Lundi 22 avril, nous nous sommes rendues avec une petite dizaine de participantes de l’atelier de la Maison des femmes de Saint-Denis (93) à la Galerie F.O.R.M.A dans le IIIe arrondissement de Paris. La Maison des femmes était invitée à visiter l'exposition « Resilient Currents : On Communal Re-Existence » organisée par l’association Thanks for nothing.
En préfiguration de La Collective, futur centre de création et de solidarité, qui sera abritée à la Façade Denfert (sur le lieu de l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul dans le XIVe), l'association Thanks for Nothing présentait sa première exposition internationale autour des pratiques artistiques engagées liées à l’Amérique centrale et du Sud.
La commissaire invitée, Ilaria Conti y avait rassemblé les œuvres de Seba Calfuqueo, Carolina Caycedo, Colectivo Ayllu, Patricia Dominguez, Regina José Galindo, Sonia Gomes, Juliana Góngora, Jorge González Santos, iki yos piña narváez, Guadalupe Maravilla, Noé Martinez, Nomasmetaforas, Rangiñtulewfü, RojoNegro, Angélica Serech et Maria Sosa.
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La richesse des œuvres et des cultures, la multiplicité des formes d’expression et des matériaux, les combats que mènent les artistes et leurs façons de les transmettre… tout cela nous semblait pouvoir enrichir notre atelier « Prendre mots ».
Dans la première salle, un tissage volumineux mêlant tissus et cheveux est suspendu au plafond. Une œuvre d’Angelica Serech. Les femmes observent attentivement, elles touchent l’œuvre, s’interrogent et font des liens entre la culture Maya de l’artiste, et leurs propres cultures, celle de Côte d’Ivoire, celle des Berbères...
Parmi les autres œuvres exposées, une vidéo, signée Seba Calfuqueo, est projetée dans une petite salle. Le seul son qui sort vient de deux casques disposés sur un socle, toutes ont l’air hypnotisées par ces images d’eau qui coule, qui ruisselle. Ce bruit, « c’est apaisé et apaisant ».
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Dans la dernière salle, l’installation du collectif Nomasmetaforas propose sous une lumière bleue, un tissu végétal yanchama (arbre) rempli de plantes médicinales. Des odeurs émanent de cette sculpture suspendue. Chacune fait attention à chacune pour que toutes aient une place et profitent de l'expérience. Puis on s’allonge ensemble pour goûter ce moment.
A l’issue de la visite, un débat autour du terme de “Résilience”, mentionné dans le titre de l’exposition, est lancé. Louise parle pour le groupe et explique à la femme qui a assuré notre visite que c’est un mot qui ne plaît pas. « On n’a pas à être résiliente ! », car explique-t-elle en subsance, c’est comme si on nous obligeait à aller mieux. On a le droit d’être en colère, de ne pas vouloir passer à autre chose. On apprend à vivre avec nos histoires et ce n’est pas pour autant qu’il faut les oublier et qu’elles ne nous font plus rien.
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Une femme parle ensuite de l’atelier « Prendre mots» et à quel point ça l’aide à extérioriser beaucoup de sentiments. Une autre explique qu’avant elle n’osait pas écrire. Elle n’a aucune photo d’elle, seulement de son enfance, et puis plus rien. Jusqu’à l’atelier, où elle a de nouveau des « preuves de son existence ».
A la fin de la visite, une des femmes dit qu’elle a hâte d’être à la retraite pour reprendre ses études. Et apprendre l'anthropologie.
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La Collective ouvrira ses portes en 2028. Sur plus de 3 500 mètres carrés, ce lieu incarnera la vision portée par Thanks for Nothing depuis sa création en 2017. Elle reflètera aussi la richesse du collectif constitué par les acteurs culturels et solidaires impliqués dans le projet : Emmaüs Solidarité, La Loge et Thanks for Nothing. Expositions, résidences d’artistes, parcours d’œuvres extérieurs, conférences, festivals, concerts, spectacles, ateliers de co-création, visites pédagogiques… seront proposés.
Le 22 avril, la visite s'est effectuée au centre d’exposition F O R M A, 127 rue de Turenne, 75003 Paris.
Merci à Zoé Aeschbacher pour la prise de notes.
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L’atelier « Prendre mots » vise à permettre aux femmes vulnérabilisées et victimes de violence, prises en charge dans le parcours de soin de la Maison de femmes de l’hôpital Delafontaine, de s’exprimer dans le cadre d’exercices d’écritures encadrés. Ce n’est pas un groupe de parole mais une espèce de cercle de jeux de mots, animé par la photographe et autrice Louise Oligny, la dessinatrice, créatrice et autrice Clémentine du Pontavice et la journaliste Sophie Dufau. Pour retrouver tous nos posts, cliquez ici.