Attention Travaux de Politique Philosophique Sauvage 9
« Mon corps m'appartient ? »
Après la polémique sur le voile à l'école, une autre polémique sur « la tenue républicaine ». Et le bon peuple de crier haro sur ce pauvre baudet de ministre de l'éducation nationale.
Il fut un temps de mini-jupe scandaleuse et maintenant une histoire de t short qui dévoile le nombril des jeunes filles. Les garçons y ont eu droit eux aussi il y a quelques temps et dans une moindre mesure avec leur pantalon sur les genoux. Des objets manufacturés dérisoires excitant la consommation, remettent en question le vivre ensemble institutionnel. Les jeunes des deux sexes alors interrogés se partagent entre le retour à l'uniforme ou la liberté totale de montrer ce que l'on a envie de monter. Soit « Il est interdit d'interdire » et cela en déniant la réalité évidente du corps sexué comme objet de désir, soit, le pendant réactif à cette position : « si tu t'habille comme ça, tu es une pute ! »
On oblige la population et les jeunes gens à se masquer le bas du visage et l'on polémique sur le fait de montrer ce qui auparavant, devait être caché dans les lieux publics. Une polémique chasse l'autre, les déclarations succèdent aux injonctions et aux critiques qui succèdent aux réactions qui succèdent aux récriminations, tout cela dans un océan de prises de positions de toutes natures.
Il est curieux de constater que le masque cache la bouche et le nez, et que l'on ne s'embrasse plus en public, alors que l'on avait interdit il y a pas si longtemps aux jeunes filles scolarisées s'imaginant suivre des principes religieux, le port du voile. Les visages se masquent et les corps se montrent, nous vivons dans un drôle de monde.
Et pourquoi, celui ou celle qui voudrait jouir de la vie pleinement serait-il contraint à se protéger sous le prétexte qu'il peut attraper ou transmettre un virus, alors que celui-ci n'a pas fait beaucoup plus de morts finalement dans le monde qu'une grosse grippe saisonnière 650 000 pour certaines années pour la grippe et 1 000 000 pour la covid ? Et pourquoi serions nous obligés d'avoir une tenue « décente » dans les espaces publics ? Pourquoi doit-on voiler certaines parties de son corps sous prétexte que cela provoquerait un excès d’excitations préjudiciable à l'ordre public ?
Crise sanitaire, crise éducative, crise de l'autorité ? D'un côté il y a ce que nos « dirigeants » nous présentent comme la nécessité de mesures sanitaires obligatoires. Mesures contre la réalité du risque de contamination biologique, entraînant des malades et des morts potentiels, de l'autre un rappel à une « tenue décante » dans les lieux éducatifs Blanquer « Ce n'est pas interdit mais ce n'est pas souhaitable » :
Ces situations croisées nous amènent à nous poser certaines questions qui nous semblent fondamentales pour chercher à comprendre ce profond malaise démocratique.
Qu'est-ce que la liberté ? Qu'est-ce que l'autorité ? Qu'est-ce qui fait aujourd'hui autorité ? Qu'est-ce qui peut nous amener aujourd'hui, à un chemin de liberté ?
Vastes questions portées par cette crise généralisée et vive la crise qui nous permet de réinterroger ce vieux monde déliquescent en ayant l'espoir d'en changer le cours.
Qu'est-ce que l'autorité si l'on veut bien penser que ce terme d'autorité n'est pas à confondre avec celui d'oppression de certains sur d'autres, qu'il n'est pas non plus, à confondu avec l'autoritarisme, qui est justement la manifestation même de son absence. L'autorité pourrait-elle être pensée comme une faculté et une charge, une responsabilité partagée, de chacun sur chacun.
Qu'est-ce que la liberté si l'on veut bien penser que ce n'ai pas la revendication d'un individualisme absolu où seul régnerait la satisfaction de ses propres plaisirs, mais une difficile condition humaine qui rend chaque sujet maître de son propre destin.
Alors, comment peut-on penser ce message si puissant « Mon corps m’appartient » ?
Oui, mille fois oui lorsqu'il faut le défendre ce corps, contre la violence de son appropriation par un autre. C'est-à-dire défendre son corps Réel, son corps « physique », fait de chaire et de sang contre la chosification que veut en faire un autre.
Mais l'espèce humaine à ceci de particulier qu'elle est née deux fois, une première fois dans le Réel du corps et une deuxième fois par la parole, c'est à dire, par une inscription dans le monde socialisé des humains. Et là, ça se complique, parce que l'on ne peut pas dissocier le corps et le sujet. On ne peut pas dissocier le corps réel de l'image renvoyée par les autres de son propre corps, et du corps dans son inscription et donc dans son appartenance en partie, au corps culturel, symbolique et social.
« Mon corps m'appartient » ça doit vouloir dire que j'en ai la jouissance et ça c'est très important, mais en avoir la propriété, ça, c'est moins sur, c'est le leurre premier de ce monde marchandisé, nous faire croire que tout est objet de consommation, y compris nous-même .
Quels beaux chantiers nous avons encore à ouvrir pour réenchanter ce monde !