La situation palestinienne préoccupe régulièrement les députés d'Europe Ecologie (ici, ici, ici, ici). Son actualité leur donne une occasion d'affermir l'identité politique européenne qui dispose d'atouts et d'un pouvoir que n'a aucune autre puissance mondiale. Trois des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies sont des Européens dont deux appartiennent à l'Union européenne. Les déclarations de la France et du Royauem Uni sont convergentes. Cette puissance diplomatique n'appelle qu'à se cristaliser en la personne du Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères sous l'impulsion du Parlement européen. L'Union européenne est la première puissance économique mondiale, et le Conseil de l'Europe, regroupant trois membres permanents (avec la Russsie), promeut les droits de l'homme au delà des frontières européennes avec succès. Les ingrédients sont réunis pour un débat stimulant en alternative au fatalisme financier oppressant. Au boulot !
La Cour européenne a reconnu l'application de la Convention à des Irakiens dans sa décision Al Saadon (Arrêt). Elle n'est pas transposable à la situation de Gaza mais elle démontre le magnétisme qu'opèrent les institutions européennes au Moyen Orient. Une action conjuguée de l'Europe et de la Turquie peut être une alternative à l'opportunisme mercantile qui est le ressort principal (voir exclusif) de la diplomatie américaine et chinoise, les deux autres membres permanents du Conseil de sécurité.
Le fait que la Turquie siège actuellement au Conseil de sécurité n'est pas étranger à l'empressement du président américain à téléphoner au premier ministre turc (*) pour discuter de la saisine du Conseil de sécurité. Cette demande met en accusation Israël devant la Communauté internationale. Elle embarasse énormément les USA mais contribue à peser sur l'Etat hébreu à relâcher son blocus. C'est peut-être ce qui fut négocié par la Turquie pour maintenir ses relations avec les USA (La Turquie est membre de l'OTAN commandée exclusivement par les US depuis sa création). La Turquie abrite des bases américaines et joue un rôle stratégique de premeier plan dans la politique d'approvisionnement en pétrole des USA. Cet enjeu peut expliquer le léger fléchissement des USA et leur éventuelles démarches dans l'allègement du blocus de Gaza (à voir). Le confort des automobilistes électeurs US vaut bien un petit effort.
Il n'est donc pas indispensable d'attendre que les USA fassent quelque chose quand il existe une puissance politique en Europe. Elle peut promouvoir un débat à partir du Conseil de sécurité, partagé entre, d'une part, trois des membres permanents (la majorité) promouvant la justice sur l'utilitarisme des deux autres, d'autre part. Cette vision satisfait à l'attente des populations mondiales soumises aux excès de la globalisation, et pas seulement les Palestiniens, dont le sort est aujourd'hui une insulte au devoir de mémoire, au respect de la dignité humaine, à moins que ce devoir ne s'entende comme le monopole exclusif d'une catégorie de personnes ; ce qui, dans ce cas le viderait de tout intérêt, sinon celui d'entretenir une conception discriminatoire de l'humanité.
Daniel Cohn Bendit a été brillant dans son intervention pour la Grèce. Les parlementaires européens (de bonne volonté) peuvent se saisir de l'attaque militaire israéliennes contre la flotille de Paix pour développer le débat en Europe et obliger les gouvernements à agir. Une telle inititiative permet au Parlement européen de s'affirmer et de faire progresser à l'Europe humaniste. Elle témoignera de son attachement aux valeurs fondamentales proclamées depuis 60 ans et se différencier de la Commission et du Conseil. Ce sera un moyen d'apporter une réponse à la crise de légitimité du politique (*) que dénonce Giorgio Agamben et de raffermir le sens de la démocratie en Europe.
Cette actualité témoigne de la nécessité à développer une relation politique entre la Turquie, s'affirmant comme une puissance politique mondiale au même titre que l'Europe. L'avenir réside donc plus dans leur collaboration que dans l'intégration de la première dans la seconde, qui ne peut qu'aboutir à la neutralisation des deux, au profit de la Chine et des USA et de leur vision méprisante de l'humanité, confirmant l'analyse d'Agamben.