En effet, une plainte au pénal a été déposée par la famille de l'agent décédé des suites du harcèlement moral subi au sein de l'Autorité de la concurrence. Un juge a du reste été nommé par le tribunal de grande instance de Paris et des auditions sont en cours.
Rappelons aussi que le 17 juin 2016, le tribunal administratif de Paris a condamné l’Etat pour harcèlement moral subi par un agent de l’autorité de la concurrence et du défaut de protection dont il a été l'objet. Les juges de Paris ont même indiqué dans leur jugement que « l'ensemble de ces éléments est de nature à faire présumer l'exercice d'agissements constitutifs de harcèlement moral à l'encontre de M. Mouzon, au sein de l 'Autorité de la concurrence». Ce harcèlement procède d’un management toxique et disqualifiant. Or qui décide, valide et contrôle le management mis en place dans une administration ? La femme de ménage ? Un agent subalterne ? Non ! Cette responsabilité incombe au chef de l’administration et le chef de l’autorité de la concurrence est (bientôt était) Bruno Lasserre. Ce dernier est donc bien mis en cause par les juges de Paris. Rappelons aussi que lorsqu'une administration est condamnée pour harcèlement, c’est en raison des agissements fautifs de son (ou de ses) agent(s). Au cas d’espèce, le jugement du tribunal administratif de Paris condamne l’Etat en raison des agissements fautifs de la hiérarchie de l’autorité de la concurrence. Ce jugement est devenu définitif. Ni l’Etat, ni l’autorité de la concurrence n’ont fait appel de ce jugement.
La prochaine décision du Président de la République est donc choquante pour la mémoire de la victime de ce harcèlement, pour la mère qui a perdu son enfant et pour tous les proches de la victime.
Pourtant, en 2016, la France a été meurtrie par une vague de terrorisme que notre pays n’avait jamais connue auparavant tant par son ampleur que par le nombre de victimes. Les victimes font l’objet de commémorations et d’hommages en tout genre. On pourrait croire que dans notre pays, la victime est sacrée. Chaque année les victimes en ce pays sont nombreuses : victimes de meurtre, de viol, de harcèlement, d’humiliation, de racisme, d’attentat etc.. La liste, hélas, est loin d’être exhaustive. Chacun de nous pense que la victime a droit à la justice et que celui qui lui a donné son statut de victime a droit à l’opprobre… eh bien non !!
Dans quelques jours, Bruno Lasserre va être nommé à la présidence de la section de l’intérieur du Conseil d’Etat. Il s’agit d’un poste prestigieux, certes bien moins rémunéré que celui de président de l’autorité de la concurrence, mais quand même, c’est une belle fin de carrière…enfin peut-être pas une fin de carrière mais pire, un tremplin vers le poste dont rêve Bruno Lasserre : devenir vice-président du Conseil d'Etat et succéder à Jean-Marc Sauvé. Une telle perspective donne froid dans le dos....imaginez la mise en place d'un management toxique et disqualifiant au sein du Conseil d'Etat...
Difficile donc avec cette nomination de croire que les victimes sont réellement considérées dans notre pays. « Le Monde », sous la plume de Sandrine Cassini, a même eu l’audace et l’indécence d’écrire des choses fausses sur les circonstances du décès d’Alain Mouzon et sur le comportement de Bruno Lasserre dans cette affaire. Comme si ces contre-vérités ne suffisaient pas, ce journal ose même écrire que les derniers mois (à l’autorité de la concurrence) ont été éprouvants pour Bruno Lasserre. Il est fort probable que les derniers mois ont été éprouvants pour M. Lasserre, mais il est certain que le plus éprouvant a été l’enfer vécu par l’agent victime de harcèlement moral et que depuis son décès, chaque jour est éprouvant pour cette mère qui a perdu son unique enfant. Alors les petites épreuves de M. Lasserre, en fait la procédure devant le tribunal administratif de Paris, paraissent bien dérisoires et futiles, d'autant que ces épreuves conduisent à une nomination prestigieuse…
Oh, c’est vrai, il y a un mort dans cette affaire, mais dans le monde des puissants, des réseaux et des "copains" cela ne compte pas. Nul doute que dans quelques jours, le Président de la République signera le décret de nomination de Bruno Lasserre sans la moindre pensée ni pour la victime de harcèlement moral qui a perdu la vie, ni pour le jugement du tribunal administratif de Paris, ni pour la procédure pénale en cours….
Cette nomination a été effectuée ce mercredi 28 septembre 2016 avec effet au vendredi 30 septembre 2016. Aucune pensée pour la victime du harcèlement moral n'a été faite. Le destin de victime est bien le plus cruel qu'il soit dans nos sociétés.
RD