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Billet de blog 4 mai 2017

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Le débat a eu lieu, votez Macron nous disent des voix inconnues...

Le débat Le Pen/Macron s'est déroulé comme prévu. Aucune découverte, aucune surprise. Pourtant, on nous présente ce débat comme la révélation du vrai visage de Mme Le Pen et de son programme et très vite, des voix s'élèvent pour dire "il faut voter Macron". Ah bon ? Mais pourquoi car rien de nouveau sous le soleil. Il y a comme un vote blanc qui traine...

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La démocratie par injonctions de ce qu’il faut faire, lire, croire, voter et penser continue à prospérer après le débat Le Pen /Macron. On assiste même, après ce débat, à la production du troublant spectacle d’électeurs, notamment de la France Insoumise, qui, d’indécis avant le débat, vont mettre avec joie, et presque exaltation, un bulletin de vote Macron dans les urnes dimanche prochain.

Les ficelles de la manipulation de la pensée sont tellement grosses que cela devient risible et spectacle à part entière. Cela me rappelle le prémonitoire et métaphorique film de John Carpenter «Invasion Los Angeles » dans lequel le héro, muni de lunettes spéciales, voit la réalité du monde, réalité subliminale, ou de partout des messages en forme d’injonctions conditionnent la population pour qu’elle adopte un comportement type. Evidemment, les moins éveillés et les plus manipulés des citoyens  doivent se demander qu’elle mouche m’a piqué pour coucher sur le papier de tels propos à l’apparence fantaisiste et incompréhensible. Cette réaction est normale car elle traduit le haut degré «d’ensuquement» dans lequel sont plongés et maintenus la plupart des citoyens. « Consommer, arrêter de penser et obéir » est le mot d’ordre qui ne cesse d’être susurré à nos oreilles pour mieux nous habituer à devenir de dociles moutons.

Pour ne plus paraître fantaisiste, je m’explique :

Ce matin à la radio, des jeunes électeurs étaient interrogés sur leur intention de vote après avoir vu le débat. Quelle surprise…. le vote Macron semble s’imposer à eux, et même celui qui envisageait de voter blanc, envisage désormais de voter Macron. Ce matin à la radio, tous les journalistes dénoncent avec effroi le caractère violent de ce débat, la faiblesse économique de Mme Le Pen et l’horreur d’une possible élection de Mme Le Pen.

Soyons clair. Croyez vous que les Français ont abordé ce débat en imaginant que Mme Le Pen était une candidate sérieuse, avec des propositions économiques pertinentes et soutenables et que soudain, patatras,  Mme Le Pen s’est révélée extrémiste, tenant des propos pas sérieux, truffant ces exemples d’erreurs et d’approximations et faisant preuve d’une tendance chronique à l’attaque et aux accusations diverses et variées ? En un mot, Mme Le Pen était elle perçue, avant le débat, comme l’ange sauveur de la France pour se dévoiler, en cours de débat, un personnage inadapté à l’exercice de la fonction présidentielle ??? La réponse est évidemment non. Tout le monde connaissait, avant le débat, les propositions économiques de Mme Le Pen (abandon de l’euro, sortie de l’Europe, remise en état des frontières avec des gardes de partout, repli sur soi, etc….). Le débat n’a fait que confirmer l’image de Mme Le Pen et le caractère irréalisable de la plupart de ses propositions.

On essaye de nous faire croire que désormais ceux qui envisageaient le vote blanc (qui n’est pas un vote en faveur de Mme Le Pen comme très malhonnêtement a déclaré le porte parole de M. Macron avant le débat), le vote nul ou l’abstention auraient, d’un coup, eu une révélation sur Mme Le Pen et se précipiteraient dans les bras de M. Macron. Cela est prendre les électeurs pour des imbéciles. Rappelons que ceux qui envisagent le vote blanc le font parce que ils ne se reconnaissent ni en M. Macron, ni en Mme Le Pen. Alors si certains, après le débat, envisage de voter Emmanuel Macron, cela serait dû au fait que M. Macron les aurait séduits mais surtout pas parce qu’ils auraient été horrifiés par Mme Le Pen. Horrifiés, ils l’étaient avant le débat (c’est pour ça qu’ils ont choisi le vote blanc), horrifiés ils le resteront après le débat (c’est pour ça qu’ils voteront blanc). De fait, j’ai beaucoup de mal à imaginer un militant de la France Insoumise qui choisirait de voter Macron après le débat. Pour une raison simple, c’est que le militant de la France insoumise est intelligent et cohérent avec sa pensée politique : il savait avant le débat à quoi s’en tenir vis-à-vis de Mme Le Pen et le débat n’a rien changé sur ce point. Ce militant savait aussi à quoi s’en tenir sur le programme économique de M. Macron, et il n’a guère du être convaincu par le candidat des banques qui visiblement a beaucoup de mal à assumer le bilan du Gouvernement auquel il a participé (la solidarité gouvernementale est pour lui une notion inconnue) et qui ne se cache pas de ses projets ultralibéraux. Alors présenter le débat d’hier soir comme une révélation sur Mme Le Pen, c’est ce que l’on appelle découvrir l’eau tiède…

De ce débat, on ne peut conclure qu’une seule chose : c’est une catastrophe pour la France de se retrouver avec une alternative Macron/Le Pen. M. Macron récite visiblement des éléments de langage par cœur et parfois, sans doute poussé à bout par les attaques de Mme Le Pen, improvise (voir sa déclaration sur l’erreur que représente la loi Taubira et son intention de revenir sur ce texte…l’ancienne garde des sceaux a du apprécier la position de son nouvel allié).  M. Macron n’est pas convainquant sur la politique internationale (il parle de s’associer à Trump pour mener la guerre en Irak et en Syrie et la paix ? et la recherche des vraies racines du terrorisme ?) et sur les questions de sécurité (comment compte-t-il interdire l’accès à un quartier d’un individu qui y seraient interdit de présence ?).  Mme Le Pen a fait du Le Pen. Sur le plan économique, la candidate du Front national ne tient pas la route. Enfin, dire de M. Macron qu’il est le candidat de la mondialisation sauvage ou de l’uberisation n’est pas d’une violence inouïe mais une vérité factuelle et désolante.

Les derniers sondages donnent toujours des intentions de vote au second tour en très nette faveur de M. Macron (on est toujours dans les fourchettes 60% Macron et 40% Le Pen). Il ne sert donc à rien d’effrayer les électeurs sur le risque de voir Mme Le Pen à l’Elysée.

Plus que jamais, ce débat nous montre l’impérative urgence de doter la France d’une Assemblée nationale où une majorité opposée à la majorité présidentielle permettra de mettre en place la cohabitation. Déjà, des sondages commencent à marteler aux électeurs que la prochaine assemblée sera de la couleur d’En Marche ! Les injonctions à voter pour M. Macron et pour ses représentants à l’Assemblée nationale ne vont pas cesser demain, bien au contraire ! Nous somme de plain-pied dans la vision cauchemardesque de John Carpenter. Nous sommes entrés dans un monde totalitaire.

Régis DESMARAIS

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