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Dés le début de la neuvième étape du tour de France, entre Nantua et Chambéry , le coureur Manuele Mori a été pris dans une petite chute collective, causée par la route mouillée. Moment terrible de souffrance où le réalisateur Jean Maurice Ooghe a laissé le plan passer à l’antenne un peu plus longtemps qu’à l’accoutumée, en gardant le son direct tout au long de la retransmission. Les journalistes émus pour une fois, ne disaient plus rien et nous laissaient apprécié la terrible douleur du coureur.
Au delà de la souffrance du coureur, et de la violence de ce sport où la hiérarchie est stricte et sévère, il y a une leçon sur le son qu'il faut bien entendre.
Le son raconte énormément plus que l’image lors d’une retransmission en direct. L’homme à terre grimaçant offre un « spectacle » terrible! Ces cris de souffrance deviennent vite insoutenables et dénonce la violence de ce sport qui nous est cachée la plupart du temps. Notre empathie est toujours bien plus sollicitée par l’audition que par l’image (sauf si l’auteur des images est un artiste particulièrement doué, capable de trouver le cadrage approprié). Cette leçon vaut pour toutes les images. Je me souviens de l’assassinat de Mouammar Kadhafi dont l’image filmée par des téléphones portables a été diffusé sur toutes les chaînes de télévision, sans le son synchrone. Cette image apparaissait dans le fil du journal télévisé comme la preuve de la chute du dictateur. Si comme moi vous aviez cherché la source de l’information et trouvé la trentaine de diffusion sur You tube ou autres, vous auriez entendu sur quelques-unes d’entre elles (deux ou trois parmi une centaine) ses cris et ses paroles répétées, répétées avec une voix qu’on ne lui connaissait pas. Cet homme au moment de mourir, il avait parfaitement compris qu’elle allait être son sort, psalmodiait quelques mots en hurlant. La vérité de ses cris indiquait bien autre chose que le commentaire débité sur toutes les chaînes. Avec le son synchrone la mort du dictateur apparaissait comme une exécution sommaire. Le commentaire a souvent comme vocation de cacher le son synchrone (absent de manière délibéré), de masquer l’information plus que de révéler quoi que ce soit. Le commentaire est capable de faire dire le contraire de l’image. Je me souviens du soir de l’élection où les caméras de toutes les chaînes suivaient la voiture de Nicolas Sarkozy au sortir du Fouquet’s et en route pour la place de la Concorde… Tous les « journalistes » sur toute les chaînes parlaient du couple présidentiel, alors qu’à l’image on voyait une des filles de Cécilia Sarkozy assise pour séparer le couple qui se faisait la gueule. Un soir de second tour, après une telle victoire, l’image disait la vérité. Le commentaire avec ses phrases policées disait le contraire. Le son c’est l’ennemi de la manipulation des images.
Le pauvre Manuele Mori abandonne le tour de France, je lui souhaite ici un prompt rétablissement.
Save