
Le village de Qusra est situé à 25 kilomètres au sud de Naplouse, en Cisjordanie. Petite bourgade de 6500 habitants, Qusra a un charme incroyable qui fait qu'on en tombe immédiatement amoureux-se.
La terre ocre, les oliviers qui se dressent fièrement sur les collines illuminées par le soleil, le vent qui souffle sur les hauteurs, les rires des enfants, la dignité des hommes, la force des femmes… Qusra c’est tout cela à la fois, et plus encore.
Ma compagne de voyage et moi-même avons été reçues et accueillies par le maire Abdelazeem Wadi (42 ans), son épouse Nassima et leurs cinq enfants (Sara 17 ans, Bilel 16 ans, Amin 14 ans, Amir 12 ans et Massa 5 ans). Un accueil si chaleureux qu’on a eu bien du mal à repartir.
Nous sommes arrivées à point nommé donc, puisque c'était le début de la saison des olives, et nous avons donc participé à la cueillette avec les habitants. Le revenu principal de Qusra, c'est l'agriculture (poulets, moutons et surtout olives). L’ambiance de la cueillette fait un peu penser à celle des vendanges en France. Familiale, joyeuse, laborieuse et pleine d'enfants !
Le village forme comme une seule et même grande famille, tout le monde se connaît, s'entraide. Il y règne une solidarité et une fraternité incroyable.
Il faut dire que Qusra, s'il est un village extraordinaire à bien des égards, est aussi un village qui subit d'énormes difficultés dues à l'occupation.
En effet, depuis 1981 le village est encerclé par quatre colonies peuplées par des juifs sionistes extrêmement agressifs. Ils viennent principalement de Russie, et des Etats-Unis.
Régulièrement, les colons font des "descentes" dans le village et dans les champs : Ils tuent les moutons, arrachent les jeunes oliviers fraîchement plantés, incendient les vieux, agressent les enfants, et brûlent les mosquées.
L'objectif ? Eh bien comme toujours, faire partir les Palestiniens pour pouvoir s'approprier toutes les terres, qui sont extrêmement productives.
Il faut savoir que le village a déjà été découpé, sous couvert des "Accords d'Oslo", et que de nombreuses terres ont été volées aux paysans au profit des colonies. Mais le principe du sionisme, c’est d’en vouloir toujours plus...
Leur dernière descente remonte à l'Aïd el Adha, il y a un peu plus d'un mois. Les colons sont venus armés dans le parc pour enfants de Qusra (déjà entouré de murs et de barbelés pour protéger les enfants des jets de pierres). Les enfants, terrorisés, se sont enfuis à toutes jambes. Les adultes ont accouru pour s'interposer, les colons ont alors tiré à balles réelles. Quatre blessés graves.
Nous avons rendu visite à l'un d'eux, un père de famille de 39 ans, qui est éleveur de poulet à Qusra.
Alors qu'il rebroussait chemin pour aller protéger sa ferme, il a reçu un tir de M16 dans la hanche (probablement tiré par un soldat, les soldats débarquant systématiquement dans ce genre de cas, pour protéger... les colons !). Il a passé 19 jours à l'hôpital et est toujours alité.
C'est sa femme qui s'occupe désormais de la ferme, de la maison et de leurs six enfants... Heureusement qu'il y a la solidarité à Qusra!
Et puis les habitants ne sont pas hommes et femmes à se laisser faire et à courber l’échine !

Abdelazeem nous expliquait que 87 plaintes ont été déposées par les habitants de Qusra auprès des autorités israéliennes pour des faits de:
- tuerie de mouton
- arrachage et vandalisme des oliviers
- l'incendie d'une mosquée
- agressions en tout genre
- un mort (tué par une rafale de M16 sur son propre champ)
Toutes les plaintes ont été classées...
Malgré tout cela, Qusra respire l'optimisme et se tourne vers l'avenir. Grâce à sa proximité avec Naplouse, les jeunes vont étudier à l'Université et créent des entreprises comme une entreprise de chips 100% locale, que nous avons visitée, qui emploie près d'une cinquantaine de salarié-e-s et qui commence à prendre une sacrée ampleur en Cisjordanie.
Qusra, c'est la Palestine qui résiste, qui vit. Leurs valeurs morales sont comme les racines d'un olivier centenaire. Si enracinées dans le sol que même un incendie ne peut les atteindre.
C'est sans doute pour cela qu'ils inspirent tant de force et d'espoir.
