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Pierre Oscar Lévy, retraité, cinéaste, scénariste, etc...

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Billet de blog 2 juin 2009

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La chute des corps

Je suis un homme chanceux, une amie m’a invitée à la générale d’un spectacle où elle danse. Hier j’ai vu Poussières de sang au Théâtre de la ville un spectacle de la compagnie Salia Nï Seydou et je suis resté sans voix.

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Je suis un homme chanceux, une amie m’a invitée à la générale d’un spectacle où elle danse. Hier j’ai vu Poussières de sang au Théâtre de la ville un spectacle de la compagnie Salia Nï Seydou et je suis resté sans voix. Ce spectacle incroyablement fort – je ne connais rien à la danse contemporaine- m’a laissé pantois. Je veux dire abasourdi, ahuri, coi, ébahi, estomaqué, interdit, interloqué, penaud, pétrifié, soufflé, stupéfait. J’ai été pris par l’émotion de la chute des corps et de la mise en scène de la cruauté des hommes. Je suis passé par une foule de sentiments que je conserverais jalousement pour mon psy, si j’en avais un en ce moment. Les figures de la chorégraphie touchent à mon intimité et me r ravivent des souvenirs que j’aurais probablement aimé laisser bien rangé par mon surmoi - qui joue facilement les hommes de mains et refoule à qui mieux mieux au-delà de la frontière de ma conscience-. Pourquoi faudrait-il faire face à nos petites cruautés quotidiennes, regarder la mise en place de notre mesquinerie ? Pourquoi mettre en lumière nos tourments propres, nos brûlures de couples pour déboucher sur notre lâcheté foncière ? Pourquoi faire le lien entre nos blessures intimes et la violence des états ? C’est ce que j’ai vécu pendant ce spectacle qui passe avec une temporalité double, trop vite – j'aurais voulu retenir chaque isntant - et suffisamment lentement pour que les différents tableaux laissent leurs empreintes.
Le spectacle commence avec un chant à cappella. Et la voix de Djata Melissa Llebou suffit à rythmer les figures des danseurs. Toute la chorégraphie va travailler d’une manière étonnante, la présence des musiciens sur la scène. À un moment, par exemple le seul blanc de la troupe interprète un étrange joueur de flûte de Hamelin, en déambulant au milieu de l’agressivité à peine domptée des danseurs.
La physique est bouleversée, la chute des corps, cent fois répétées, ne semble même pas souffrir de la résistance de l’air. La cruauté de nos existences est trop présente. Pourtant la beauté constante dessine peut-être une réponse une contre esthétique de la peur ?
Merci donc à Bénédicte Sene , Bou kary Séré, Asha Thomas, Salia Sanou, Seydou Boro, Adjaratou Ouédraogo, Ousseni Sako, Djata Melissa Llebou, Mamadou Kané, Pierre Valana, Oumarou Bambara, Adama Dembélé. Comment ces figures si grandes sur scène, retrouvaient ensuite, dans la nuit, une dimension humaine, une fois, à la terrasse du Sarah Bernhardt, le verre de bière à la main?

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