J’ai promis la semaine dernière de m’expliquer sur mon silence volontaire de deux mois. Vincent Truffy m’avait demandé de collaborer à l’édition « Bon gré, congrès » pendant la période de la préparation du congrès de Reims. J’ai accepté avec plaisir en donnant un certain nombre d’articles conciliant à la fois mes choix personnels (mon soutien de socialiste à la motion menée par Martine Aubry) et une volonté de recul. Le PS en étant arrivé à un état de dégradation politique pratiquement sans précédent, cela s’imposait. Comme je suis de ces hommes de gauche vaccinés à tout jamais contre les différentes formes du culte de la personnalité, je n’allais pas m’engager dans la célébration de Martine ou Benoît contre Bertrand ou quelque autre. J’ai préféré analyser, témoigner, argumenter politiquement, éviter d’en rester à des slogans. J’ai conscience de pouvoir laisser en ligne chacun de mes articles, pourtant écrits dans l’actualité.
Je remercie celles et ceux qui ont bien voulu participer au débat sur le même terrain sérieux et solide de l’échange politique. Comme eux, j’ai souffert de voir certains membres du club concevoir cet échange sous la forme du prosélytisme voire de la mise à l’index. Je remercie ceux qui m’ont envoyé un petit message de soutien en privé, même s’ils ne partageaient pas tous mon point de vue.
J’ai suspendu ce blog délibérément. Il ne s’agissait pas de renoncement – j’en ai vu d’autres. Il convenait, me semblait-il de rompre l’accoutumance (c’est volontairement que je ne dis pas : l’habitude) de certains blogueurs à me suivre à la trace. Le meilleur moyen d’aider les drogués de la vie ou de la politique, c’est de participer à leur désintoxication. J’ai profité de ce temps pour avoir une activité militante dans les milieux que je côtoie. J’ai pu ainsi constater qu’en quelques semaines le PS a su commencer à donner une autre image de lui-même. « Ce n’est qu’un début, continuons le combat ! »
La semaine dernière, le 29 janvier, j’ai eu la surprise de voir des connaissances venir sous la banderole enfin ressortie du PS (et du MJS) pour manifester leur volonté de mettre un coup d’arrêt à la politique actuelle. Ces connaissances n’étaient pas socialistes mais spontanément venaient (re)prendre leur place au côté du parti de la gauche le plus représentatif. Le tract résumant le contre-plan de relance du PS était reçu en général avec sympathie. Ces personnes avaient l’impression de renouer avec une tradition fâcheusement oubliée : la gauche dans la rue, sans complexe et dans toute sa diversité.
Certains au PS n’étaient visiblement pas au diapason. Ils se demandaient si leur parti n’allait pas trop loin. Pouvait-on payer une prime de 500 € pour ceux qui touchent soit la Prime pour l’emploi, soit le RMI ou le RMA. Pouvait-on augmenter le SMIC de …3% ? Ils n’entendaient pas les revendications syndicales à côté d’eux. Mes connaissances, jeunes ou moins jeunes, se posaient moins de questions : quand on donne tant de milliards aux banques sans compensation, pourquoi ces propositions dûment chiffrées, seraient-elles démagogiques (populistes est le terme à la mode) ?
Ils avaient été sensibles à l’argument de la Première secrétaire du PS : nous nous plaçons dans la perspective définie par le FMI - un plan à hauteur de 2,5 % du PIB. Nous voulons un plan qui aide à la fois les entreprises (« l’économie réelle ») et les citoyens, à commencer par les plus démunis. Nous voulons entraver le chômage de masse qui se remet en branle : nous voulons faire payer cher les licenciements à ceux qui veulent profiter de la crise alors qu’ils ne sont pas en péril – et demandons qu’ils soient placés, en ce cas, sous la surveillance de la puissance publique. Nous voulons financer des projets qui aident la vie de ceux qui sont confrontés, de plein fouet, aux difficultés de la vie : par exemple la construction de logements sociaux. Nous voulons mettre en place les prémices d’une écosociété : par exemple en favorisant la modernisation de l’habitat à des critères d’économie de l’énergie.
Dans cette période où les collectivités locales sont étranglées par le désengagement de l’Etat, où il faut trancher le dilemme « moins d’impôts à cause de ceux qui souffrent ou un peu plus pour soutenir l’investissement et l’emploi (mais aussi les allocations de solidarité) ? », ils ont entendu que le PS proposait ce que le gouvernement refuse : un pacte entre l’Etat et les collectivités réintégrant dans le circuit les dotations qui ont été supprimées ces dernières années, pacte lié à l’engagement d’engager les travaux que souvent le désengagement de l’Etat retarde ou rend impossible.
Et ce n’est qu’une infime partie des propositions : le document compte 46 pages. Serait-ce un document sérieux ? Mes connaissances le pensent à partir du résumé en 8 pages que je leur ai donné. La prestation télévisée de la Première secrétaire du PS le même soir les a confirmées dans ce sentiment.
Le document du PS est un document de fond. Il est issu d’une grande concertation avec élus (y compris de l’Union européenne), syndicats, acteurs de la vie économique… Personne dans le PS n’a été tenu à l’écart, même si toutes les positions n’ont pas été retenues. Raison de plus pour le faire connaître, pour le mettre en débat et l’améliorer le cas échéant.
Je regrette que Mediapart soit passé à côté de son travail d’enquête sur ce point. A part un article de L. Mauduit, paru avant la publication du contre-plan, plutôt frileux parce que le document renouerait avec le passé (de l’archaïsme ?), rien n’a été écrit sur le sujet. La réunion de la Mutualité du 1er février, dont la presse a parlé, n’a pas été évoquée. Pourtant cette réunion annuelle a souvent plus d’importance que l’Université d’été de La Rochelle.
Je ne chercherai pas les raisons qui peuvent être multiples. Ne pas réveiller les discussions du congrès du PS – mais il ne s’agit plus ici d’un débat interne aux socialistes. C’est du débat démocratique de la France, entre le parti au pouvoir et le principal parti d’opposition qu’il s’agit ici. Conviction que le futur NPA ou quelque autre parti de la gauche de la gauche sera plus intéressant ? Que le modem serait plus crédible ? Ce qui se comprend sur le plan personnel, ne peut se comprendre d’un journal qui veut être le journal numérique de référence.
Sur toutes ces questions, ouvrons le débat.
Pour tout savoir sur le plan de relance des socialistes rendez-vous sur www.agirvraimentcontrelacrise.fr
Et que nul n’hésite à participer aux 1000 initiatives prévues ces prochaines semaines. La voix de chacun est intéressante. Elle n’a pas besoin d’être tonitruante.