Décidément les mauvaises nouvelles abondent aujourd’hui. Je lis dans Libération un billet très précis de Laure Noualhat à propos de la fonte des glaciers du Groenland.
L’intitulé de son Blog six pieds sur terre fait frémir quand on lit sa biographie : Laure Noualhat : je travaille sur les sujets environnementaux depuis 2003, date de la création de la page Terre à Libé. Depuis, impossible de faire autre chose. Ayant l'étrange sensation d'être à bord d'un bolide polluant, face à un mur, je tente d'alléger chaque jour mon «empreinte écologique»... Arriverons-nous à freiner à temps?
L’émission que je produisais et réalisait sur ARTE Archimède si elle n’avait pas été arrêtée en décembre 2003 aurait probablement traité de la fonte dramatique des glaciers.
Voici les extraits les plus significatifs de ce blog que je vous conseille de visiter.
"La fonte des glaciers du Groenland s'accélère."
Gordon Hamilton, glaciologue et professeur à l'Institut du changement climatique (ICC) de l'université du Maine, a embarqué sur l'Arctic Sunrise pour trois semaines d'expérimentations. Gordon est un habitué du Groenland: il a déjà constaté en 2005 l'accélération de cinq de ses plus gros glaciers (Helheim, Kangerdlugssuaq, Petermann, Humboldt, Jacobshavn). À eux cinq, ces mastodontes rejettent environ 30% de la calotte glaciaire du Groenland dans les océans. (…)
Quel est le rôle des glaciers de l'Arctique dans la machine climatique mondiale?
Principalement, ils influencent le niveau des mers et océans. Si l'ensemble de la glace qui recouvre l'île du Groenland venait à fondre, cela représenterait l'équivalent de 7 mètres d'élévation du niveau des eaux à la surface du globe. L'île est recouverte à 85% par de la glace. Cette masse d'eau gelée est lentement transportée par les glaciers avant d'être rejetée dans les fjords sous la forme d'icebergs. Ceux-ci dérivent lentement jusque dans les océans. Au contact d'eaux plus chaudes, ils fondent ce qui va provoquer une élévation du niveau des eaux (…)
Si la première conséquence de la fonte des glaciers Groenlandais est la montée du niveau des mers sur l’ensemble de la planète, il faut noter ce qui est dit plus loin dans le billet, pour comprendre l’importance de cette information.
Comment le Giec a-t-il pris en compte le rôle des glaciers de l'Arctique?
Les scientifiques du Giec n'ont pas pris en compte le rôle des glaciers du Groenland, tout simplement parce que leur 4ème évaluation est sortie il y a plus de 18 mois et qu'il était impossible alors d'inclure les dernières données dont nous disposions. Les changements dynamiques comme l'accélération de l'avancée du glacier ou l'augmentation des températures océaniques, qui impactent aussi la fonte des glaciers, n'ont donc pas pu être pris en compte. C'est pourquoi les estimations du Giec -comme l'augmentation du niveau des océans de 30 à 60 cm d'ici à 2100- nous semblent sous-estimées. Politiquement, la façon dont on anticipe une élévation de 30 cm n'est pas du tout la même que lorsqu'il faut anticiper une élévation d'1 mètre ou plus.
Le Giec a prudemment évité d’inclure des phénomènes insuffisammen étudiés dont la nouveauté stupéfie les scientifiques spécialistes. Je me souviens qu’il y a dix ans, on me répondait qu’il n’y avait aucun danger que les glaces du Groenland fondent. Mais revenons à l’interview de Libération.
Comment se comportent les glaciers groenlandais?
Ce qui nous a le plus surpris, c'est que sept des glaciers les plus gros de l'île ont accéléré leurs mouvements. Cela a commencé, il y a cinq ans environ. Par exemple, le glacier Kangerdlugssuaq avançait de 5 km par an en 2003, mais en 2005, il a bondi de 14 km! C'est une accélération pour le moins impressionnante! D'autres accélèrent de la même façon, et au même rythme, ce qui nous amène à penser que ce sont les mêmes mécanismes qui conduisent à ces changements.
L'élévation du niveau des eaux est-elle la seule conséquence de la fonte de la calotte groenlandaise?
C'est la plus évidente, mais il y a beaucoup d'autres choses. Chaque déversement de glace est un rejet d'eau douce, solide et froide dans des eaux salées. La fonte des glaciers modifie les milieux, et surtout l'équilibre de la salinité des océans, spécialement dans l'océan Atlantique nord. Or, la partie de l'océan atlantique nord qui touche le Groenland est très importante. C'est là que l'on trouve la courroie océanique qui transporte la chaleur à travers toute la planète. Avec plus d'eau fraîche, la courroie risque de ralentir voir de se gripper, ce qui peut avoir des conséquences: moins de chaleur transportée des eaux subtropicales jusqu'en Europe. Cela peut très bien mener à un refroidissement global du climat européen. Je reconnais que c'est un effet guère évident du réchauffement global.
Il faut comprendre que ce que le scientifique appelle la courroie océanique n’est autre que le phénomène de flux d’eaux qui amorce la formation d’un système de courants marins qui circulent dans l’ensemble des océans et qui régulent le climat de la planète en interagissant avec l’atmosphère. J’ai réalisé une captation de conférence qui est distribuée par Gallimard en DVD, où Catherine Jeandel, océanologue, explique très bien comment le réchauffement climatique pourrait conduire au refroidissement du climat en France. Si les courant marins cessaient de circuler comme ils le font. La France cesserait d’être pays tempéré, en l’absence des eaux chaudes qui viennent de l’équateur, à savoir le Gulf Stream. La fonte des glaciers Groenlandais aurait pour conséquence d’offrir un climat canadien en France. Sans Gulf Stream, il ferait moins 40° à Paris en hiver, c’est pourquoi je ne parle jamais de Global Warming mais de dérèglement climatique.
Comme de toutes manières, ces changements sont énormes, plus personne ne peut prévoir. Il reste à serrer les fesses, ou mieux encore parler des primaires à gauche ! Cela détend.
D’ailleurs l’excellent papier de libération raconte.
Vous savez, la science parle d'elle-même en ce moment et il est inutile d'être un spécialiste pour comprendre que la magnitude des changements en cours est énorme. Les changements sont tellement rapides, dans tous les domaines. Rien qu'au Groenland, la fonte des glaces de l'Arctique et du permafrost s'accélèrent. D'ailleurs, c'est assez frustrant de constater la rapidité de ces changements dans l'environnement pendant que les décideurs politiques se demandent encore comment agir le moins brutalement possible. Obsédés par leurs échéances électorales, ils semblent incapables de prendre les décisions à la hauteur des enjeux.
Merci à Laure Noualhat pour son travail.