Le Temps des Cerises, Paris, 2012, 12 euros ; voir aussi www.linsurrection.fr
Ce roman d’un fin connaisseur des rouages internationaux et européens de la mondialisation néolibérale appartient à ces oeuvres trop rares qui nous font voir les possibles demains en s’appuyant sur les traits dominants de la réalité d’aujourd’hui.
Avec une maîtrise rare du vocabulaire du prêt à penser médiatico-politique, l’auteur nous montre où peuvent mener les certitudes qu’on nous assène à longueur de journée.
Car c’est bien du fait des « incontournables contraintes de la mondialisation auxquelles nul ne peut échapper » et de la nécessité de « garder la confiance des marchés », pour que « l’Europe tienne sa place dans le monde » qu’une toute puissante autorité européenne s’emploie à « mettre fin aux rigidités issues du XXe siècle ».
Cette fiction, totalement ancrée dans l’argumentaire qu’on nous inflige aujourd’hui, nous donne à voir ce que cela donne : une Europe où les peuples sont muselés, où les sondages remplacent les élections, où les firmes privées possèdent les écoles, les hôpitaux, les tribunaux, où les employeurs disposent en toute liberté des salariés. Une Europe où toute contestation est qualifiée de « populiste, d’archaïque ou d’intégriste» et réprimée.
Voici une dystopie cynique dans la veine d’un Huxley (Le meilleur des mondes) ou d’un Orwell (1984). En guise d’avertissement.
rmj