RETOUR A LA PENSEE SAUVAGE 1

RETOUR A LA PENSEE SAUVAGE 1

Morceaux d'écrits jetés dans un carnet:

• • Automne 2023.

    • - Lyon devient invivable malgré les petits bouts de verdure confettis disséminés ça et là. Dérisoire rime avec désespoir.

    • - Dans les failles de l'asphalte et du béton, continuent à pousser les «mauvaises herbes» arrosées de pisse et d’essence. Elle sont les véritables propriétaires des lieux. Les mauvaises herbes auront toujours le dessus.

    • Il fait chaud. Il n'a jamais fait aussi chaud. Les records de température ne cessent d'être battus. Nous autres humains aimons la compétition, il faut être les meilleurs de la création, même dans l'autodestruction, surtout dans l'autodestruction. Qu'avons nous tant à payer? Quelle est notre dette? . Jusqu'à quand va-t-on battre des records, jusqu'à ce que mort s'en suive? «La mort vous va si bien», «L'a-mor à la playa... Ohé … Ohé...». Avec Charon-Voyage, on vous promet des vacances éternelles...

    • Il n'y a jamais eu autant d'humoristes...Les salles sont pleines juste avant la catastrophe. Jusqu'à quel moment à joué l’orchestre sur le Titanique?

    • - Info: Des robots intelligents à l'école et en EHPAD pour soigner les enfants autistes et les personnes âgées souffrant d’Alzheimer. Abolition de la peine de vivre.

    • - Info : Quelque part, un maire a fait repeindre les pelouses grillées de sa ville en vert. Il garantit que la peinture est inoffensive et bio dégradable.

    • - Info: On soigne très bien l'eco-anxiété par des séances d'hypnose.

    • Je hais le Développement personnel parce que, personnellement, je me trouve bien assez développé pour me foutre en l'air ou pour faire la révolution.

    • - Le progrès s'essouffle, il a besoin d'oxygène. «C'est pas pour dire mais c'est une bonne guerre qu'il nous faudrait», «Pas de problème, on a ce qu'il vous faut en rayon»

    • Dieu est un accident de la création dont nous payons encore aujourd'hui les dommages...Dommage.

    • - Le totalitarisme du langage informatique est infigurable (Il prend toutes les figures et toutes les formes). C'est pour le capitalisme l'arme de destruction massive de «L'homme révolté».

    • Info: Un logiciel est disponible pour dispenser des cours d'empathie à l'école. L'élève: «M'sieur, pour se mettre à la place de l'autre, il faudrait déjà que je connaisse la mienne...». Le prof: «T'a raison, mais c'est bien parce que tu ne la connais pas que tu peux essayer de t'y mettre à sa place mon gars, comme ça, vous essayerez de trouver vos places ensemble»(Le prof ne le dit pas à l’élève mais il pense très fort: «Prends ça dans ta gueule logiciel de merde!)

    • Disparition de l'infini entre zéro et un, entre moi et toi, entre nous et eux.

    • -L'expression un ciel de plomb n'a jamais été aussi juste.

    • La valeur de l'individu diminue avec le carré du nombre (signé, le solitaire irréconciliable).

    • -Trop d'infos, trop de chaleur, trop de pollutions, trop de consommations, trop de déchets, trop de bruits, trop d’excitations, trop de paroles stériles, trop de rires imbéciles, trop de jugements péremptoires, trop de mépris suffisants, trop de moralisme humaniste, trop de cris de souffrance, de jouissance, de haine, de condamnations, trop d'humains? «Humain trop humain» trop de Nieszscheries, Too munch l'époque.

    • - Rien de nouveau sous le soleil brûlant entre ceux qui ont tout et ceux qui n'ont rien, juste un changement d'ère.

    • - Sur France Inter ce matin. Débat entre une femme politique Nupes et un jeune technocrate macroniste. Le sujet du jour porte sur la sinistre farce de la «planification écologique». La dame connaît son affaire, c'est une pro du langage, elle a de très bons arguments pour contrecarrer la gestion calamiteuse de l'écologie néolibérale. Les deux invités sont encore un peu jeunes pour êtres totalement retors, mais ils sont en bonne voie. Vers la fin du débat, presque en guise de conclusion, une phrase échappe à l'énarque option gauche, gonflée à l'écologie sociale et solidaire, une phrase presque en guise de conclusion qui vient percuter de plein fouet mes neurones encore endormies: «La volonté de possession est propre à l'homme, le capitalisme est dans la nature même de l'humain».

    • - Je me demande à chaque élection si je vais encore voter. Et puis j'y vais, avec l'impression d'aller porter des fleurs sur une tombe.

    • - «La nature humaine» ! Qu'est-ce que c'est que cette affaire? Étrange oxymore, L'humain n'a pas de nature déterminée puisqu'il est, dans la nature, un vaste et vague projet, juste une idée qui fait son chemin.

    • «La nature humaine»? Notre rapport au monde est un rapport langagier, culturel, et en cela, il est dissocié de la nature, et cette dissociation n'a rien à voir avec une quelconque divinité. C'est comme ça, et ce ça là, est inaccessible. C'est notre condition d'humain d'être seul et séparé du Réel des choses, et en cela, d'avoir le pouvoir de créer un monde de félicités et de malheurs.

    • Que serait le monde de la nature si il n'y avait personne pour y voir la puissance redoutable et la beauté?

      La première émergence de la pensée (dans l’existence humaine mais aussi dans l'instant éphémère), est la manifestation symbolique, l'évocation, de l'absence d'une mère Nature mythique qui nous aurait imaginairement comblé.

    • Face à ce vide initial, à cette brisure, à cette faille, ou tout simplement à cette séparation initiale, l'enfant, et tout humain durant son existence, passe par le symbolique de la pensée langage pour pouvoir s'approprier le monde. Il établit son rapport au monde selon deux processus de pensées à la fois opposés et complémentaires. La pensée poétique de l'instant et la pensée politique et concrète du temps.

    • Une pensée élaboratrice, liée à une volonté de maîtrise, de domination, et de possession des objets et des êtres, pour compenser l'absence du seul objet total qui imaginairement pourrait combler, et une pensée, intuitivement consciente de la vacuité et de l'impermanence des choses de la réalité humaine.

    • - A la pensée ingénieuse et productive qui relèverait de «la nature humaine» comme seul espace de pensée possible pour posséder le monde, dans un mouvement de projection extérieur à soi, il nous appartient de revenir à la radicalité d'une pensée réflexive, une pensée première, la pensée originelle de la conscience d'être. Une pensée introspective pour agencer le monde dont nous sommes (Agencer: Disposer convenablement plusieurs choses ou les parties d'une même chose. Dérivé de l'ancien français: Gent, gent: Noble, beau).

    • - Tu te prends pour qui?! - Justement, j'aimerai bien le savoir!

    • - Penser à ressortir le bouquin de Lévi Strauss qui doit être quelque part dans mon foutoir. Ce bouquin auquel je n'avais pas compris grand chose à l'époque mais dont le titre me plaisait tant. Ça s'appelait «La pensée sauvage».Pierre-Yves GACHET 14 octobre 2023