Dans son dernier billet, le "chercheur" en sciences sociales et "intellectuel" autoproclamé de la gauche libertaire Philippe Corcuff s'en prend (de nouveau) violemment à Jean Luc Mélenchon, renvoyant celui-ci dos à dos avec Emmanuel Macron (https://blogs.mediapart.fr/philippe-corcuff/blog/300617/gauche-d-emancipation-entre-american-psycho-macron-et-general-boulanger-melenchon/commentaires).
Accusant Mélenchon, rien de moins, d'être un "général Boulanger 2.0", mêlant "thèmes de la gauche républicaine et de la droite nationaliste", un "alien ici au cœur de la gauche et prétend(ant) même la diriger, jusqu’aux résistances sociales", adepte des "roulements de tambour franchouillards" teintés de "quelques accents germanophobes, sans oublier la valorisation militaire d’un groupe parlementaire « discipliné »", un " Tartarin ès caporalisation" plein "d'aigreur" et nostalgique du "« c’était mieux avant ! ", dont les "discours et (...) postures" met(tent) en forme politiquement des frustrations dans la nostalgie d’un passé fantasmé". Mélenchon et Macron même combat pourrait-on dire avec les mots de Philippe Corcuff!
D'ailleurs, ce dernier de poursuivre : "les césarismes macroniste et mélenchoniste pourraient involontairement donner la main au césarisme lepéniste pour 2022 (...) le deuxième par une démarcation insuffisante vis-à-vis des penchants réacs de l’air du temps alimentant le confusionnisme ambiant (fétichisation des « solutions nationales », valorisation du chef, vision fermée de la laïcité ne permettant pas de relever les défis actuels du pluriculturel car en rupture avec l’esprit de tolérance propre à la loi de 1905". Conclusion : Mélenchon travaille à la victoire de Marine Le Pen en 2022!
Ce qui frappe, hormis la violence des attaques ad hominem, c'est la focalisation de Philippe Corcuff sur la personne de Jean Luc Mélenchon et sa détestation du personnage. Comment le comprendre ?
Peut-être par la position qu'occupe Philippe Corcuff dans le champ intellectuel et dans le champ politique. Universitaire à Science Po et essayiste, Philippe Corcuff écrit beaucoup. Un temps bourdieusieu, il a essayé de capitaliser sur la critique des théories de Pierre Bourdieu pour monter en grade dans l'institution. Sans succès. Se présentant également comme militant politique, il a appartenu à plusieurs organisations politiques, du PS à l'extrême gauche, au fil des années, et a toujours sévèrement critiqué ces mêmes organisations après les avoir quitté. Là encore, avec peu d'écho. Enfin, se présentant lui-même comme libertaire, tentant de vulgariser et promouvoir ce courant de pensée, Philippe Corcuff a toujours adopté la position de l'intellectuel surplombant et donneur de leçon, disant ces "vérités" à la gauche ou aux gauches, jamais assez libertaires et émancipatrices à ses yeux.
Que reproche finalement Philippe Corcuff à Jean Luc Mélenchon ? De parler au peuple! D'être dans une "opposition entre « le peuple » et « les élites »". D'oser vouloir le représenter et le défendre dans l'arène politique! De se présenter à des élections et de tenter de mobiliser ce peuple "absent", ces "fameuses" classes populaires dont les chercheurs en science sociale et "intellectuels" de gauche aiment tant se délecter, ces oubliés, ces "invisibles" (ce qui souvent les arrange bien d'ailleurs) qui permettent (aux intellectuels encore) de (longuement) disserter sur les politiques d'émancipation du peuple (mais sans lui svp). On peut encore citer le même Philippe Corcuff dans le texte, dans le même billet de blog, pour qui l'urgence est qu"il ne s’agit plus seulement de se détacher (des dominations), mais aussi de s’attacher autrement aux mondes naturels menacés. Il faudrait également tenir compte du poids impersonnel des dominations sur nos vies quotidiennes davantage que des têtes largement interchangeables à faire tomber, se réinsérer dans l’horizon internationaliste d’un autre monde possible et, surtout, prendre comme points de départ les initiatives citoyennes, les mouvements sociaux et les expériences alternatives en convergence, dans le souci du contrôle d’une verticalité limitée par des liaisons horizontales". On reste scotché! Devant tant de jargon, vide et incompréhensible.
Finalement, Jean Luc Mélenchon (a) fait, avec d'autres, le travail que les intellectuels de gauche (dont Philippe Corcuff adopte tous les travers) ne font plus : parler du peuple et parler au peuple, le mobiliser, faire œuvre de pédagogie, élever son niveau de conscience et de culture, redonner sa dignité à ces ouvriers, ces chômeurs, ces électeurs qui votaient FN pour certain-es et qui ont donné leurs suffrages à la FI, l'entraîner dans un mouvement qui vise à l'auto-émancipation et passe par l'auto-organisation (si chères à Philippe Corcuff) au sein de la France insoumise. Le problème est donc que Jean Luc Mélenchon marche sur les plates bandes de Philippe Corcuff et des intellectuels de gauche et ça cela ne passe pas... Pas assez élitiste, pas assez universitaire, pas assez feutré, trop "bruit et fureur". Peut importe que Jean Luc Mélenchon soit licencié de philosophie et est écrit de nombreux ouvrages, peu importe son lyrisme et sa capacité à transporter son auditoire à chaque meeting... ou plutôt à cause de ça!
Pour terminer, on pourrait conseiller à Philippe Corcuff de suivre la voie empruntée par un jeune chercheur qu'il connaît bien et qu'il a lui-même édité (http://editionstextuel.com/index.php?cat=020407&id=647). Il est grand temps, en effet, que l'on mette en œuvre "la redistribution radicale des tâches de réflexion et d’exécution dans nos sociétés" permettant d'assister au "suicide des intellectuels". Puisse Philippe Corcuff être le premier.