin, de la musique, de la médecine, de la pâtisserie ou de l’ébénisterie. Rien n’y est inaccessible à une intelligence moyenne, si celle-ci n’a pas été au préalable endormie par des années d’« opium pédagogique » distillé dans les officines scholastiques de notre système éducatif, ce qui est malheureusement le cas aujourd’hui ; et si l’enseignement en est assuré par des maîtres compétents en ces matières, ce qui n’est plus le cas depuis fort longtemps. Autrement dit, le problème n’est pas tant que le grec et le latin soient ou non des « matières élitistes », mais qu’après cinquante années de politique prétendument anti-élitiste, les établissements publics d’éducation ne permettent plus à personne d’apprendre véritablement ces langues anciennes.
Or la connaissance du latin et du grec donne accès non seulement aux textes de l’Antiquité gréco-romaine, mais aussi à la littérature savante du Moyen-âge et de l’époque moderne : les textes écrits dans ces langues anciennes s’échelonnent sur près de 4000 ans, des plus anciennes inscriptions en linéaire B de l’époque mycénienne jusqu’à l’Index librorum prohibitorum (1887) de Léon XIII, où ce pape interdit aussi bien la lecture de Rabelais, du Cymbalum mundi et de l’Encyclopédie que celle d’Alphonse de Lamartine, de Stendhal, de Victor Hugo ou de Gustave Flaubert ; ils sont l’œuvre d’Occidentaux (Européens et Africains) comme d’Orientaux (Égyptiens, Byzantins, Syriens, etc.) ; et ils constituent les textes fondateurs des domaines les plus variés des sciences (grammaire, rhétorique, logique, mathématiques, astronomie, musique, médecine, tactique, etc.) et des genres les plus divers de la littérature (poésie, histoire, philosophie, éloquence, lettres, romans, etc.).
Ce « qui favorise l’élite », ce n’est donc pas l’enseignement des langues anciennes au plus grand nombre dans les établissements d’instruction publique, mais bien plutôt la politique qui consiste, depuis une cinquantaine d’années en France, à en interdire l’apprentissage au peuple et à en réserver la connaissance à quelques « experts », c’est-à-dire à une caste choisie de « chiens de garde du régime » : comme le disait mon père, « ce qui est bon pour les maîtres ne peut pas être mauvais pour les esclaves » !
Comment expliqueriez-vous à un non-initié les liens qui existent entre philologie et liberté ?
Votre question porte, si je ne me trompe, sur la signification de la formule que je fais imprimer sous mon nom, depuis 2014, à la fin des préfaces de chacun des livres de la collection « Essais — Philologie » : « Philologie et liberté ». Elle remplace avantageusement la devise « Loisir et liberté » que j’utilisais précédemment et qui était celle de Bonaventure des Périers : si ces deux formules sont absolument équivalentes, car le loisir (σχολή ou otium) est à l’origine le temps dévolu à l’étude des humanités, c’est-à-dire à la philologie, « Philologie et liberté » présente l’avantage d’être plus explicite et d’exclure toute interprétation consumériste, alors que la devise « Loisir et liberté » pourrait être détournée et employée comme slogan publicitaire par une agence de voyages…
En 2002, les Éditions Champion ont réédité l’ouvrage de Jean Jehasse sur La renaissance de la critique. L’essor de l’Humanisme érudit de 1560 à 1614 (1976). Sa lecture m’a déçu, mais m’a donné l’idée de rédiger un essai intitulé Critica. De la critique philologique à la critique philosophique, où je voulais montrer ce que les Lumières devaient aux philologues de la Renaissance, c’est-à-dire ce que la pensée libre devait à la philologie ; car, en Europe, l’esprit critique et la liberté de pensée ont assurément été les fruits les plus juteux de la renaissance de la critique des textes et de la philologie.
J’ai cependant dû renoncer à la rédaction de cet essai en 2008, après la lecture du Filologia e libertà de Luciano Canfora (Milano, Mondadori, 2008), qui a récemment été traduit en français (Philologie et liberté. La plus subversive des disciplines, l’indépendance de pensée et le droit à la vérité, Paris, Éditions Delga, coll. « Monde antique » [5], 2020) : c’est un manifeste en faveur de la philologie (contre « l’opium pédagogique »), qui montre en particulier le rôle qu’a joué la critique philologique dans la remise en question du texte biblique et des dogmes catholiques. La vie est brève et je n’ai guère le temps d’en perdre à enfoncer des portes ouvertes, d’autant qu’a depuis paru le Philologie und Freiheit de Sheldon Pollock (Berlin, Matthes & Seitz, coll. « Fröhliche Wissenschaft » [80], 2016), qui rappelle entre autres comment le philologue Lorenzo Valla (1407-1457) a démontré la fausseté du document qui servait de fondement au pouvoir temporel du pape (la Donation de Constantin) et qui explique que le Tractatus Theologico-politicus de Baruch Spinoza aurait mérité le titre de Tractatus Philologico-politicus. Je m’en suis donc finalement tenu à faire de « Philologie et liberté » la devise de la collection « Essais – Philologie ».
Je reviens à votre question. L’historien, qu’il s’occupe d’histoire politique ou d’histoire de la culture, de la littérature, de la philosophie ou des sciences, travaille sur des sources textuelles, éditées ou inédites, dont l’étude relève de la philologie. S’il n’est pas lui-même philologue, il doit donc se fier à l’autorité des philologues et l’interprétation qu’il donnera de ces documents sera nécessairement conditionnée par celle qui aura préalablement présidé à leur édition par ces spécialistes des textes. Le philologue n’a en revanche à reconnaître aucune autorité que ce soit – pas même celle des sources, car c’est à lui qu’il appartient d’établir si ces dernières sont, ou non, authentiques et fiables. Affranchie de toute autorité (sinon celle du bon sens), sa pratique peut véritablement être qualifiée de libre et elle peut libérer l’interprétation, émanciper le lecteur et, suivant le texte auquel elle s’applique (la Bible, par exemple, ou un Corpus juridique), libérer une société entière.
Je vous ai entendu dans une émission déclarer, si ma mémoire ne me trompe pas, que les « deux plus grands hellénistes français » étaient Henri Estienne et Henri Weil (avec cette réserve, comme vous le rappeliez, qu’Henri Weil est allemand de naissance). Qu’est-ce qui fait la grandeur d’un helléniste et, plus généralement, d’un philologue ?
D’ordinaire, je ne me hasarde guère à employer ce genre d’expressions, mais je l’ai fait en 2014, dans une émission de radio : le philologue n’est pas toujours libre, en particulier quand il est confronté aux médias ! Ce n’était toutefois pour moi qu’une manière d’opposer deux savants de premier ordre au modeste professeur de grec dont le journaliste Antoine Perraud souhaitait que je fasse le héros d’un de mes prochains livres… Pour ma défense, je ne parlais cependant que des hellénistes français ; mais, cette restriction faite, ce que j’ai dit n’en est pas moins inexact et déplacé, puisque Guillaume Budé (1467-1540), Adrien Turnèbe (1512-1565), Isaac Casaubon (1559-1614), Jean-François Boissonade (1774-1857) ou Pierre Chantraine (1899-1974) n’ont, par exemple, absolument rien à envier, comme philologues ni comme hellénistes, à Henri Estienne (1531-1598) et à Henri Weil (1818-1909).
Un grand philologue n’est évidemment pas nécessairement un grand helléniste, puisqu’on peut être philologue et ne pas s’occuper de littérature grecque ; et, à l’inverse, un grand helléniste n’est pas nécessairement un grand philologue. Jacques Amyot (1513-1593), Nicolas Perrot d’Ablancourt (1606-1664), Anne Lefèvre (1645-1720), son époux André Dacier (1651-1722), Victor Cousin (1792-1867), Jean-Pierre Vernant (1914-2007), Pierre Aubenque (1929-2020) ou Pierre Vidal-Naquet (1930-2006) sont tous de grands hellénistes français, mais ce ne sont pas de grands philologues. Une bonne traduction peut suffire à assurer la réputation d’un helléniste, pas celle d’un philologue.
Il n’est pas très difficile de devenir un spécialiste reconnu d’un auteur grec ; mais un grand helléniste devrait être capable de lire tout aussi bien de l’Homère que du Bessarion (1403-1472) et avoir ainsi étudié l’ensemble des dialectes et des états de langue qu’ont connu tous les genres de la littérature grecque durant vingt-cinq siècles. Mais, pour être un grand philologue, il devrait en outre avoir quelque compétence dans la foule de disciplines linguistiques, historiques et bibliologiques que requiert la lecture philologique – sans oublier l’histoire de la philologie elle-même, sans laquelle la pratique philologique est pour ainsi dire inconsciente. Et tout cela ne servira pour ainsi dire de rien, s’il n’a quelque génie et si ses travaux demeurent sans influence sur ses successeurs, sur les autres disciplines, sur la littérature ou sur la société.
Un ouvrage unique concernant un seul domaine des études philologiques pourrait certes suffire à assurer la réputation d’un philologue, mais, plutôt que le titre de grand philologue, un tel ouvrage vaudrait probablement à son auteur la qualité de grand paléographe, de grand linguiste ou de spécialiste de tel ou tel écrivain ancien. La grandeur philologique me paraît impliquer une pratique étendue et variée : l’édition d’un corpus important en même temps que de textes rares (une édition princeps), quelque découverte ou quelque exposé novateur dans une ou plusieurs des disciplines philologiques. Henri Estienne, qui a édité et imprimé seul l’essentiel de la littérature grecque, a ainsi composé le Thesaurus linguae graecae (1580), qui constitue le fondement de toute la lexicographie grecque postérieure, mais il a aussi collationné pour son père onze manuscrits du Nouveau Testament (1549), découvert les deux prototypes vénitiens de la Bibliothèque de Photios (1552-1553), donné l’édition princeps des Anacreontea (1554), dont la publication a révolutionné la poésie européenne, révélé, à la suite d’une grave dépression, le scepticisme de Sextus Empiricus (1562), publié la vulgate du corpus platonicien (1578), dont la pagination sert encore de référence aujourd’hui, et une dissertation De veteribus criticis (1587) où il a établi la légitimité de la critique des textes. Si l’on ajoute à cela qu’il acheminait lui-même, de nuit et à cheval, les nouveautés sorties de ses propres presses à la Foire de Francfort, et qu’il est mort dément dans un hospice lyonnais, on n’hésitera guère à lui accorder le titre de héros de la philologie.
D’après ce que je lis sur Internet, vous enseignez « depuis 2002 , le français et les langues anciennes au Collège Saint-Exupéry d’Ambérieu-en-Bugey ». Comment se passe votre enseignement ? Y a-t-il des ponts entre cette activité et votre activité d’éditeur ? Par exemple, parlez-vous des philologues à vos élèves ? Est-ce que ça « prend » parmi les élèves ?
Je tiens tout d’abord à préciser que je n’enseigne plus depuis juin 2017, date à laquelle j’ai été mis en Congé Longue Maladie (2017-2020), puis en Congé Longue Durée (2020-2022). Il paraîtrait que je souffre d’une maladie mentale incurable, caractérisée par un désir excessif de liberté et une soif insatiable de vérité : c’est mal, surtout de nos jours ! Si tout se passe comme prévu, je serai au chômage au mois de septembre prochain, libéré de toute obligation vis-à-vis du ministère de l’Éducation Nationale, ce qui me permettra de raconter librement toute l’affaire : en France, il n’y a pas de goulag, mais il existe quand même des prisons, des hôpitaux psychiatriques et des placards !
Je suis entré dans l’Éducation Nationale en 1992, l’année où l’on a imposé aux enseignants du secondaire le formatage des Instituts Universitaires pour la Formation des Maîtres qui était déjà le lot des instituteurs, rebaptisés professeurs des écoles. Dès le jour de la rentrée, en présence de toutes les huiles académiques, j’ai appelé publiquement les autres stagiaires à boycotter cette formation au nom de la liberté pédagogique et à la remplacer par l’application du principe suivant, que j’avais inventé pour l’occasion : soyez les enseignants que vous auriez rêvé d’avoir ! Nous n’avons été que trois à suivre ce mot d’ordre et nous avons tous trois été sanctionnés (redoublement) : pour ma part, il a été inscrit dans mon dossier administratif que j’étais « non seulement inutile, mais nuisible aux élèves », ce qui ne m’a pas empêché d’être titularisé un an plus tard.
Je n’ai jamais respecté les instructions officielles, qui interdisent par exemple au professeur de langues anciennes de donner un texte grec ou latin aux élèves sans l’accompagner d’une traduction en français, et qui transforment ainsi l’enseignement des lettres classiques en une routine scholastique, humanitaire, civique et morale absolument insupportable. Quand je suis devenu docteur, je me suis mis à refuser les inspections, et, durant une dizaine d’années, j’ai vu les inspecteurs successifs annuler leurs visites au fur et à mesure que je les refusais. Mais, depuis la dernière réforme du Collège, la pratique de ces experts en matière éducative a changé : on a surveillé mon agenda électronique professionnel (Pronote), on a diligenté une enquête sur mes pratiques pédagogiques et mes « actes » (corruption de la jeunesse !), on a organisé mon procès dans le cadre d’une séance d’information pédagogique réunissant le principal de mon collège, son adjoint, l’inspectrice et mes collègues de Lettres Modernes, on m’a inspecté en mon absence, on a questionné mes élèves avec virulence (certains ont pleuré), on a fouillé ma salle et même les tiroirs de mon bureau…
Quand j’étais en classe de première, je me suis rendu compte que plusieurs vers licencieux (allusions à des pratiques homosexuelles) avaient été retranchés d’une ode d’Horace dans Les lettres latines de Morisset-Thévenot, sans que cette athétèse soit le moins du monde signalée ! Devenu enseignant, je n’ai donc jamais utilisé ni manuel scolaire ni aucune sorte d’instrument pédagogique prédigéré. J’ai toujours fait travailler mes élèves sur des textes complets, établis, annotés et tapés par mes soins ; et, très souvent, sur des textes dont j’avais moi-même préparé l’édition ou la traduction, que celle-ci ait finalement été ou non imprimée : tous mes élèves de français ont ainsi lu des œuvres de Bonaventure des Périers, Henri Estienne, François de La Mothe le Vayer, Cyrano de Bergerac, Charles le Bovier de Fontenelle, Paul-Louis Courier, Charles Nodier, Claude Tillier, Jules Vallès, Remy de Gourmont ou Guillaume Apollinaire ; et tous mes élèves de latin et de grec ont traduit des textes originaux d’Anacréon, Sophocle, Aristote, Euclide, Denys le Thrace, Catulle, Tite-Live, Lucrèce, César, Cicéron, Horace, Pline, Quintilien, Aristide Quintilien, Martianus Capella, Bessarion ou Huig de Groot [Grotius].
Tous mes anciens élèves de latin et de grec savent ce qu’est la philologie ; tous connaissent des noms de philologues ; tous ont lu la lettre à Nicolas-Claude Fabri de Peiresc où Grotius (Huig de Groot) explique, le 18 avril 1622, que le latin n’est qu’une forme du dialecte éolien de la langue grecque ; tous ont dû se familiariser avec les grandes lois de la phonétique historique des langues classiques ; tous ont eu sous les yeux des apparats critiques et ont appris ce qu’est un supplément, une interpolation, une lacune, une athétèse, une correction et une conjecture ; tous ont été initiés à la métrique gréco-latine ; et aucun n’ignore que le latin n’est pas seulement l’idiome employé par les anciens Romains, mais aussi la langue internationale de l’ancienne République des Lettres et de la philologie classique.
Les élèves adorent l’érudition et tout ce qui leur donne l’impression d’être intelligents. Ils aiment les enquêtes policières et raffolent donc des recherches philologiques, qui prennent généralement la forme de véritables enquêtes indiciaires. Mais ce qu’ils préfèrent, c’est d’être mis en présence de textes originaux (inscriptions, papyrus, manuscrits), dans les conditions réelles où se trouvent les savants : ils reconnaissent alors volontiers leur incompétence et se laissent docilement guider. Quand, à l’âge de cinq ans, ma fille m’a demandé de lui apprendre le grec, je lui ai fabriqué un abécédaire illustré, à l’aide de proverbes grecs de Diogénianos, puis nous avons lu ensemble le traité Des animaux de l’Inde de Timothée de Gaza et l’Évangile de Jean. Nous avons fait cette dernière lecture sur un fac-similé du Papyrus Bodmer 66 que je lui avais offert à Genève : l’expérience a été extrêmement fructueuse ; et nous avons dès lors pris l’habitude de consulter ensemble le texte des anciens manuscrits, qu’elle lit plutôt mieux que moi...
Quand mon cours de langues anciennes a été supprimé au collège, j’ai proposé à la MJC d’Ambérieu d’offrir gratuitement une initiation au grec ancien ; et j’ai décidé d’y appliquer ma nouvelle méthode. Pendant deux ans, cinq enfants et autant d’adultes ont ainsi passé leurs samedis matins à déchiffrer la fameuse Chronique de Paros sur les marbres d’Arundel eux-mêmes et à apprendre ainsi les secrets de la langue grecque au fur et à mesure de ce déchiffrement.
Comment voyez-vous l’état de la philologie aujourd’hui et comment voyez-vous son avenir ?
Aujourd’hui, la philologie a presque disparu de l’Université française : le Centre d’études philologiques de Lille 3, fondé en 1971 par Jean Bollack (1923-2012), n’a plus d’existence propre, même si les Cahiers de philologie paraissent encore ; à l’École Pratique des Hautes-Études, le séminaire de Philologie grecque de Brigitte Mondrain est exclusivement consacré à la codicologie et à la paléographie grecques ; il y a bien aussi une Revue de Philologie, fondée en 1845 et relancée en 1877, mais c’est une Revue de Philologie, de Littérature et d’Histoire anciennes. Dans le même temps, les textes anciens ont cessé d’être lus en grec et en latin dans le secondaire, où ils ne sont plus étudiés qu’en traduction, dans le cadre de l’option « Langues et cultures de l’Antiquité ». Le CAPES de Lettres Classiques a été supprimé en 2013. Le reste suivra.
Au terme d’une longue histoire, où la philologie a tour à tour été la victime du belle-lettrisme, de la science, de la philosophie, de l’archéologie, de la linguistique, de l’histoire, de l’anthropologie et de la critique littéraire, l’Université et la Recherche ont été organisées de telle manière que l’étude des textes en tant que tels en soit exclue : la grammaire gréco-latine est l’affaire des linguistes, la civilisation gréco-romaine celle des historiens, la mythologie celle des anthropologues, l’histoire de la philologie celle des historiens de la culture, l’écriture celles des chartistes, les papyrus, comme les inscriptions et l’art, celle des archéologues, les manuscrits celle de l’Institut de Recherches en Histoire des Textes, les collections de manuscrits celle des historiens de la culture moderne, les éditions anciennes celle des historiens du livre, la rhétorique celles des spécialistes de la Communication, les textes littéraires celle des historiens de la littérature, les textes philosophiques celle des historiens de la philosophie, les textes scientifiques celle des historiens des sciences, etc. Nulle place, donc, pour la philologie classique ou générale.
On continue cependant à éditer des textes anciens et, dans le cadre de cette activité, il arrive que se fasse sentir le besoin d’un spécialiste des textes : on recourt alors généralement à quelque savant italien, titulaire d’une thèse de filologia classica. Il faut dire qu’en Italie, la dernière grande réforme de l’Université (2005) a instauré un enseignement systématique de cette discipline : la librairie italienne a depuis été inondée de manuels aux titres prometteurs (La scienza dei testi antichi, Introduzione alla filologia classica, I Classici dal papiro al Internet, Storia della filologia classica, etc.) et l’Italie est devenue le premier exportateur au monde de philologues classiques… Mais il faut se défier des mots, car, au-delà des Monts, ce terme ne désigne plus guère que la critique des textes (critica del testo), dont le noyau scientifique consiste en la Méthode de Lachmann (la stemmatique), c’est-à-dire en une procédure liberticide (parfois informatisée) de classement des témoins manuscrits qui se révèle absolument infructueuse dans la très grande majorité des cas. Cette filologia classica, qui ne laisse aucune place à l’interprétation des textes, n’a rien à voir avec la philologie générale que je défends, qui est avant tout un art de lire.
Les défenseurs des langues anciennes et des études littéraires doivent cesser de se voiler la face : à l’heure où, depuis quarante ans, l’État se désengage sans cesse davantage des services publics, où l’enseignement et la recherche sont devenus deux secteurs juteux de l’économie marchande, et où leur orientation et leur développement dépendent essentiellement des intérêts du capitalisme industriel et financier, la philologie générale n’a plus rien à attendre des pouvoirs publics. L’émancipation philologique devra donc être l’œuvre des philologues eux-mêmes et de tous ceux qui veulent savoir et comprendre ce qu’ils lisent.
C’est la raison pour laquelle j’ai rassemblé l’an dernier plusieurs vieux amis enseignants et docteurs, artistes, restaurateurs d’art, écrivains et éditeurs, pour créer avec eux une association, nommée « Philologie de l’avenir », qui a pour objet de « promouvoir la recherche scientifique et d’œuvrer à la publication de travaux savants dans le domaine de l’étude philologique (linguistique, historique, bibliologique, critique, herméneutique et poétique) de la littérature antique, médiévale et moderne », et, pour but, de « fonder et d’animer un centre national ou international de recherches privé, mixte ou public dédié à cette étude et portant le même nom que l’Association (Philologie de l’avenir) ».
Quels sont vos projets en cours ?
J’ai actuellement trois sortes de projets en cours : mes projets personnels, ceux de la collection « Essais – Philologie » et ceux de l’association « Philologie de l’avenir ».
Je prépare en ce moment mon Habilitation à diriger des recherches en Philologie grecque et en Histoire de la philologie, sous la direction de Brigitte Mondrain (ÉPHE-SAPRAT). Dans ce cadre, je suis en train d’achever plusieurs articles qui traînent depuis longtemps dans mes tiroirs : l’un, qui est destiné à la Revue de Philologie, concerne l’histoire de la philologie (« Une tradition philologique méconnue : le souci de la généalogie des manuscrits dans l’ancienne République des Lettres [1472-1815] ») ; un autre, qui paraîtra peut-être dans Scriptorium, consiste en une étude d’histoire des collections manuscrites (« Une liste inédite d’une centaine de manuscrits grecs vendus à Paris en 1598 ») ; un autre encore, qui sera publié dans les Greek & Roman Musical Studies, contient la première édition critique et la première traduction en français d’une série d’extraits byzantins relatifs à la théorie de la musique (« Les Πτολεμαίου μουσικά anonymes. Édition critique et traduction française ») ; et un dernier, que j’adresserai bientôt à la rédaction de la Revue d’Histoire des textes, contient une critique du stemma codicum du Περὶ μουσικῆς d’Aristide Quintilien proposé en 1963 par le dernier éditeur de ce traité (« Recherches historiques et philologiques sur les manuscrits d’Aristide Quintilien »). Je dois aussi rédiger pour les GRMS une recension de l’édition critique de la première traduction en latin (1492) du Dialogue sur la musique attribué à Plutarque (A. Meriani, Plutarchi Chaeronensis De musica, Carolo Valgulio interprete, Firenze, 2021) et un compte rendu de la récente édition critique du commentaire d’Alexandre d’Aphrodise à la Métaphysique d’Aristote (P. Golitsis, Alexander of Aphrodisias, Commentary on Aristotle, Metaphysics. Critical Edition with Introduction and Notes, Berlin-Boston, 2022). Mais il me faut surtout achever la première partie (1512-1559) d’un énorme travail, qui doit occuper une bonne partie de mon temps jusqu’à ma mort : mon Répertoire des éditions princeps de textes grecs publiées en France.
Pour les Éditions Anacharsis, je prépare avec Frantz Olivié un volume qui devrait s’intituler Anacharsis, le Scythe grec et paraître dans la collection « Famagouste » : en vue de cette publication, j’ai rassemblé et traduit 346 témoignages anciens sur cette figure mythique. Mais je travaille surtout aux quatre prochains titres de ma collection « Essais – Philologie » : mon Aristoxène de Tarente, Écrits sur le rythme. Présentation, édition critique, traduction et commentaire philologique (2023), mon L’invention du rythme. La théorie du rythme musical dans l’Antiquité gréco-romaine (2024), le F. G. J. Du Chasteller & L. Rodieux, La langue grecque (1781-1827) édité par Pascale Hummel, et le Galien et ses livres. Écrire, éditer et publier dans l’Antiquité d’Antoine Pietrobelli (2025). À cette date, la collection comptera donc douze volumes.
Elle devrait cependant être amenée à s’accroître rapidement, car l’association « Philologie de l’avenir » a passé un accord avec les Éditions Anacharsis pour que la collection « Essais – Philologie » accueille dorénavant ses propres publications. Pour l’heure, l’association est surtout préoccupée par son organisation interne, par sa collaboration avec le mensuel Bastille Magazine, où elle aura chaque mois sa propre rubrique d’une à deux pages, par la campagne d’adhésion qui débutera en septembre, par la conception de son bulletin d’information et par la construction de son site Internet, qui devrait être en ligne au printemps prochain. Mais elle a d’ores et déjà lancé plusieurs projets : elle co-organise avec le Centre d’Études et de Recherches Comparatistes (EA 172) un séminaire de recherches sur « L’index, créativité d’une pratique de lecture », qui aura lieu, à compter de janvier 2023, un samedi matin par mois à la Sorbonne-Nouvelle, et qui devrait donner lieu à plusieurs publications ; elle a initié une édition critique, avec introduction, traduction française et commentaire, du Corpus des traités grecs sur les tropes, ainsi qu’un programme d’éditions de correspondances érudites modernes, à commencer par celles des Lettres (1548-1596) d’Henri Estienne, des Lettres parisiennes (1596-1633) du philologue Nicolas Rigault et de la Correspondance croisée complète (1630-1641) de l’helléniste Jean-Jacques Bouchard ; elle soutiendra mon projet de Répertoire des éditions princeps publiées en France, qui devrait compter une dizaine de volumes ; et elle envisage même de participer à une nouvelle édition de Sappho…
La philologie est morte : vive la philologie !
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Bibliographie de Laurent Calvié (2000-2023)
A. Travaux universitaires inédits
(1) L. Calvié, Le Livre iii, 1-19 du Traité de Musique d’Aristide Quintilien : introduction, traduction et commentaire critique et exégétique. Mémoire de maîtrise s.d. D. Pralon, Aix-en-Provence, Université de Provence, 1991, 230 p.
(2) L. Calvié, L’Enseignement des figures du discours en classe de seconde. Mémoire pédagogique, Aix-en-Provence, IUFM, 1993, 48 p.
(3) L. Calvié, La Réception du Traité de Musique d’Aristide Quintilien en France aux siècles classiques (1623-1815). Mémoire de DEA s.d. G. Dorival, Aix-en-Provence, Université de Provence, 1995, 166 p.
(4) L. Calvié, Tradition manuscrite et histoire du texte des Éléments rythmiques d’Aristoxène de Tarente (avec une édition critique provisoire et une première traduction en français de leur seul fragment conservé). Thèse de doctorat s.d. G. Dorival, Aix-en-Provence, Université de Provence, 2006-2007, 958 p. et 109 p. d’errata et compléments.
*(5) L. Calvié, Les premières éditions princeps de textes grecs publiées en France (1512-1559). Répertoire. Mémoire d’HdR s.d. B. Mondrain, Paris, EPHE, 2023.
*(6) L. Calvié, Histoire, théorie et pratique de la philologie classique. Mémoire de synthèse (HdR) s.d. B. Mondrain, Paris, EPHE, 2023.
B. Publication
1. Ouvrages
(7) L. Calvié, La Boucle de Bérénice. Un poème de Catulle, Toulouse, Anacharsis, coll. « Famagouste », 2002, 97 p.
(8) B. des Périers, Cymbalum mundi, suivi de B. Desperiers par Charles Nodier. Adaptation en français moderne, préface, notes et dictionnaire par L. Calvié, Toulouse, Anacharsis, coll. « Famagouste », 2002, 175 p.
(9) H. Le Bret, C. de Bergerac, Ch. Dassoucy, Ch. Nodier, Th. Gautier, P. Lacroix, R. de Gourmont, Cyrano de Bergerac dans tous ses états, Choix des textes, présentation, édition, notes et lexique par L. Calvié, Toulouse, Anacharsis, coll. « Famagouste », 2004, 239 p.
(10) J. Vallès, Fontan Crusoë. Aventures d’un déclassé racontées par lui-même. Texte établi par L. Calvié, Présentation de L. Calvié et F. Olivié, Toulouse, Anacharsis, coll. « Petits Anacharsis » (1), 2009, 44 p.
(11) C. Tillier, Comment le chanoine eut peur. Chronique nivernaise. Texte établi, présenté et annoté par L. Calvié, Arles, Les Éditions de la Nuit, coll. « La Nuit / poches », 2010, 75 p.
(12) Timothée de Milet, Les Perses. Grandeur et décadence d’un papyrus grec. Textes choisis et présentés par L. Calvié, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais — Philologie », 2010, 95 p.
(13) H. Weil, L’art de lire. Études sur l’ancienne poésie grecque. Précédées de La Philologie selon Henri Weil, par L. Calvié, et suivies de Notice sur la vie et les travaux de H. Weil, par G. Perrot. Textes choisis, établis et annotés par L. Calvié, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais — Philologie », 2014, 605 p.
*(14) L. Calvié, Bibliographie chronologique et analytique des écrits rythmiques d’Aristoxène de Tarente (1470-1921). Contribution à l’étude des rythmiciens grecs et à l’histoire de la philologie classique [2016], Rhuthmos, 2022, 336 p. [en ligne : http://rhuthmos.eu]
(15) J.-B.-G. D’Ansse de Villoison, Le Voyage à Venise. La recherche des manuscrits grecs inédits à la fin du xviiie siècle, suivi de Sur des recherches à faire dans le voyage de Constantinople et du Levant, par Bernard de Montfaucon. Textes présentés, établis et annotés par L. Calvié, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais- Philologie », 2017, 220 p.
(16) L. Calvié, Cyrano avant Rostand. Mythe, thème et variation, Toulouse, Anacharsis, coll. « La Griffe – Essais », 2019, 288 pages.
*(17) Aristoxène de Tarente, Écrits sur le rythme, Présentation, édition critique, traduction et commentaire par L. Calvié, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais — Philologie », 2023 (à paraître).
*(18) L. Calvié, L’invention du rythme. Aristoxène de Tarente, disciple d’Aristote, et la théorie du rythme dans l’Antiquité, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais — Philologie », 2023 (à paraître).
2. Direction d’ouvrages
(19) L. Canfora, Le copiste comme auteur. Traduit de l’italien par L. Calvié et G. Cocco, Avec une préface de L. Calvié et une apostille inédite de l’auteur, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais — Philologie », 2012, 125 p.
(20) L. Canfora, La fabuleuse histoire du faux papyrus d’Artémidore. Avec une nouvelle édition critique et une première traduction en français du Papyrus du Ps.-Artémidore. Préface de L. Calvié, Bibliographie établie par L. Calvié et complétée par F. Condello, Suivie de L’art et le faux, par Olivier Cena, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais — Philologie », 2014, 303 p.
(21) P. Maas, Les dessous de la littérature grecque. Paléographie, critique et histoire des textes. Textes choisis, présentés et traduits par L. Calvié. Avec la collaboration de M. Patillon, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais — Philologie », 2020, 245 p.
3. Parties d’ouvrages
(22) [Chr. Boudignon, L. Calvié & G. Cocco], « Index des mots grecs », in E. Bernand, Recueil des Inscriptions de l’Éthiopie des périodes pré-axoumite et axoumite : T. III. Traductions et commentaires, Paris-Leuven, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres & Peeters, 2000, n. p.
(23) L. Calvié, « Une bibliothèque philologique de poche », in Luciano Canfora, Le copiste comme auteur, Toulouse, Anacharsis, 2012, p. 5-10 [voir (19)].
(24) L. Calvié, « Bibliographie textualiste de Luciano Canfora », in L. Canfora, Le copiste comme auteur, Toulouse, Anacharsis, 2012, p. 11-17 [voir (19)].
(25) L. Calvié, « Le philologue des Lumières et le parti pris obscurantiste », in L. Canfora, La fabuleuse histoire du faux papyrus d’Artémidore, Toulouse, Anacharsis, 2014, p. 5-30 [voir (20)]
(26) L. Calvié & L. Canfora, « Édition critique et traduction du Papyrus d’Artémidore », in L. Canfora, La fabuleuse histoire du faux papyrus d’Artémidore, Toulouse, Anacharsis, 2014, p. 231-255 [voir (20)].
(27) L. Calvié & F. Condello, « Bibliographie du Papyrus d’Artémidore », in L. Canfora, La fabuleuse histoire du faux papyrus d’Artémidore, Toulouse, Anacharsis, 2014, p. 231-255 [voir (20)].
(28) L. Calvié, « Quand lire, c’est écrire... », in S. Rabau, B. comme Homère. L’invention de Victor B., Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais. — Libre pensée », 2016, p. 7-17.
(29) L. Calvié, « Préface », in P. Maas, Les dessous des textes grecs. Paléographie, critique et histoire des textes grecs, Toulouse, Anacharsis, 2020, p. 15-54 [voir (21)].
(30) L. Calvié, « Paléographie grecque – Notice », P. Maas, Les dessous des textes grecs. Paléographie, critique et histoire des textes grecs, Toulouse, Anacharsis, 2020, p. 57-68 [voir (21)].
(31) L. Calvié, « Histoire des anciens textes grecs à Byzance – Notice », P. Maas, Les dessous des textes grecs. Paléographie, critique et histoire des textes grecs, Toulouse, Anacharsis, 2020, p. 107-110 [voir (21)].
(32) L. Calvié, « Critique des textes – Notice », P. Maas, Les dessous des textes grecs. Paléographie, critique et histoire des textes grecs, Toulouse, Anacharsis, 2020, p. 137-146 [voir (21)].
(33) L. Calvié, « Les interpolateurs réels », in Sophie Rabau, L’art d’assaisonner les textes. Théorie et pratique de l’interpolation. Postface de Laurent Calvié, Toulouse, Anacharsis, coll. « Essais — Philologie », 2020, p. 541-573.
(34) L. Calvié, « Sur le texte grec », in L. Lavaud & G. Guyonmarc’h, Alexandre d’Aphrodise, Commentaire à la Métaphysique d’Aristote. Introduction, traduction et notes du livre Petit Alpha et du livre Beta, Paris, J. Vrin, coll. « Bibliothèque des textes philosophiques », sér. « Commentaire à la Métaphysique d’Aristote », 2021, p. 9-13.
4. Articles dans des actes de colloque à comité de lecture
(35) L. Calvié, « Les Prières à Apollon dans les traités grecs de musique », in G. Dorival et D. Pralon (éd.), Prières méditerranéennes hier et aujourd’hui, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, coll. « Textes et documents de la Méditerranée antique et médiévale », 2000, p. 103-114.
(36) L. Calvié, « Notes sur la théorie de l’allégorie chez les rhéteurs grecs », in J. Gardes-Tamine (éd.), L’Allégorie corps et âme. Entre personnification et double-sens, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2002, p. 77-95.
(37) L. Calvié, « Les relations maître-disciple dans les traités des musicographes néopythagoriciens platonisants », in G. Filoramo (ed.), Maestro e discepolo. Temi e problemi della direzione spirituale tra VI secolo a.C. e VII secolo d.C., Brescia, Morcelliana, coll. « Centro di Alti Studi in Scienze Religiose di Piacenza » (1), 2002, p. 25-47.
(38) L. Calvié, « Le De Sibyllinis aliisque quae Christi natalem praecessere Oraculis d’Isaac Vossius », in G. Dorival et J.-P. Boyer (éd.), La Nativité et le temps de Noël. Antiquité et Moyen Âge, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, coll. « Textes et documents de la Méditerranée antique et médiévale », 2003, p. 177-188.
(39) L. Calvié, « Théories du Cosmos et formes littéraires dans l’antiquité classique », in Y. Touchefeu (éd.), Les Anciens et le Cosmos (science, philosophie, poésie), Bordeaux, Cnarela & APLG, 2004, p. 79-111.
(40) L. Calvié, « Étienne Dolet et Bonaventure des Périers », in M. Clément (éd.), Étienne Dolet (1509-2009), Genève, Droz, 2012, p. 95-120.
(41) L. Calvié, « The Indirect Tradition of ῾Ρυθμικὰ στοιχεῖα of Aristoxenus of Tarentum », in S. Aufrère (éd.), On the Fringe of Commentary : Metatextuality in Ancient Near Eastern and Ancient Mediterranean Cultures, Louvain, Peeters, coll. « Orientalia Lovaniensia Analecta » (232), 2014, p. 329-343.
5. Articles dans des mélanges
(42) L. Calvié, « Sur une prétendue distinction aristoxénienne entre la rythmique et la métrique [Aristoxène de Tarente, Éléments rythmiques, § 19] », in A. Balansard, G. Dorival et M. Loubet (éd.), Les Fondements de la tradition classique. En hommage à D. Pralon, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, coll. « Textes et documents de la Méditerranée antique et médiévale », 2009, p. 117-128.
(43) L. Calvié, « Quelques mots sur l’illustration », in A. Balansard, G. Dorival et M. Loubet (éd.), Les Fondements de la tradition classique. En hommage à D. Pralon, Aix-en-Provence, PUP, coll. « TDMAM », 2009, p. 337.
(44) L. Calvié, « L’enseignement de H. Weil à l’École normale d’après un document inédit », in M. Loubet & D. Pralon (éd.), Poïkiloï karpoï. Exégèses païennes, juives et chrétiennes. Études réunies en hommage à G. Dorival, Aix-en-Provence, PUP, coll. « Héritages méditerranéens », 2015, p. 461-469.
(45) L. Calvié, « Traductions et citations d’Aristide Quintilien en France (1538-1815) : les définitions de la musique (i, 4, p. 4, 18-23 W.-I.) », in P. Hummel & F. M. Falchi (ed.), Ancient Greek by Its Translators, Paris, Philologicum, 2021, p. 124-148.
6. Articles dans des revues à comité de lecture
(46) L. Calvié, « À propos des Éléments rythmiques d’Aristoxène de Tarente », Cahiers philosophiques 83 (juin 2000), p. 105-119.
(47) L. Calvié, « La philologie classique et l’apprentissage de la lecture intelligente », Kentron 25 (2009), p. 29-52.
(48) L. Calvié, « Les extraits pselliens des Éléments rythmiques d’Aristoxène de Tarente », Revue des Études Byzantines 72 (2014), p. 139-191.
(49) L. Calvié, « Sur la distinction établie par Aristide Quintilien (i, 18) entre rythmiciens συμπλέκοντες et χωρίζοντες », Greek & Roman Musical Studies 3 (2015), p. 67-93.
(50) L. Calvié, « Documents inédits, méconnus ou oubliés sur le voyage à Venise de J.-B.-G. D’Ansse de Villoison et la découverte du Venetus A de l’Iliade », Quaderni di Storia 81 (2015), p. 165-189.
(51) L. Calvié, « Le fragment rythmique du POxy 9 + 2687 attribué à Aristoxène de Tarente », Revue de Philologie 88/1 (2014) [2016], p. 7-56.
(52) L. Calvié, « L’organisation d’ensemble du livre ii des ῾Ρυθμικὰ στοιχεῖα d’Aristoxène de Tarente », Greek & Roman Musical Studies 4 (2016), p. 104-126.
(53) L. Calvié, « Martianus Capella a-t-il traduit le traité de rythmique d’Aristide Quintilien ? », Rursus [en ligne] 10 (2017) : Traductions latines de textes grecs.
(54) L. Calvié, « La part d’Henri Weil dans l’édition du De la musique attribué à Plutarque (Paris, E. Leroux, 1900) », Greek & Roman Musical Studies 5 (2017), p. 234-266.
(55) « Le commerce transalpin du copiste-libraire vénitien Andréas Darmarios entre 1582 et 1585 », Revue d’Histoire des Textes 15 (2020), p. 89-168.
(56) L. Calvié, « Un manuscrit médiéval d’anciens musicographes grecs : le Vaticano BAV, gr. 2338 », Scriptorium 73/2 (2019) [2020], p. 219-250.
*(57) L. Calvié, « Le souci de la généalogie des manuscrits dans l’ancienne République des Lettres (1472-1815) », Revue de Philologie 96/2 (2022).
*(58) L. Calvié, « Une liste inédite d’une centaine de manuscrits grecs vendus à Paris en 1598 », Scriptorium [?]
*(59) L. Calvié, « Les Πτολεμαιου μουσικα anonymes. Présentation, édition critique et traduction en français », Greek & Roman Musical Studies 11 (2023).
7. Articles sur des plates-formes universitaires
(60) L. Calvié, « À propos de l’édition Hayduck du Commentaire d’Alexandre d’Aphrodise à la Métaphysique d’Aristote », DIDASKALOS : Alexandre et la métaphysique aristotélicienne [Carnet de recherche], http://didaskalos.hypotheses.org/ (juin 2015).
(61) L. Calvié, « Le Paris. gr. 1878 [Pb] : recentior, non deterior ? », DIDASKALOS : Alexandre et la métaphysique aristotélicienne [Carnet de recherche], http://didaskalos.hypotheses.org/ (juillet 2016).
(62) L. Calvié, « La tradition indirecte des ῾Ρυθμικὰ στοιχεῖα d’Aristoxène de Tarente : citations, extraits, paraphrases, résumés, remaniements et suppléments », Rhuthmos, 4 janvier 2018 [en ligne]. http://rhuthmos.eu/spip.php?article2137
8. Recensions dans des revues à comité de lecture
(63) L. Calvié, « G. Lambin, Timothée de Milet. Le poète et le musicien, Rennes, PUR, 2013 », Revue de Philologie 88/2 (2014) [2016], p. 210-211.
(64) L. Calvié, « CARL A. HUFFMAN, Aristoxenus of Tarentum. The Pythagorean precepts (how to live a Pythagorean life) : an edition of and commentary on the fragments with an introduction. Cambridge ; New York : Cambridge University Press, 2019, xi+636 pp., $170.00, ISBN 978-1-108-42531-5 », Exemplaria Classica 24 (2020) [2021], p. 271-281.
*(65) L. Calvié, « A. MERIANI (a cura di), Plutarchi Chaeronensis De musica Carolo Valgulio interprete, Firenze, SISMEL-Edizioni del Galluzzo, coll. “Edizione Nazionale delle traduzioni dei testi greci in età umanistica e rinascimentale” (12), 2021, v-156 p., 38 €, ISBN 978-88-8450-846-1 », Greek & Roman Musical Studies 10 (2022).
*(66) L. Calvié, « P. GOLITSIS, Alexander of Aphrodisias, Commentary on Aristotle, Metaphysics (Books i-iii). Critical Edition with Introduction and Notes, Berlin-Boston, De Gruyter, coll. “Commentaria in Aristotelem Graeca et Byzantina” (3/1), 2022, clx-302 p., 113,95 €, ISBN 978-3-11-073244-3 » [?].
C. Médias
(67) L. Calvié & A. Perraud, « Henri Weil retrouvé », Tire ta langue, Paris, France Culture, 4 mai 2014 (29 mn).
[1] Je pense à ce poème célèbre de Brecht, Hollywood (1942) :
Chaque matin, pour gagner mon pain
Je me rends au marché où l’on vend des mensonges.
Plein d’espoir
Je me range parmi les vendeurs.