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Billet de blog 16 mars 2021

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Les salariés de première ou deuxième ligne: L’illusion d’une prime

Le premier ministre Jean Castex a affirmé hier après une réunion avec des syndicats que les entreprises pourront offrir une prime pouvant aller jusqu’à 2000 euros aux salariés de seconde ligne qui ont poursuivi leurs activités pendant le premier et deuxième confinement, s’exposant ainsi à des risques de contaminations au Covid-19

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   À l’issue d’une réunion avec des partenaires sociaux qui s’est tenue hier en visioconférence, Jean Castex a annoncé  que les entreprises pourront à nouveau verser en 2021 une prime défiscalisée et exonérée de cotisations sociales de 1.000 € pour « tous les salariés ».

   « Il sera possible d’en augmenter le montant jusqu’à 2.000 € pour les entreprises et les branches qui auront, soit conclu un accord d’intéressement d’ici la fin de l’année, soit ouvert une négociation sur la valorisation des métiers dits de deuxième ligne, qui devront être les bénéficiaires privilégiés de cette prime », a précisé le premier ministre.

    Cette nouvelle prime qui s’adresse également aux « oubliés » de la première et deuxième vague ne revêt cependant  aucun caractère astreignant pour les entreprises quand bien même certaines d’entre elles peuvent avoir des salariés  se trouvant en première ligne.

   Les entreprises  qui n’ont pas les moyens ou qui ne réalisent pas des marges bénéficiaires importantes ne pourront tout simplement pas rétribuer les efforts de leurs salariés.

    C’est le cas de Mamadou, un agent de sécurité, qui travaille dans un service d’urgences dans un hôpital qui recevait et guidait des patients covid lors de la première vague. Mamadou, comme plusieurs de ses collègues, a été contaminé par des patients covid:

    «  C’était lors de la première vague au moment où la France entière était confinée. J’étais en contact direct avec des patients covid qui affluaient aux urgences. Je ne portais qu’un masque chirurgical. Pas de blouse ni de lunettes de protection. J’ai chopé le covid. J’ai été arrêté pendant une semaine. J’ai repris après mon travail au même poste. Et je n’ai reçu même pas un euro en guise de prime », nous a confié Mamadou.

       Avant d’ajouter: «  Karima qui fait le ménage dans les services covid, elle, a reçu deux cents euros. Je connais des fonctionnaires de l’hôpital qui n’étaient pas dans des services covid qui, eux, ont reçu plus de 1000 euros ». 
     Abdelkader, un agent de sécurité travaillant dans un hôpital dans la banlieue proche de Paris, s’est fait contaminer sur le lieu de son travail, lors de la deuxième vague. Il a été hospitalisé durant dix jours:
   
    «  Le médecin m’avait dit de rester chez moi. Résultat: J’ai contaminé ma femme. Heureusement qu’elle n’a pas eu de formes graves parce que c’est elle qui s’occupait de moi. Un soir, j’arrivais plus à respirer. J’ai été hospitalisé durant dix jours. Un enfer. J’ai cru que j’allais mourir ».

     -Avez-vous reçu une prime ?

     - Abdelkader esquisse un sourire avant de nous lancer :

     «  Tu parles ! Aussitôt guéri, j’ai repris mon poste. Même pas 5 euros de prime, même pas un sandwich kebab offert en reconnaissance de notre travail [rires] D’ailleurs, dans notre service, on est plusieurs à avoir chopé le virus. Heureusement, il n’y a pas eu de mort parmi nous. Mais ailleurs, oui, il y a des agents qui sont décédés  du covid..La prime, j’y pense même pas ».

    Pour ces salariés, souvent sous-payés, ces primes sont juste une illusion. Un effet d’annonce sans une réelle volonté de reconnaissance. Le gouvernement aurait pu faire un geste plus fort en annonçant que ces primes seraient déduites des impôts de leurs entreprises. 

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