
Jérôme Lavrilleux montre que l'UMP se caractérise par sa diligence à exclure les seconds-couteaux mais pas les responsables. C'est comme dans la police. L'exécutant est toujours et forcément responsable, le donneur d'ordre jamais ou très rarement. L'adhésion au paradigme sécuritaire policier de l'UMP s'apprécie jusque dans la gestion des personnels.
Le Canard enchaîné d'aujourd'hui va ravir les députés UMP.
Hervé Liffran et Chritophe Nobilit intitulent leur article : " Les grosses astuces de Copé et ses amis pour siphonner 7 millions au groupe UMP ". C'est à ajouter au prêt de 3 millions, ce qui fait dix. " Bien sûr, quelques demi-sel se sont servis au passage. Ils vont se faire piquer, les maladroits... Cela fera rire ceux qui planquent le gros du magot." Ce sont de vrais gamins, et taquins en plus...
Le Canard démontre que Bygmalion surfacturait jusqu'à 700 fois les prix de ses prestations. Voilà un bel exemple d'une gestion saine confiée au privée... Le Canard cite parmi les heureux rétribués de Bygmalion, la société Com1+ de Guillaume Peltier, pour 123 200 euros.
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Mêler business et politique : à l’UMP, Guillaume Peltier assure la relève
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Le lecteur remarquera que Jérôme Lavrilleux fait l'objet d'une procédure d'exclusion très exceptionnellement évoquée et mise en oeuvre au sein de l'UMP malgré une actualité particulièrement très chargée, depuis quelques années.
En effet, parle-t-on à l'UMP d'exclusion de Nicolas Sarkozy ? Non. Pas plus de celle de Jean-François Copé ou Christian Jacob.
Christian Jacob a expliqué avoir fait son prêt de trois millions pour ne pas inquiéter le pool bancaire avec lequel l'UMP renégociait sa dette.
N'est-ce pas une manoeuvre visant à minimiser les problèmes de trésorerie aux yeux des créanciers ?
Il l'avoue : "Nous sommes au lendemain des élections législatives de 2012, si le groupe n'intervient pas à ce moment-là, c'est la cessation de paiement de l'UMP." ; "C'était la seule manière de le faire (...). J'ai agi comme tout président de groupe. Si je le rendais public, ça faisait la démonstration que le parti était en cessation de paiement et, à ce moment-là, les banques se retiraient, et c'était l'effondrement." (France TV info). C'est donc frauduleux, puisque que de mauvaise foi.
Les petits chefs d'entreprise bénéficient de beaucoup moins de mansuétude des banques devant le tribunal de commerce, quand ils sont poursuivis au comblement du passif sur leurs biens propres, au motif d'une faute de gestion... La France des petits patrons n'est pas celle de Monsieur Gattaz que l'Etat porte à bout de bras et à coups de millions.
MM. Gaubert, Woerth, Guéant, Dassault et Cie ne sont pas non plus menacés d'exclusion par l'UMP malgré des affaires toutes aussi graves pénalement que celle de Monsieur Lavrilleux.

Quelle est donc alors la cause de cette diligence à exclure dans un cas, Jérôme Lavrilleux, et témoigner tant de mansuétude dans les autres ?
Il y a une indignation sélective à l'UMP. Une justice de classe ? Non. Pire. Lavrilleux a avoué. Guéant aussi, mais pas de la même manière. C'était en garde à vue.
C'est la spontanéité de Lavrilleux qui paraît poser problème à l'UMP.
Le droit français n'apprécie pas les aveux spontanés. Il assimile cela à de la dénonciation. C'est toute la difficulté juridique que pose le "lanceur d'alerte".
Si les gens de l'UMP commencent à avouer spontanément, où va le parti ? L'UMP doit donc vite dissuader son personnel à suivre un tel exemple. Lavrilleux est le fusillé pour l'exemple. La guerre de 14 a enseigné aux employeurs les vertus du sacrifice... des employés. On en prend un, on le cogne comme il faut, on le jette. Et ça roule pour quelques années.
Le risque serait-il si grand que cela à l'UMP ?
C'est ce que cela laisse croire la précipitation à s'occuper rapidement d'éteindre l'incendie Lavrilleux.
Vite faire comprendre au petit personnel qu'il faut qu'il la ferme. Avec le succès des municipales, l'UMP est devenu un gros employeur de personnels administratifs. Le premier qui suit l'exemple Lavrilleux est ainsi prévenu qu'il sera barré dans une grande partie de la France. Une telle stratégie est pénalement répréhensible, mais l'actualité de l'UMP permet de voir qu'il ne va pas s'arrêter à ce genre de considération et que, depuis le temps, ce parti a des raisons d'être optimiste.
Il y aussi l'image et les conséquences sociales d'un tel précédent Lavrilleux.
Si le parti des patrons ne réagit devant un tel comportement, il encourage les salariés à prendre le chemin de BFM pour tout raconter à Ruth Elkrieff. La maïeuticienne des cadres administratifs des partis politiques deviendrait la pythie des lanceurs d'alerte.
Les donateurs, eux, ne vont pas du tout être contents. Ah, ben non ! Ce n'est pas du tout pour cela qu'ils payent. Qu'est-ce que ce Lavrilleux ? Il ne se rend pas compte du mauvais exemple qu'il donne. Déjà que les patrons n'apprécient pas les lanceurs d'alerte, s'il faut en plus voir l'UMP favoriser des comportements de témoins. Où va-t-on ? Déjà que Patrick Kron, sans lanceur d'alerte, a eu beaucoup de mal à mener son projet de destruction industrielle...
La procédure d'exclusion au sein de l'UMP contre Jérôme Lavrilleux montre également que, si les fausses factures, c'est mal, le reconnaître, c'est pire. Alors que ceux qui en ont bénéficié du fruit de ces fausses factures ne posent aucun problème.
Le parti gaulliste donne l'idée qu'il éprouve une certaine aversion pour les vérités et des évidence. La sanction d'exclusion de Jérôme Lavrilleux revient à reconnaître que pour l'UMP, dénoncer une infraction est une faute professionnelle, déontologique, un manque de loyauté...
Il existe un parallélisme. Un précédent. Et pas des moindres.
Lavrilleux est à la fausse facture et au financement de l'UMP ce qu'Aussarès fut à la torture. La France gaulliste s'est longtemps satisfaite des service de Monsieur Aussarès, jusqu'à ce qu'il parle. Il fasse un livre sur ce que l'Etat lui a demandé de faire : la torture. Son expertise en la matière a été reconnue internationalement, puisque l'Etat a envoyé Monsieur Aussarès faire des émules aux Amériques.
Aussarès a été aussitôt poursuivi pour son livre, pas pour ses actes, pourtant imprescriptibles. L'Etat a perdu.
Tout le monde savait, mais tant que personne ne disait rien, on s'en satisfait. Tartuffe. L'UMP montre son attachement au sens des responsabilités. Le problème n'est pas de faire n'importe quoi, mais d'en parler. On a vu ça dans la procédure Kerviel.
Voilà une conception qui ne favorise pas la recherche de la vérité... Les magistrats apprécieront. C'est la justice du caniveau mafieuse adaptée à la vie publique française. L'arbitrage privé paraît donc mieux répondre aux attentes des libéraux si peu enclin à accepter que tout soit dit. La justice privée a l'avantage de ne pas être prononcée en public. C'est l'avantage du mécanisme prévu dans le TTIP. Vivement qu'on se débarrasses de ce progrès contre l'arbitraire, qu'était la publicité des débats...
L'UMP ne sanctionne pas les gens qui agissent mal, seulement ceux qui le reconnaissent.
Une telle conception politique érigeant le mensonge comme condition du succès ne devrait pas être propice à intéresser les gens honnêtes. Cette évidence ne paraît pas déranger ceux qui réfléchissent à l'exclusion de Jérôme Lavrilleux. Les gens honnêtes ne les intéressent peut-être pas.
En conclusion, que l'UMP exclut Jérôme Lavrilleux n'est pas le problème, mais cela en sera un si elle le fait sans exclure personne d'autre.
La rigueur opportuniste des censeurs à requérir contre les exécutants en épargnant les donneurs d'ordre témoigne d'un archaïsme intellectuel axé sur la soumission à l'autorité, l'image du chef, même s'il est nul, bon à jeter. C'est le fond du problème qui se pose également au PS. On est bien loin de la démocratie et du débat public. Plutôt une mentalité de putschiste, d'arrière-salle de bistrot.
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Les membres du buereau politique ayant participé au débat et au vote pour engager la procédure d'exclusion :
Sont membres du Bureau politique :
Bernard Accoyer
François Baroin
Xavier Bertrand
Philippe Briand
Valérie Boyer
Dominique Bussereau
Caroline Cayeux
Eric Ciotti
Valérie Debord
Bernard Deflesselles
David Douillet
Marie-Louise Fort
Sophie Gaugain
Claude Goasguen
Anne Grommerch
Françoise Grossetête
Brice Hortefeux
Roger Karoutchi
Nathalie Kosciusko-Morizet
Gérard Larcher
Isabelle Le Callennec
Bruno Le Maire
Nadine Morano
Valérie Pécresse
Edouard Philippe
Marie-Agnès Poussier-Winsback
Laure de la Raudière
Laurence Sailliet
Thierry Solère
Catherine Troendlé
le Secrétaire général et les Secrétaires généraux adjoints ;
le Premier Vice-Président et les Vice-Présidents du Conseil national ;
le Président du Comité de la Majorité ;
le Trésorier national ;
les Porte parole, les Délégués généraux, les Conseillers politiques et les Secrétaires nationaux fonctionnels ;
les anciens Présidents de la République, le Premier ministre en exercice et les anciens Premiers ministres ;
le Président du Sénat, le Président de l'Assemblée nationale, les Présidents des groupes parlementaires de l'Assemblée Nationale, du Sénat et du Parlement européen et le Président de la délégation française au Parti Populaire Européen au Parlement Européen ;
les anciens Présidents de l'UMP ;
les 30 membres élus par le Conseil national :
Les membres du Gouvernement et de la Commission européenne adhérant à l'Union sont invités à assister au Bureau Politique.
(Source UMP : http://www.u-m-p.org/notre-parti/organisation/les-instances-nationales#)