Une ligne a grande vitesse est-elle vraiment nécessaire ? Cette question simple trouve une partie de sa réponse dans l’origine lointaine de ce projet. Depuis près de 40 ans, ce projet existe ; il a été évoqué puis reporté à de nombreuses reprises. Ce projet est né à une époque où le réchauffement climatique et ses conséquences concrètes étaient encore méconnus. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Des études et projections très précises existent. Les services de l’État ont déjà amorcés une réflexion sur le repli stratégique ; conséquence directe du recul du trait de côte. L’élévation du niveau de la mer, la submersion marine vont imposer une modification de la géographie. Il s’agit d’anticiper le déplacement des populations et des équipements. Nous devons, en conséquence, penser le futur des voies de communication. De ce point de vue, l’emprise foncière réservée pour cette nouvelle ligne ferroviaire pourrait s’avérer très utile.
Nous savons l’actuelle ligne Montpellier – Perpignan condamnée à court terme partout où la mer remplacera la terre. Dans 10 à 20 ans, certains tronçons entre Narbonne et Perpignan seront de l’histoire ancienne.
La création d’une nouvelle infrastructure ferroviaire est donc nécessaire. Sur cette voie, pourraient passer des Trains Express Régionaux, des wagons de fret et des trains à grande vitesse. Il faudrait donc concevoir un tout autre projet, actualisant les données du problème.
Revient-il sur un engagement international de la France ? C’est possible. Mais il en honore un autre ; celui de l’Accord de Paris. De façon rationnel, il est impossible de considérer que la lutte contre le réchauffement climatique n’implique aucune modification des structures et des usages.
C’est dans cette perspective que doit être entièrement repenser ce projet de « ligne à grande vitesse ». Développer le train du quotidien et le fret ferroviaire, repenser l’infrastructure ferroviaire tout le long du littoral, limiter l’artificialisation des sols et la disparition des terres agricoles deviennent autant de nécessités respectant un objectif de neutralité carbone, de sobriété énergétique, et anticipant les bouleversements à venir.
Le gain de 18 minutes annoncé entre Perpignan et Montpellier est tellement faible qu’on peut difficilement parler de « grande vitesse ». Le coût des travaux, régulièrement revu à la hausse, est tellement important que l’on devrait consacrer cette somme à des fins bien plus utiles, bien plus soucieuse de l’intérêt général. Les collectivités territoriales sont appelées à financer un projet dont elles ne sont pas à l’origine et dont leurs habitants ne profiteront guère. Le bénéfice environnemental de la grande vitesse est faible. A contrario, le développement du fret ferroviaire est un impératif économique et sanitaire. De la même manière, la multiplication de l’offre ferroviaire sur les courtes distances appartient plus au futur qu’au passé.
Il est irresponsable de ne pas anticiper les effets du réchauffement climatique le long du littoral méditerranéen. L’actuelle ligne devant être remplacée, il est néfaste de multiplier l’étalement des infrastructures de transport, au détriment des zones agricoles et naturelles. Elles doivent être beaucoup plus intégrées. Ainsi, envisager de créer de nouvelles gares, loin des centres villes, comme à Narbonne et à Béziers – distantes de quelques dizaines de kilomètres à peine – ne permet pas de se déplacer entièrement sans voiture.
Pour toutes ces raisons, cette ligne à grande vitesse apparaît inutile, coûteuse et anachronique.