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Pierre Oscar Lévy, retraité, cinéaste, scénariste, etc...

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Billet de blog 7 février 2009

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Voilà c’est fait. Je n’ai plus de domicile personnel, je suis retourné vivre dans ma chambre d’enfant, chez mon père. Je suis au top.

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Voilà c’est fait. Je n’ai plus de domicile personnel, je suis retourné vivre dans ma chambre d’enfant, chez mon père. Je suis au top.


Pour moi qui m’habille toujours de la même manière, c’est assez amusant, à bientôt 54 ans, de suivre la mode : c’est la crise.
Je fais contre mauvaise fortune bon cœur, je vais tourner un portrait de mon paternel avec qui, il faut bien le dire, je n’ai jamais eu de bons rapports.
Je réduis la voilure, abaisser mes dépenses. Je travaille, mais on me paye moins. Et puis je me suis mal débrouillé, je suis obligé de réintégrer la société (ASSEDIC, SS, etc.). Cela va prendre au moins 6 mois. Je ne suis pas arrivé à payer mes impôts (mais bon cela arrive même à des ministres américains putatifs). Les dettes, il y en a pour 3 ou 4 ans avant d'en sortir (si tout va bien).
J’ai besoin de dépenser moins, pour vivre plus. Mais cela c’est la réalité pour chacun d’entre nous. Au lieu, de crier à la hausse du pouvoir d’achat, il serait plus efficace de réclamer la baisse des prix à la distribution (honteusement élevés) et la hausse des prix à la production. Un contrôle vigilant des prix! Imposer le retour à une réalité des coûts! Ce serait une simple politique de bon sens. Acheter sa salade uniquement au producteur et boycotter les chaînes de magasins qui se font des profits sur le dos des producteurs et des consommateurs serait également souhaitable. Mais je m’égare.
C’est vrai aussi que j’ai du mal à trouver du travail. Je fais trop peur à certains diffuseurs (ils pensent que je ferais un film de syndicaliste comme a dit une chargée de programme de France Télévision à un copain producteur qui lui proposait mon nom pour réaliser une émission). Dans un pays où un préfet (ancien directeur de Dominique de Villepin m’a t’on dit) est viré pour quelques sifflets et non compatibilité avec le chef, il y a de quoi avoir peur quand on travaille dans un secteur aussi sensible que la télévision publique.
Enfin je dis cela avec ironie…
Il neige dehors. J’ai égaré mon appareil photo dans le déménagement, impossible de photographier ce que je vois depuis ma fenêtre. Dommage! Comme je change de géographie, j’aurais pu en garder les traces. Pas de photos de mon ancien appartement vide, pas d’images de mes cartons dans la pièce de mon enfance.
Je vis maintenant à la frontière entre le huitième arrondissement et le neuvième. J’habitais prêt des Buttes-Chaumont, parmi les moches immeubles modernes et les petits pavillons prétentieux. J’ai dégringolé de 10 points dans la hiérarchie des arrondissements, du 19 au 9, je n’ai même plus la moyenne. Quelle chute ! J’habitais à quelques rue du 20 sur 20 et aujourd’hui le 8 me guette de l’autre côté du trottoir, là où il y a un immeuble Haussmannien avec des imitations de colonnes grecques. Moi qui habite maintenant un moche immeuble de petite construction du 19ème siècle.
Quand j’étais petit, en 1958, les façade étaient noires. Là le beige crayeux domine. Merci qui ? Malraux bien sur.
La place Clichy, la plus belle place de Paris disait un personnage de Godard. Elle est toujours aussi bruyante et encombrée. À son extrémité Est, le vide du socle de la statue de Fourier a été occupé par une espèce de cabine téléphonique. Je n’arrive pas bien à comprendre quel artiste contemporain a pu réaliser un objet aussi curieux? Qu'est-ce que cela raconte? Le Gaumont Palace manque toujours en face. De l’autre côté de la place les tenanciers du Petit Poucet n’ont toujours pas compris ce qu’ils pourraient tirer comme avantage à revendiquer le passage de Pierre Bonnard dans leur établissement. Je me souviens notamment d’une magnifique toile, jouant sur les reflets et la terrasse du café. J’aimerais contempler une reproduction du tableau dans ce lieu… Mais bon. À côté du Méry, un ancien cinéma de quartier où j'allais si souvent avant qu'il ne se transforme en diffuseur de film pornographique, il y a la librairie, comme un oasis de culture au milieu de toute cette débauche de vulgarité. Et puis à quelques pas, le Cinéma des cinéastes avec son bar à vin, pour les rendez-vous.
C’est amusant comme un changement d’adresse modifie sa perception de la ville. Je ne prendrais plus certains itinéraires, je vais perdre des routines. Comment se retrouver dans les rayons du magasin d’à côté? S’apercevoir qu’il est plus facile d’aller à tel ou tel rendez-vous. Je me rapproche d’amis.
Moi qui ne me servais jamais de la ligne 14, me voici qui descend à Saint-Lazare pour l’emprunter. Je retourne place de L’Europe pour ne pas avoir à changer, puisque je dois me rendre à la station Parmentier. Quand j’étais petit, je me précipitais dans la fumée des machines à vapeur, quand un train partant de la gare Saint-Lazare passait sous cette place-pont. Perdu dans la blanche fumée, j’espérais secrètement qu’après dissipation de celle-ci, un autre paysage aurait remplacé le bitume parisien. Je rêvais de télé transportation sans savoir que la science-fiction l’avait inventé. Je désirais, à l’époque, me retrouver dans un ailleurs moins sombre et plus propice aux enfants. Partir! Aujourd’hui encore j’ai envi d’être ailleurs ! Mais me voilà revenu. La place de l’Europe ne se transforme pas. C’est le même décor que les impressionnistes avaient peint pour sa modernité.
Ailleurs le quartier change, je m’amuse assez en essayant de me souvenir des anciens magasins. Mais je n’aime pas cet endroit. J’ai habité de nombreux appartements à Paris, et je n’aurais jamais choisi de revenir ici.
Mais de fait, ma maison, c’est cet ordinateur qui contient tout mon travail, je me retrouve chez moi à chaque fois que le le branche quelque part, comme ici dans un bistrot avec Wifi. Je suis au top je vous dis.
Tant mieux puisqu’il y ait des sièges de productions amis dans les rues avoisinantes je vais pourvoir les assiéger justement.

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