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Les copines d'Osez le Féminisme ! ainsi qu'Alice D, une amie et illustratrice de talent, savent à quel point j'aime cette image. Elle dit bien notre détermination, ainsi que l'intimité d'un combat qui n'a pourtant rien d'individuel. J'ai l'impression de radoter depuis des années, sur les arguments, sur les publications mêmes : ça doit être la 3ème que je reposte ce dessin.
Mais il y en a d'autres qui s'agitent, qui radotent, qui font convulser l'histoire, ce sont tous ceux qui détestent les femmes. Alors là dès qu'il s'agit de combattre nos libertés, on les entend éructer, ils ne manquent jamais une occasion lorsqu'il s'agit de combattre nos droits. Régulièrement il est reproché aux militantes féministes de trop s'énerver. Peu de ceux qui nous adressent cette critique nous accordent la considération d'appeler cet énervement pour ce qu'il est, non pas un manque de maîtrise mais de la colère. Pourtant cette colère est immense, je pourrais comprendre qu'elle puisse en effrayer certains.
Mais soyons sérieuses, un peu, notre colère de femmes piétinées vous fait peur ? Par contre la haine systématique et violente, déployée aussi bien dans les foyers que dans les institutions, pas de souci de ce côté là ? Ils nous haïssent. En tant que femmes, y compris quand nous occupons un rôle social bien précis et limité (famille, soin, reproduction, sexualité...). Quoi d'étonnant à ce qu'ils haïssent d'autant plus les moteurs de nos émancipations, qu'importe qu'il s'agisse des créatrices, des intellectuelles, des militantes, des lesbiennes, et de nos sentiments mêmes.
Ma colère est immense, d'autant plus renforcée par la médiocrité des arguments qui nous sont opposés. Le sexisme et le masculinisme forcenés de nos sociétés c'est le degré zéro de la pensée, de l'obscurantisme livré dans chaque stéréotype, dans une organisation sociale absurde et discriminatoire.
Autre argument souvent opposé aux féministes : le besoin de rentrer dans des cadres institutionnels légitimes. Car c'est bien là que reposerait la véritable démocratie, accessible, universel, garante des principes fondamentaux.
Rien de tout ce qui se passe dans le monde n'étaye cette théorie. Le déséquilibre est tellement massif qu'une décision des Etats-Unis permet la remise en cause du droit à l'avortement. C'est une violation flagrante des droits des femmes, une mise en danger de millions de femmes à travers le monde. Car bien entendu, d'autres seront tentés. Ces droits ont été clamés, proclamés, inscrits dans certains marbres, discours et traités, et pourtant l'une des grandes puissances mondiales peut s'asseoir dessus. A travers une Cour de justice, signifiant par là très clairement à quel point le concept de justice peut s'éloigner de l'idéal tel qu'on nous l'a décrit, pour s'inscrire très durement dans un rapport de force (de domination en réalité) qui s'impose à une moitié de population.
Comment ? Parce que les réactionnaires, ceux qui nous détestent, ont trouvé des prétextes, des camouflages à leurs haines, mais n'ont jamais cessé de nous combattre. Dans les églises, dans les écoles, dans les médias, dans les assemblées politiques. Ce conflit est politique, tant dans le monde des esprits que via des violences concrètes, physiques et psychologiques, et chaque jour nos vies sont en jeu.
C'est donc dans toutes les sphères que nous devrons répondre, de manière incessante, en utilisant tous les outils à notre disposition, tous les mots, toutes les créations, tous les dessins. A l'envi et jusqu'au dégoût d'avoir à répéter les mêmes choses, d'avoir à confronter autant de violence et de bêtises. Nous allons avoir besoin de gagner et d'empêcher le monde masculin de nous rouler dessus, en marche arrière.
"Une loi c'est bien, une liberté c'est bien, à condition d'avoir les moyens."
- Gisèle Halimi
J'aurais aimé lui avoir demandé si, en parlant de moyens, Gisèle Halimi pensait déjà qu'il s'agissait aussi du pouvoir. Récupérons, le pouvoir d'assurer notre survie et notre dignité, retirons-le à ceux qui nous veulent tant de mal.