
Souvent je raconte que l'image publicitaire en dit plus sur l'époque que sur le produit qu'elle devrait vendre. Un exemple aujourd'hui crève l'écran. J'en arrive même à me demander, après tant et tant d'années, comment c'est encore possible de faire ce genre de spot publicitaire.
Récit: un visage, béat, imbécile s'inscrit sur l'écran de mon téléviseur. Une musique anglo-saxonne que je n'écoute pas remplit l'espace sonore (pauvreté du travail), pendant qu'un mouvement d'appareil contourne la tête de l'individu souriant. Il y a plusieurs variations, plusieurs spots : cela peut-être un jeune homme, ou une femme un peu plus âgée, ou un autre individu niais. La constance c'est cette expression de plaisir stupide qui habite le personnage (belle performance d'acteur). Dés que la caméra passe un certain angle de prise de vue, on comprend d'où vient l'expression du visage : l'individu n'a plus de cerveau. Son crâne est scié, bien dégagé derrière les oreilles. Une agitation règne dans le vide de la boîte crânienne. La mise en scène d'éléments, en miniature, d'un jeu occupe la pauvre tête de la victime. Le film publicitaire veut nous vanter, avec humour, les qualités du divertissement généré par une boîte numérique de jeux. Comme cette boîte permet (je crois) de regarder aussi des films en H.D., nous avons là une sublime présentation d'une coupe scientifique d'un cerveau disponible. Le divertissement serait donc d'après ce spot juste de la lobotomie. On aura jamais été aussi clair.
D'ailleurs, il n'y a pas que les fabricants de boîtes magiques qui me prennent pour un con. Les politiciens aussi, Jean-François Copé, avec d'autres, m'explique (ce genre de type vous explique toujours, alors qu'ils ne font qu'exprimer une opinion, ils ne peuvent pas s'empêcher de prendre la posture du prof). Il nous explique que l'argent débloqué, par le gouvernement, pour arrêter la crise, est virtuel. Il raconte qu'il ne faut pas confondre les budgets. S'il n'y a pas d'argent pour les pauvres, le pourvoir d'achat, le logement, les retraites, la recherche, etc., c'est qu'il n'y a plus d'argent dans le budget de la France. Par contre, s'il y a de l'argent pour les banquiers et les financiers et les entreprises c'est parce que le gouvernement peut virtuellement s'endetter. Ce n'est pas pris dans la même enveloppe. Il ne faut pas confondre les budgets... C'est clair non? Ce la ressemble un peu à la chanson de Jacques Brel, Chez ces gens-là: J'ai jamais tué d'chats, Ou alors y a longtemps, Ou bien j'ai oublié, Ou ils sentaient pas bon. Ce n'est pas le même argent, ils vous disent. Moi je sais bien que les deux enveloppes dont ils parlent sont pourtant remplies par de l'argent qui sort du même endroit, de ma poche, du notre, de votre poche pas du leur. Je ferais mieux d'aller jouer avec ma boîte numérique de jeux, ou prendre mes anti-dépresseurs. (je dis cela pour le besoin du papier, Germaine! Je ne prends pas de médicaments, et j'ai pas de jeux vidéo, mais je voulais terminé en beauté.)