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Billet de blog 1 mars 2011

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Réconciliation, pardon, réparation, après le génocide au Cambodge

Communication présentée lors de la rencontre organisée sur ce thème par Littérature et atelier de réflexion contemporaine (L&ARC), à Romainmôtier, Suisse, 25-27 février 2011. Voici bientôt 25 ans que j'entretiens avec le peuple du Cambodge une relation d'amitié qui confine à la complicité sans jamais tomber dans la complaisance. J'y ai effectué de multiples séjours. J'y ai vécu et travaillé et j'effectue encore actuellement des séjours prolongés comme conseiller du gouvernement. Pour ce qui concerne le sujet de notre rencontre, je souhaite rappeler que j'ai été pendant plusieurs années responsable au bureau de l'UNESCO à Phnom Penh d'un progamme intitulé « culture de paix au Cambodge, » ce qui m'a amené à rencontrer tous les milieux d'une société qui demeure à bien des égards une société éclatée. Je voudrais, en préambule de mon propos, souligner à quel point il me semble important de demeurer conscient, quand on parle d'un pays comme celui-là, que nous le regardons avec des yeux d'Occidentaux et que ces lunettes-là peuvent nous amener à ne pas voir la réalité dans toute sa spécificité. Aux trois mots, réconciliation, pardon, réparation,font immédiatement écho, dans mon esprit, trois autres mots que je veux associer aux premiers non pas, pour les opposer, mais pour les mettre en parallèle : impunité, oubli, indemnisation. Il me paraît en effet nécessaire d'appréhender les deux faces d'une même problématique, thème par thème. Comment concilier réconciliation et lutte contre l'impunité ? Comment importer en terre bouddhiste une notion de pardon assimilée à celle de l'oubli ? Comment faire la part des choses entre la question de la réparation et les attentes en termes d'indemnités ? 

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Communication présentée lors de la rencontre organisée sur ce thème par Littérature et atelier de réflexion contemporaine (L&ARC), à Romainmôtier, Suisse, 25-27 février 2011.

Voici bientôt 25 ans que j'entretiens avec le peuple du Cambodge une relation d'amitié qui confine à la complicité sans jamais tomber dans la complaisance. J'y ai effectué de multiples séjours. J'y ai vécu et travaillé et j'effectue encore actuellement des séjours prolongés comme conseiller du gouvernement. Pour ce qui concerne le sujet de notre rencontre, je souhaite rappeler que j'ai été pendant plusieurs années responsable au bureau de l'UNESCO à Phnom Penh d'un progamme intitulé « culture de paix au Cambodge, » ce qui m'a amené à rencontrer tous les milieux d'une société qui demeure à bien des égards une société éclatée.

Je voudrais, en préambule de mon propos, souligner à quel point il me semble important de demeurer conscient, quand on parle d'un pays comme celui-là, que nous le regardons avec des yeux d'Occidentaux et que ces lunettes-là peuvent nous amener à ne pas voir la réalité dans toute sa spécificité.

Aux trois mots, réconciliation, pardon, réparation,font immédiatement écho, dans mon esprit, trois autres mots que je veux associer aux premiers non pas, pour les opposer, mais pour les mettre en parallèle : impunité, oubli, indemnisation.

Il me paraît en effet nécessaire d'appréhender les deux faces d'une même problématique, thème par thème. Comment concilier réconciliation et lutte contre l'impunité ? Comment importer en terre bouddhiste une notion de pardon assimilée à celle de l'oubli ? Comment faire la part des choses entre la question de la réparation et les attentes en termes d'indemnités ?

La tragédie du peuple cambodgien cumule les horreurs de la guerre civile avec celles d'une guerre régionale et d'une guerre idéologique où, chaque fois, appuyés par des acteurs étrangers qui se battent par Cambodgiens interposés, ce sont les Cambodgiens qui s'opposent entre eux. La guerre 70-75 oppose un camp pro-occidental à un camp communiste, le régime du Kampuchea démocratique voit s'opposer des perceptions rivales de l'idéologie communiste à imposer à un peuple réduit en esclavage, la séquence 1979-1991 infligera aux Cambodgiens ce que Zbigniew Brzezinski, le conseiller à la sécurité de Jimmy Carter, a appelé une « guerre par procuration » entre le camp sino-occidental et le camp soviétique.

Vous en conviendrez, cela fait beaucoup pour un petit peuple qui jusque-là, pour l'essentiel, n'avait connu que la paix. Avec l'arrivée de la puissance coloniale en 1863, le pays s'était mis à l'abri des conséquences malheureuses pour son indépendance et son intégrité territoriale des querelles de succession dynastique. Il avait connu une décolonisation en douceur. Mais le régime paternaliste qui ensuite a dominé jusqu'en mars 1970 n'avait guère fait progresser dans la population des concepts aussi fondamentaux que l'Etat de droit, la séparation des pouvoirs, les libertés individuelles et les droits fondamentaux de la personne. De même, une équitable redistribution de la richesse produite ne semblait guère s'opérer au-delà de quelques quartiers des principales villes du pays. Et c'est ce peuple qui est plongé dans l'horreur jusqu'à l'incandescence durant la décennie soixante-dix. Ensuite, pendant une autre décennie, il est l'instrument malheureux des enjeux géopolitiques internationaux, son sort étant le dernier souci des grandes puissances, démocratiques ou pas.

Aujourd'hui, c'est aux survivants d'une telle tragédie que des bonnes âmes occidentales parlent en même temps de lutter contre l'impunité et de travailler à la réconciliation. C'est aux victimes qu'on demande à la fois de pardonner, mais de ne pas oublier. C'est à ceux qui ont tout perdu qu'on parle de réparation en excluant toute indemnisation. Permettez-moi de souligner que les concepts à l'ordre du jour de notre rencontre - et je n'en fais pas grief aux organisateurs - appartiennent bien davantage à la manière dont nous projetons nos espérances qu'aux situations concrètes auxquelles les Cambodgiens sont confrontés depuis plusieurs décennies.

Réconciliation et lutte contre l'impunité

Mais de quoi s'agit-il quand, de 1979 à 1991, pendant les douze années qui ont suivi les crimes du Kampuchea démocratique, toute demande de justice de la part des survivants fut rejetée par un Occident déjà très soucieux de ses relations avec la Chine ? Et qu'avec le soutien de pays comme la France, ce sont les bourreaux qui ont représenté leurs victimes à l'ONU ? Et qu'avec le soutien des démocraties occidentales, l'armée de Pol Pot fut, à deux reprises, reconstituées dans des camps en Thaïlande ? Et que les accords de paix signés en 1991 à Paris non seulement ignoraient des termes comme « génocide » ou « crime contre l'humanité », mais offraient aux Khmers rouges une amnistie totale et la possibilité de réintégrer en toute impunité la vie politique nationale. Deux de leurs plus importants dirigeants siégaient au sein du Conseil National Suprême chargé d'incarner, pendant la période transitoire, la souveraineté et la légitimité du Cambodge. Dans un tel contexte, le peuple cambodgien n'a pas eu le choix. Il a été obligé de s'habituer à revivre peu à peu, tantôt en cotoyant d'anciens bourreaux, tantôt en supportant les méfaits d'une situation de guerre à laquelle l'ONU n'a pas été capable de mettre fin. La pacification et le degré de réconciliation qu'elle réclame, il a fallu attendre la fin des années quatre-vingt dix pour qu'elle se fasse. Et les Occidentaux n'y sont pour rien. La lutte contre l'impunité et le jugement des dirigeants Khmers rouges encore en vie, il a fallu attendre qu'on puisse s'emparer de leur personne pour en commencer le processus.

Aujourd'hui, certains, parfois les mêmes qui imposèrent les Khmers rouges dans le processus de paix, parfois des ONG occidentales qui, sous des cieux africains, ont beaucoup plaidé pour la réconciliation avec les Blancs, réclament d'autres inculpations que celles qui concernent les 5 prisonniers des Chambres Extraordinaires au sein des Tribunaux Cambodgiens (CETC). Il n'est plus, de leur part, question de réconciliation. Celle-ci ne serait même qu'un mauvais prétexte pour refuser la lutte contre l'impunité. Car, à leur yeux, la pacification ne serait en rien menacée par des poursuites visant des individus qui ne se trouvaient pas à la direction du Kampuchea démocratique. Ayant visité certains des anciens bastions Khmers rouges, j'apporte confirmation que la pacification réalisée il y a moins de quinze ans, demeure conditionnée par l'absence de toute poursuite supplémentaire. Il y a un pacte passé entre les officiers, les soldats khmers rouges et leurs familles au terme duquel leur réintégration dans la société cambodgienne et l'arrêt de toute forme de rebellion armée s'accompagne de la limitation des poursuites aux « hauts dirigeants du Kampuchea démocratique et principaux responsables des crimes et graves violations du droit pénal cambodgien, des règles et coutumes du droit international humanitaire ainsi que des conventions internationales reconnues par le Cambodge » (art 1 de la loi sur les CETC).

Je voudrais ajouter un élément qui échappe presque toujours aux Occidentaux : toutes les familles cambodgiennes ont été déchirées par la tragédie des années soixante-dix. Des membres d'une même famille se sont retrouvés dans les deux camps aussi bien pendant la guerre 70-75 que pendant le régime des Khmers rouges et même pendant les années quatre-vingt. Depuis la pacification, les familles se sont reconstituées autour des survivants et tentent de tourner la page. Pour ces familles, la paix retrouvée passe avant toute autre considération.

Ceux-là qui en 1991 ont offert aux Khmers rouges la possibilité de réintégrer la société et même, éventuellement, de revenir au pouvoir réclament aujourd'hui des poursuites qui sont susceptibles de mettre en danger une pacification qu'ils ont été incapables de réaliser.

Ceux-là qui ont refusé que la Justice pénale soit saisie aussi pour les crimes dont le peuple cambodgien a souffert avant 1975 et après 1979, exigent aujourd'hui des Cambodgiens une Justice qui n'écarte aucun Cambodgien. Mais ils ont fait en sorte que ne soient pas poursuivis les acteurs politiques américains, sud-vietnamiens et thaïlandais qui ont tout tenté pendant les années cinquante et soixante pour déstabiliser le Cambodge de Norodom Sihanouk. De même restent à l'abri les complices américains du coup d'Etat du 18 mars 1970 qui a plongé le pays dans la tragédie et les décideurs américains responsables de ce que le Cambodge demeure dans l'histoire de l'humanité le pays le plus bombardé. On n'inquiètera pas davantage les dirigeants chinois qui ont envoyé des milliers de conseillers soutenir le régime de Khieu Samphan et Pol Pot. Et, de la même manière, aucune poursuite ne sera entamée contre ceux qui ont privé pendant plus de dix ans un peuple de survivants de toute assistance et qui ont soutenu les Khmers rouges et les ont réarmés.

Je m'interroge : pensons-nous vraiment que les Cambodgiens ne perçoivent pas nos incohérences ? Ne devrions-nous pas nous poser la question de savoir s'ils ne sont pas lassés des leçons contradictoires que nous ne cessons de leur donner ? N'est-il pas temps de les laisser enfin libres de décider eux-mêmes de la manière dont ils entendent sortir de cette période tragique ? Le Cambodge est une démocratie en construction. Un processus ralenti par la lenteur incontournable de la reconstitution des ressources humaines, par un rapport au droit traditionnellement ténu, par une impunité qui, comme sous Sihanouk et Lon Nol, protège les puissants, par la réouverture il y a seulement 21 ans d'une faculté de droit, par une corruption que l'on commence seulement à combattre. Laissons ce peuple concilier, dans le respect des règles de droit, lutte contre l'impunité et réconciliation.

Pardon et oubli

C'est peut-être un truisme, mais il me plaît de rappeler, à propos d'un peuple imprégné d'annimisme, d'hindouisme et de bouddhisme, que la notion de pardon salvateur est essentiellement judéo-chrétienne, qu'elle n'existe pas dans la culture bouddhiste et qu'il s'agit donc, au Cambodge, d'une notion importée.

Par contre, la croyance dans le karma joue un rôle déterminant dans la vie d'un Cambodgien. Et de ce point de vue, il me paraît intéressant de citer Mme Claire Ly, une survivante installée en France depuis 1980 : « Les Khmers rouges ont bien instrumentalisé la croyance dans le karma de la société khmère. De 1975 à 1977, combien de fois ai-je entendu les responsables khmers rouges et certains présidents des Sahakor affirmer que les victimes méritaient leur sort. C'était la façon facile et terrifiante de justifier la violence et les crimes commis : si les victimes sont responsables, il n'y a plus de criminels, plus de tortionnaires... On a ainsi manipulé le peuple. »

Le pardon. Quel est le sens de ce mot ? S'il s'agit d'absoudre au sens commun ou théologique du mot, en présence d'un génocide ou de crimes contre l'humanité, le pardon est impossible. Il ne peut être ni sollicité, ni accordé. Car un individu seul n'est en rien légitime pour le demander au nom du régime qui les a ordonnés, ni une victime seule pour le recevoir au nom de toutes les victimes.

On se trouve ici confronté aux limites de ce qu'une société organisée, au-travers de procédures judiciaires, peut apporter aux victimes de telles tragédies. Trop souvent et à tort, on attend de la Justice pénale qu'elle apporte plus qu'une sanction à des faits établis. La mission de la Justice, c'est de constater des faits, de reconnaître leur caractère criminel, d'identifier leurs auteurs et de décider d'une sanction prévue par le droit au moment de la commission de ces faits. Ce n'est pas le rôle d'une Cour pénale d'aider les victimes à surmonter leurs souffrances. Comme je présume que Me François Roux va aborder cette question, je ne m'étendrai pas.

« Nous avons refusé ce que voulait en nous la bête » disait Malraux. La bête est en chacun de nous. Nous y résistons ou nous lui donnons libre cours. Notre éducation et la société nous encadrent et contribuent à cette maîtrise de la bête, de cette part d'inhumanité qui est en nous. Mais on connaît des circonstances où les plus hauts responsables d'une société, délibérément, ouvrent les portes à la bête.Et l'irréparable est commis.

Il peut se trouver, par la suite, que la conscience d'un tueur s'éveille et que le remords s'installe en lui. Il n'y a aucun doute à cet égard. Nous disposons de nombreux témoignages d'anciens Khmers rouges qui vivent mal ce qu'ils ont fait. Au point, parfois de ne plus vouloir vivre du tout. Mais quel effet pour la société ? Si le remords ne s'exprime pas publiquement et surtout s'il n'est le fait que d'exécutants et non de dirigeants prêts à payer le prix des crimes qu'ils ont commis, en quoi ce remords contribue-t-il à apaiser la souffrance des victimes ?

Dans le cas qui nous occupe, ce qui est motif de souffrance pour les survivants, ce n'est pas de connaître le détail des crimes commis. Ils le connaissent mieux que personne. Ce qu'ils attendent , c'est une réponse à la question : Pourquoi nous avoir traités de la sorte ? Pourquoi ce déni d'humanité ? Ils n'attendent pas un pardon qui n'a pas le moindre sens. Ils attendent que soient reconnus les crimes dont ils ont été victimes. Ils attendent que les responsables de ces crimes assument leurs actes. Et soient punis. Mais ils savent qu'aucune sanction n'effacera les souffrances subies.

Il n'y a pas de place pour le pardon comme il n'y a pas de place pour l'oubli. Il s'est trouvé dans l'histoire d'un peuple des femmes et des hommes qui ont marqué de leur empreinte sanglante la destinée de ce peuple. Que cette tragédie soit reconnue, expliquée et sanctionnée, c'est ce qu'attendent des survivants dont la souffrance a été niée pendant plus de trente ans.

Réparation et indemnisation

Même si on trouve au Cambodge les voitures les plus luxueuses et les plus chères du monde, même s'il y a une minorité de gens extrêmement riches, la grande majorité de la population est pauvre. Et la grande majorité des survivants est pauvre. Il est donc naturel que le mot réparation ait été entendu par d'aucuns par celui d'indemnisation. D'autant que les informations sur l'indemnisation des victimes de la Shoah circulent et que les Cambodgiens savent que des centaines de millions de dollars ont été réunis pour indemniser les victimes encore en vie de la barbarie nazie.

Ni dans les accords de paix de 1991, ni dans l'accord entre l'ONU et le gouvernement cambodgien pas plus que dans la loi créant les CETC, rien n'a été prévu ni en matière de réparation morale et collective, ni en termes d'indemnisation des victimes.

On nous dira que la communauté internationale a consenti de grands efforts avec l'opération ONU de 1991-1993 et ensuite avec les aides apportées chaque année au Cambodge depuis lors. Et ce n'est pas contestable. Mais cela suffit-il ?

De 1979 à 1992, ce pays de survivants a été isolé du reste du monde comme rarement peuple fut isolé de la communauté internationale. Conséquence du départ des ambassades et des organisations internationales à la fin de la guerre 1970-1975, conséquence de la volonté autarcique du Kampuchea démocratique allant jusqu'à se retirer d'organisations internationales techniques comme l'Union postale internationale, conséquence surtout de l'embargo international décidé sous la pression d'une coalition sino-occidentale déterminée à punir les Cambodgiens d'avoir été libérés de la tyrannie par les Vietnamiens, les survivants ont été privés pendant plus de dix ans de toute assistance en rapport avec les besoins. Les lendemains immédiats de la tragédie ont été ceux de la survie. Il n'y a pas eu un dollar pour aider pendant cette décennie quatre-vingt les survivants à surmonter les souffrances physiques et morales, à se recomposer, à se reconstituer, à retrouver leurs repères, à redonner un sens à leur vie. Il n'y a pas eu, comme au Rwanda, un fonds d'assistance aux rescapés du génocide. Je me souviens du lancement de l'opération ONU début 1992 et du constat navré que nous faisions avec un couple de psychologues en vérifiant qu'il n'y avait rien dans le budget pour « mental rehabilitation ».

N'est-il pas temps d'envisager un fonds international d'indemnisation des victimes du Kampuchea démocratique ? La Chine, dont les conseillers furent des témoins oculaires de l'esclavage subi par le peuple khmer et les Etats-Unis qui continuent d'exiger le remboursement de la dette contractée par la République de Lon Nol qu'ils soutenaient ne pourraient-ils en être les principaux contributeurs ?

N'est-il pas temps aussi d'honorer et de perpétuer la mémoire des victimes par des signes collectifs de réparation ? J'ai fait la proposition d'un mur sur le site de Tuol Sleng reproduisant les noms des victimes identifiées. D'autres propositions ont été avancées de monuments dans chaque province par lesquels les Cambodgiens exprimeraient aux disparus leur volonté de ne pas les oublier et de ne pas oublier ce qui conduit à de telles tragédies

Permettez-moi, en guise de conclusion, de faire écho à ce que je disais en préambule et de citer encore une fois Mme Claire Ly : « Ainsi, nous, les Khmers de naissance, n'avons pas à porter seuls la honte du Kampuchéa démocratique. Mais nous ne devons pas non plus nous déresponsabiliser de cette période tragique en attribuant uniquement sa cause à la politique étrangère des États-Unis d'Amérique, par exemple. Nous avons à trouver selon la tradition bouddhique de notre pays la « voie du milieu », qui ne bascule ni dans l'irresponsabilité immature ni dans la honte paralysante. C'est bien que la communauté internationale se mobilise pour réfléchir avec nous, les autochtones, témoins de l'époque, et leurs descendants, sur cette période sombre de l'histoire du Cambodge et de l'humanité. La communauté internationale ne doit surtout pas oublier que ce drame se passait dans une culture donnée. Elle doit faire attention à ne pas bafouer le joyau de cette culture qui est le bouddhisme pour notre pays. »

Raoul Marc Jennar

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