
Aujourd’hui j’ai 54 ans, ce n’est pas une blague.
J’aurais préféré en avoir 45. J’ai beau me regarder dans le miroir, même avec le retournement des chiffres, mon âge ne diminue pas pour autant. Mon nom est Pierre Lévy comme beaucoup de mes contemporains.
Je me prénomme Pierre et je n’arrive pas à comprendre comment les années réussissent à me détériorer ainsi. J’allais écrire m’éroder, mais je ne suis pas encore aussi vieux (comprends qui peut).
C’est évident, je vieillis.
Je pensais être plus solide que cela, solide comme un roc. Pourtant je serais bientôt friable. Si j’avais écrit rock, j’aurais fait une faute d’orthographe et un pêché d’orgueil. Je ne suis pas un des Rolling Stone, même s’il semblerait qu’avec l’âge, on le soit de plus en plus… Stone.
Vous me direz, j’ai même eu sa coupe de cheveux à Stone. Parce que je préfère me dire que moi je ne change pas et que je suis comme le prix des allumettes (comprend qui peut)
Je me nomme Lévy.
Jeune, j’en avais conclu hâtivement que j’étais comme les chats, et que je pourrais bénéficier comme eux de plusieurs existences.
L’apprentissage m’a montré que s’il y avait bien des chats à neuf queues, même avec l’aide d’un petit coup de fouet, les chats n’avaient pas vraiment sept vies.
L’expérience m’a montré que si vous jetiez (je disais vous parce que je vous jure que ce n’est pas moi qui ai fait cette observation, parce que je n’ai jamais eu de chats, ou alors pas longtemps), donc si vous lanciez un chat par la fenêtre, il s’écrasait tout simplement au sol. La tâche sur la dalle de béton était d’ailleurs proportionnelle aux nombres d’étages que vous aviez gravi pour effectuer la recherche.
Si par hasard le chat retombait sur ses pattes - comme le voudrait la tradition populaire - elles étaient simplement brisées et le chat n’en réchappait pas.
Si dans la tradition juive, il paraît qu’on peut rencontrer sept fois son salut, il semble que cela soit la preuve que les chats ne sont pas Juif, et que personnellement je n’ai pas eu beaucoup de chance, ou que j’ai pris les mauvais chemins.
Mauss est pourtant un bien joli livre, mais les juifs y sont représentés en souris. De là à dire que le dessinateur Belge, Geluk est antisémite, il n’y a qu’un pas que nous ne franchirons pas, car chacun sait que nous sommes déjà au bord du gouffre, et que chat échaudé craint l’eau froide et que je n’ai aucune envie de me retrouver, souris de laboratoire. d’autant que ce n’est pas Geluk qui a dessiné les souris de Mauss.
Heureusement pour moi j’ai l’habitude de jeter l’argent par les fenêtres et pas les chats, de plus je vous assure que je n’en ai jamais eu un seul, ou alors ils m’avaient griffés. Et vu mon utilisation de l’argent, je n’ai pu m’en racheter un autre aprés.
Si vous saviez comment Haruki Murakami traite les chats dans Kafka sur le rivage, vous ne me feriez aucun reproche.
Bref, moi qui suis né dans une impasse, dans une clinique juste en face du siège du Parti Socialiste, à l’époque, ma première sortie (de la clinique) m’a obligé de traverser la rue des Martyrs ce qui aurait pu être lu comme un mauvais présage.
Heureusement je ne suis pas superstitieux. Et j’ai pu rester fidèle à moi-même. Je n’ai pas retourné ma veste depuis.
L’expérience montre pourtant que l’identité fait se retourner n’importe quel individu (surtout les espions, mais c’est une autre histoire). Essayez! Placez vous derrière un de vos amis (je dis vous, parce que je n’ai pas d’amis, ou alors il y a longtemps, et en plus c’est lui qui a sauté, et l’enquête à démontrer que c’était un accident).
Appelez votre ami par son nom ou son prénom (cela ne change pas le résultat de l’expérimentation, et à la fin, il n’y a plus un chat).
Vous pouvez constater que votre ami se retourne immédiatement (sauf dans le cas ou il est sourd et qu’il n’a pas succombé à l’attrait de la publicité qui passe toujours juste avant les épisodes de Derrick qu’ils repassent toujours en boucle pour vendre encore plus de ces appareils, d’autant qu’avec la suppression de la publicité le soir, il y a intérêt à pomper Derrick un max)
Votre ami se pose, au moment où il se retourne, deux questions en même temps (ce qui fait qu’avec le Président Gerald Ford cette expérience est toujours un fiasco.Il n’a jamais pu se priver de son chewing-gum). Il se demande si c’est bien de lui qu’il s’agit et qui l’interpelle ainsi ?
Il retourne alors l'apostrophe (de là l’expression être le Pivot du retournement). L’ami prononce alors votre nom. Comme vous êtes en face de lui, vous ne vous retournez pas. Mais comme cette absence de retournement foutrait ma démonstration en l’air, et que vous ne voulez prendre aucun risque (On a beau avoir l’esprit scientifique, il y a l’instinct de survie qui prime – enfin je crois que depuis hier les primes sont supprimées non ?). Comme vous êtes complaisant (d’autant plus que vous avez peur d’être jeté par la fenêtre comme une vulgaire souris de laboratoire) une réaction en chaîne s’ensuit. Votre ami vous appelle. Vous vous retournez ! Vous vous demandez, si c’est bien vous que votre ami appelle. Mais en même temps vous vous interrogez sur l’identité de votre ami, et vous commencez vous-même à avoir des problèmes d’identité (c’est la tête qui tourne à force de se retourner)
Est-ce que vous suivez bien dans le fond, j’en vois qui se sont retourné pour parler à leur voisin !
À oui j’oubliais, évitez que vous ami s’appelle Hortefeux ou Besson. Avec Besson le niveau baisse. (ça je crois que personne ne l’avait faite, d’autant qu’il n’est pas Ministre de l’éducation). Oui c’est vrai maintenant Hortefeux est devenu très sympathique.
Donc vous pouvez garder votre ami Hortefeux, mais s’il vous plaît pas d’ami étranger sans-papier parce que cela compliquerait tout.
Vous prononcez son nom, le nom de votre ami. Vous déclinez chacun votre identité.
Pourquoi employer un mot qui implique une baisse de niveau. Je veux bien qu’on décline avec l’âge, mais pas avec son identité (même si c’est Besson qui... mais passons). Il n’y a pas à décliner, en pareil instant, au contraire c’est le moment de vous affirmer ? Comme il y a une réaction de votre ami, vous vous retournez à nouveau et ainsi de suite.
À la fin, Vous vous retrouvez au commissariat. On vous accuse d’avoir crié votre nom sur tous les toits (parce qu’autant jeter les chats du toit) et être membre d’une bande (c’est un nouveau délit, vous n’êtes pas au courant ?)
Le lendemain, le Parisien se libère et titre Aujourd’hui en France la bande des assassins de chats a été arrêté par la police. Tout le monde est content parce qu’enfin les chiffres de la délinquance vont baisser. Malheureusement les disparitions de chats ont augmenté énormément, mais cela ne chagrine que Brigitte Bardot.
Et vous dans votre cellule vous avez une sacré crise d’identité, vous ne vous retrouvez plus dans les descriptions des journalistes et compte rendu de la police. Heureusement Julien Coupat vous remonte le moral.