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Pierre Oscar Lévy, retraité, cinéaste, scénariste, etc...

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Billet de blog 5 novembre 2008

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Je me souviens de Barack Hussein Obama

C’est le 4 ou le 5 Octobre 1958, que la première image d’actualité s’est gravée dans mon cerveau.

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C’est le 4 ou le 5 Octobre 1958, que la première image d’actualité s’est gravée dans mon cerveau. Je me souviens de la couverture de France-Soir qui montrait, sur toute la première page, le visage en sang d’une petite fille, Delphine Renard qui avait 4 ans. Elle vivait au rez-de-chaussée de l’immeuble d’André Malraux, Avenue Victor Hugo. Mon premier souvenir, je le dois à un attentat de l’O.A.S. J’étais plus jeune que la petite victime et longtemps j’ai cru que Delphine Renard et Malraux vivaient en Algérie. Je devais avoir besoin de me rassurer.
Je me souviens très précisément de l’annonce à la radio de l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy, probablement sur Europe N°1, le 22 Novembre 1963. J’avais huit ans. J’étais dans la petite cuisine, de mes parents, j’ai vu la jeune fille au pair et ma mère toutes les deux pétrifiées par la nouvelle. Ensuite, beaucoup plus tard, ma mère me raconta, que lorsque la demoiselle s’était écriée: Au mon dieu ! Elle n’avait pas pris son visage dans ses mains, mais les avait posées sur son ventre. Je n’avais saisi que l’émotion. Je n’avais pas vu ce que je ne pouvais comprendre. Ma mère eut instantanément la certitude que la jeune fille était enceinte. La morale petite-bourgeoise permit à mes parents de la mettre à la porte, quelques semaines plus tard, sans aucun scrupule. Aucun commentaire n'expliqua la disparition de ma baby-sitter. Les moments historiques ont de drôle de conséquences !
Je ne me souviens pas d’un jour particulier en Mai 68.
Par contre, je me souviens pertinemment de ma solitude dans la nuit du 20 juillet 69. Personne, en Espagne, dans un hôtel où ma famille passait des vacances, n’a voulu m’aider à régler le poste de télévision pour que j'assiste en direct au premier pas de l’homme sur la lune. Tous le monde dormait, même le veilleur de nuit. Je n’ai jamais pardonné à mon père, en particulier, d’avoir préféré dormir, à ce moment historique.

Je ne me souviens pas de ce que je faisais le 11 septembre 1973 quand j’ai appris le coup d’État au Chili, peut-être que mon émotion a été trop forte et que j’ai tout refoulé.
Je me souviens parfaitement de l’élection de François Mitterrand. J’habitais Place de la Nation. Ma compagne d’alors sautait de joie dans chacune des deux pièces de notre petit appartement. Je trouvais stupide que la L.C.R. se forme en cortège pour marcher de la Nation à la Bastille. J’étais tout de même assez ému. Je suis resté chez moi, en grommelant que cela ne valait pas la peine de se mettre dans cet état pour un type qui ne ferait pas le socialisme. J’avais une vraie tâche importante : garder notre bébé. Sophie, sa mère, elle allait, sans moi, se faire tremper sous l’orage.
Je me souviens de m’être levé par hasard dans la nuit du 17 janvier 1991, avoir allumé machinalement la télévision et avoir vu en direct l’émission de C.N.N. se transformer en quelques secondes pour annoncer le début de la guerre en Irak. Je me souviens d’avoir eut le souffle coupé, parce que l’habillage de la chaîne était parfait. Tout était prévu d’avance. Je me souviens de tous les détails.
Comme n’importe quel Français je peux décrire toute la soirée et la nuit après la victoire à la finale de la coupe du monde de football en 1998.
Je me souviens du moment précis ou j’ai appris à la radio, le 16 octobre 1998, l’arrestation, à Londres, d’Augusto Pinochet. Je me souviens de mon étonnement quand je me suis mis à pleurer abondamment. Je me souviens de la réaction de ma petite amie qui ne comprenait absolument pas pourquoi je me mettais dans un état pareil. Chaque détail de la scène est là, gravé dans ma mémoire.
Je me souviens plus précisément encore du 11 septembre 2001, des deux heures qui ont suivi, au buerau, la découverte des images en direct à la télévision.
Évidemment je me souviendrais de cette nuit à regarder les résultats et à attendre la victoire de Barack Obama. Je me souviendrais de mon émotion, de mon illusion. C'est comme si le racisme n'avait jamais existé. Pendant que je regardais, tout seul, la télévision, c'était déjà du souvenir pré-fabriqué.
Une génération mondiale est née, constituée de tous ceux qui pourront se rappeler très précisément de cette élection.
Peut-être que ce sont ces images précises qui vont surgir, avec d’autres forcément plus intimes, juste à l’instant de ma mort comme c’est décrit quelquefois dans la littérature.
En mourant je me dirais peut-être que je n'ai vécu des moments historiques que derrière un transistor ou devant ma télévision.
Hervé Le Tellier écrit dans Le Monde que le 11 septembre 2001, il était proclamé dans les journaux: Nous sommes tous américains et qu'il avait fallu 7 ans pour que cela devienne vrai.
Peut-être que je vais me mettre à vivre vraiment des moments histoirques, c'est ce que semble vouloir raconter le storytelling de Barack Obama. Yes we can, nous allons faire l'histoire. Tout est possible ! Comme dirait l'autre. Alors si c'est possible aux U.S.A., pourquoi pas en France! Harlem Désir for Président! Un juif black (c'est Wikipedia qui le dit) c'est l'idéal. Qui dit mieux?
Au fait je me demande bien ce que je n’aurais pas vu, compris, et décrypté cette fois-ci.

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