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Billet de blog 24 avril 2012

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Veau marin (qui est le _ ?)

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Dernière mise à jour 28/04/12 9h12. 

Ce texte est scindé en deux articles pour en faciliter la lecture

"Ce terme de « veau marin » n’est réservé qu’à cette espèce de phoque, et ne doit pas être confondu avec « veau de mer » qui désigne aussi le requin taupe.

Le jeune phoque est nourri du lait de sa mère, très riche" (wikipédia). À la différence de la mère du veau terrestre, elle n’est pas cornue.

Contrairement aux apparences, cependant, le front de la bête n’est pas si lisse,  comme l’aura mis en évidence son usage dans les champs UV et infratouge.

Le veau marin a émergé le bout du museau, en 1986, de la camera obscura du social-vichyste Mitterrand (1), comme le signal de ce qu’il était bien là, à devoir menacer de mettre à bas la démocratie - quand il n’y a jamais eu de démocratie et que la seule gestion qui a été menée, de droite comme de dite gauche, n’aura été qu’une gestion économiste.

Mais, afin de couper court à toute religiosité puérile tordant les faits en de scabreuses arabesques pour imaginer l'Histoire tout droit sortie du cerveau illuminé de quelques unes de ses figures, il importe de souligner que c'est D'ABORD, et avant tout, l'effondrement de ces temps, de ce système, effondrement le plus souvent désigné par l'euphémisme de "la crise", pour en dissimuler le caractère sans retour, qui nourrit le fascisme, comme la décomposition nourrit le fumier. Mais il est vrai, pour autant, que certains montrent une finesse politique dans leur lecture de cette Histoire, sachant en saisir les lignes de force pour s'imposer dans les flux mêmes qu'elle impose.

C'est précisément parce que cet économisme, nouvel ordre imposé au motif qu’il n’y a pas d’alternative, aura été ressenti comme la réalité même de la domination dirigée CONTRE les pauvres, qu'il importait que ce sentiment s’exprimât faussement, de manière aliénée et mensongère.

C’est ainsi que le Front national, parti né de la décomposition du poujadisme (2) et des forces défaites de la sédition algéroise, acquit ses capacités de nuisance virtuelle, ramenant dans la problématique républicaine celle de l’ennemi de la république et de la démocratie, un ennemi de l’extérieur dont on sait que sa vertu est de permettre de souder les ennemis d’hier. Une manière de renforcer encore la dite démocratie, si besoin était, une manière de canaliser ainsi toute réelle menace contre l’ordre pesant, totalitaire de l’économie sur la vie, un spectacle, destiné aux pauvres, donc (3), auxquels l'on présente ainsi un leurre pour y "exprimer" leurs malheurs, ici faussement médiatisés, travestis jusqu'à la bouffonnerie, la grossièreté, telle qu'elles sont, dans l'esprit dominant, censées représenter l'Esprit du peuple et son expression.

On les voit aujourd'hui, ces bouffons, en appeler à cet Esprit, l'invoquer comme son grand dieu - "peuple de France" - quand sa réalité est partout menacée par les mêmes. C'est cette menace là, bien réelle, qui est ici représentée inversée par la mise en spectacle du fascisme comme menace potentielle. Faire peur, pour rassembler sur le thème du front commun contre le fascisme, voilà qui permet d’éviter les questions sur la nature même de sa propre politique quand il y a urgence : aux frontières l’ennemi se presse. On laisse imaginer ici quelles pouvaient être alors ces frontières d’une “démocratie” de gens comme il faut se pavanant sous les ors de la république et donnant tout son sens au “tous pourris”.

Tout le sérieux grandguignolesque de cette menace apparaît pour ce qu'il est quand la voici reprise, stricto sensu,  par la droite dite républicaine, appelant à l'union sacrée contre le fascisme dont elle est l'héritière même !...

Dans le même temps, ou quasiment, cette même droite dite républicaine abandonnait le flambeau à l’un de ses éléments les plus séditieux qui, sans jamais rien dissimuler de ce qu’il voulait - le pouvoir au prix fort -, a en effet imposé, comme son proconsul placé là par des intérêts étrangers, la politique du capital international, se déchaînant sans plus de retenue, comme en pays conquis, comme en terre de colonie, balayant sans plus de précautions tout obstacle à ses dernières prises de possession, générant comme réalité désormais visible un effondrement généralisé des esprits, des coeurs, des conduites, des capacités de contrôle de tout un chacun sur ce qu'on lui somme désormais de prendre pour la vie, en lieu et place de la vie . Une prolétarisation accélérée de l'existence.

Faute d'être réglée par un bouleversement révolutionnaire reconstruisant le présent selon les forces déjà là qui le rendent possible, la barbarie surgit en tous points de la planète, désormais et sous toutes formes, que certains prétendent contenir, voire même repousser en redonnant corps de bric et de broc au golem fasciste quand il n'est qu'une manière de précipiter l'abîme.

En France, le pouvoir en place, le proconsul de la marchandise planétarisée, n’avait plus à "démoniser" l’extrême-droite ; il n’avait qu’à lui signifier - par œillades et appels du pied répétés - que les portes de la cité lui étaient grandes ouvertes, qu’était révolu le temps des "manières", qu'elle était ici chez elle, que rien de ce qu'elle avançait ne pouvait désormais être considéré comme provocation destinée à briser le dit pacte républicain d'une chose publique appartenant en droit à tout citoyen.

C’est néanmoins encore - mais de moins en moins au fur et à mesure de l’avancée du mandat - sous le couvert d’une droite s’auto-proclamant encore républicaine que cette politique - qui est le déni même de la République, ne serait-ce que dans ce qu’elle ne cesse de bafouer son pilier qu’est la séparation des pouvoirs - aura pu être menée en France, au mépris de la droite nationale - mais avec sa complicité même -, ainsi amenée à prendre la mesure de ce qu’elle se trouve ainsi placée, par ses propres défaillances à résister à cette déferlante anglo-américaine, devant le fait accompli de cette alternative :

- ou la poursuite sans vergogne des ravages du capitalisme international - avec reddition à la clé, sans conditions -, au risque de l'affrontement direct avec ceux que partout il expulse,

- ou l’extrême-droite à nouveau instrumentalisée par la droite même pour faire élire sa version social-démocrate, laquelle devra faire passer les mesures anti-sociales au nom même de ce qu’il n’y a pas d’alternative (4) à l'économie triomphante, seulement des aménagements sur les manières de son triomphe.

Ce sont donc non pas deux extrême-droites qui se disputeraient aujourd'hui en France la place au soleil, mais bien la violence du capital, aujourd'hui au pouvoir (5) - sans plus de ses garde-fous traditionnels qui, depuis la guerre, en corrigeaient les démesures et qui aujourd'hui ont sauté partout dans le monde - et ce leurre populiste, dont le seul rôle qui lui a été assigné est celui d'une opposition d'opérette, d'un ennemi fabriqué.

Suite article suivant : Veau marin (les trépidantes aventures du _)

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 NOTES, SOURCES & LIENS

1 - "Le 1er février 35, François Mitterrand participe à la manifestation de l'Action française contre les médecins étrangers autorisés à exercer en France, aux cris de « La France aux Français » (plus connu sous le nom réducteur de manifestation contre « l'invasion métèque »).

Sa participation à cette manifestation fut attestée par deux photographies, publiées dans Les Camelots du Roi de Maurice Pujo, où François Mitterrand apparaît face à un cordon de policiers. Le président ne niera pas avoir participé à cette manifestation mais n'en reconnaîtra pas le mot d'ordre."

http://fr.wikipedia.org/wiki/François_Mitterrand_et_l'extrême_droite

2 - NOTE du 26/04/12, modifiée le 27 - Aujourd'hui encore, et sans prétendre, pour autant nier les évolutions sociologiques de ses brebis, le FN recrute essentiellement parmi les commerçants, l'un des noyaux durs de son fonds de commerce - ainsi qu'on peut l'apercevoir dans cet article paru sur le site du Monde.fr. - ce qui permet d'expliquer, entre autres, sa capacité à faire de l'insatisfaction galopante sa justification comme base même de son commerce. La marchandise, par sa nature même, est censée répondre à un besoin, dût-elle le créer, et ce n'est que sur l'insatisfaction qu'elle peut prospérer, en n'y répondant jamais, bien évidemment, sous peine de se couper de sa source même.

Pour ce qui est de ses évolutions sociologiques, on se reportera à la note suivante, afin de bien distinguer ces deux pôles, au moins, de recrutement, ce qui est aussi bien la preuve de son hétérogénéité et de ses prétentions abusives quant à une possible adhésion à ses thèses. Pour cela, il faudrait, au moins, que le FN représente une perspective. On serait bien en peine de la dessiner, le ressentiment n'en constituant une en aucune manière.

http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2012/article/2012/04/26/des-primo-electeurs-de-marine-le-pen-parlent_1691971_1471069.html

3 -  « Le vote front national est un vote de classes populaires. Dans les beaux quartiers, on ne se reconnaît pas dans l’idéologie du FN. D’abord parce que le discours du Front national est politiquement trop primaire pour correspondre aux classes moyennes et supérieures diplômées, qui contrairement aux gens du peuple, ont la possibilité de mener une analyse de fond, de mobiliser des références culturelles, de mettre en perspective historique. Pour les habitants des beaux quartiers, c’est un vote inélégant, brutal, xénophobe. Or il faut que la politique soit policée, que les choses soient enveloppées, pour que cette bourgeoisie fortunée continue à mener la France, l’Europe, la mondialisation, en obtenant l’adhésion du reste de la société, en passant le plus inaperçue possible. Pour que le système capitaliste passe pour le seul viable, naturel. Et que les dominants apparaissent comme méritant de l’être. Le vote FN est contre-productif par rapport à leurs intérêts de classe.

Ceci dit, c’est une représentation de la société qui, si elle ne les concerne pas, leur convient pour les autres. Elle met en scène les conséquences du système capitaliste sans remettre en cause ce système lui-même. Et elle pique des voix à la gauche radicale qui, elle, conteste le système. Mieux vaut que les petites gens s’en prennent aux étrangers plutôt qu’ils s’intéressent aux oligarques ou mettent le nez dans les services de gestion privée des grandes banques » Monique Pinçon-Charlot.

http://sceaux.blog.lemonde.fr/2012/04/23/la-ville-ou-le-fn-a-fait-6/

4 - On peut supposer que M. Strauss-Kahn aura ainsi été gentiment débarqué de la croisière de boxe prévue, version devenue soudain non crédible d'une opposition au candidat en place, dont on aperçoit mal, en effet, quelles différences il aurait pu mettre en avant dans le style et alors même qu'il importe que cette différence apparaisse marquée, c'est-à-dire crédible, puisque la situation actuelle appelle une radicalisation de ses représentations. 

5 - Voir l'article "Gadjo gadget, gajdé !"

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