Chère Martine Orange,
Vous me permettrez de me demander si vous êtes, en politique, naïve ou inexpérimentée...
Quiconque suit attentivement la politique, par simple goût de l’information ou par intérêt pour la politique, par exemple quand on se sent de gauche, ou seulement hostile à la politique menée sous le précédent quinquennat, savait en 2012
1- que le nouveau président, quel qu’il soit, n’était pas en mesure de ramener le déficit public à 3% fin 2013. Le choix de François Hollande, un rusé de la politique, a été de s’approprier ce thème pour s’imposer face à M. Aubry, au discours plus mesuré, plus en phase avec la phrase de gauche. Il en a profité discrètement pour que se propage l’idée qu’avec elle, Sarkozy avait trop de chance d’être réélu. Surtout il était persuadé qu’avec ce thème, il était à même de recueillir dès le premier tourune bonne partie des voix de Bayrou, favorables à une priorité du désendettement public, qui risquaient de se porter à droite comme en 2007.
2 – que la droite européenne attendait le nouveau président au tournant, au nom du respect des engagements pris par la France.
Le budget proposé par la Commission exécutive européenne marque effectivement que le nouveau cours voulu par la France a essuyé un échec – peut-être seulement momentané. Une bonne partie de la droite européenne, qui a besoin du soutien sulfureux de Cameron, a décidé d’être en retrait sur ses propositions initiales. Si jamais Calderon allait jusqu’au bout des projets le menant en marge de l’Union européenne, que deviendrait l’orientation actuelle déjà peu solide ? Ce qui permet aussi de mettre la France au défi de s’isoler et de perdre en crédibilité pour l’avenir. La vie politique de l’Union est faite de compromis perpétuels et non d’oukazes.
3 – que tout se jouera avec les élections allemandes de l’automne et le renouvellement du Parlement européen, que la bataille sera féroce. Ce ne sera certes pas sans conséquences d’ici-là sur les finances et la politique de la France. Est-ce que les orientations souhaitées par la France sont « oubliées » ? Elles sont remises à plus tard, à coup sûr. Il apparaît désormais clairement que l’année 2014 sera décisive.
Chère Martine Orange, avez-vous vraiment suivi la critique politique du PS sur le financement de la réforme Woerth-Sarkozy des retraites ? N’avez-vous pas remarqué la constance avec laquelle le PS déclarait que cette réforme n’était nullement financée jusqu’en 2018 comme le prétendait l’ancien président ? Est-ce une surprise pour vous – et Mediapart ? Pour ce qui est des retraités, pouvez-vous affirmer qu’ils forment une catégorie homogène ? Et que la croissance du nombre de retraités en état de surendettement (alors que le nombre global de dossiers est, lui, en baisse) soit un argument pour ne pas prendre en compte les facultés contributives d’un certain nombre d’entre eux ?
Enfin, chère Martine, savez-vous ce qu’est un président de la Cour de comptes, comment se font ses rapports « ordinaires » et ceux qu’on lui commande ? A-t-il satisfait Sarkozy (qui l’a nommé) ? Sarkozy l’a-t-il toujours suivi ? Les rapports de la Cour entraînent des suites obligées dans un certain nombre de cas délictueux. Ils soulèvent des aberrations à corriger au plus vite. Ils ont des propositions qui méritent d’être étudiées sans engager les gouvernements. Personnellement, comme citoyen de gauche, je pense que la politique de la France touchant aux allocations familiales doit évoluer. Nous n’en sommes plus aux exigences nationales de 1946. Il ne me choque pas qu’elles soient liées aux revenus ; voire, sous certaines conditions, fiscalisées.