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Récit des exploits honteux commis à l'encontre des familles sans papiers par la volonté de Nicolas Sarkozy, de Hollande et maintenant de Macron

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Billet de blog 17 mai 2013

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Incendie de Lyon: trois victimes d'une politique criminelle

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INCENDIE DE LYON : TROIS VICTIMES D'UNE POLITIQUE CRIMINELLE.

Ce matin (le 13 mai 2013) à 6h1/2, je croyais arriver sur ce squat pour une expulsion éventuelle dans les 2/3 jours comme la police nationale l'avait signifiée aux familles il y avait quelques jours en venant relever toutes les identités des parents et également de leurs enfants, ce qui était de mauvais augure !

Juste avant d'arriver Philippe de CLASSES (Collectif Lyonnais pour l'Accès à la Scolarisation et le Soutien aux Enfants des Squats) me téléphonait pour me dire qu'il y avait un incendie dans le squat. La rue était fermée des deux côtés, le squat également interdit. Je retrouvais les hommes qui étaient regroupés en dehors de la "zone de sécurité", ils m'apprenaient qu'il y avait 3 morts, me montrant de la tête un homme qui était seul au bord du trottoir.
C'était Voicu qui pleurait, le père de Béni 12 ans qui était mort dans l'incendie. Ils me disaient également le nom des 2 autres personnes, la maman de 4 jeunes enfants, l'aînée vient d'entrer au collège et ses 3 autres frères et sœur sont en classe élémentaire, et une jeune femme qui était le "pivot et le soutien" d'une grande famille,(1 frère, 3 sœurs et beaux-frères avec des enfants.

J'apprenais ensuite que l'incendie s'était déclaré vers minuit dans le grand bâtiment qui servait de bureaux d'une entreprise qui avait déménagé dans une autre région.
Les familles rroms s'y étaient installées fin septembre/début octobre 2012 suite à des expulsions ces mêmes mois de squats de Vaise, d'Ecully/Vaise, de la route de Genas…

Les pompiers seraient venus rapidement et les familles évacuées sur un gymnase du 8ème oùla Croix Rouge avait installé des lits de camp, apporté des couvertures et à boire. Plus personne n'était à l'intérieur du squat que ce soit sur le bâtiment principal d'où le feu était "parti", et plus personne dans les préfabriqués dans la cour ni dans le hangar qui est à 200 mètres du bâtiment principal.

A 6h1/2 le feu n'était toujours pas éteint, les pompiers cassaient le toit qui risquait de s'effondrer comme l'avaient été les escaliers montant à l'étage supérieur nous a-t-on dit.

Avec Elise, une enseignante des écoles de plusieurs enfants, nous sommes allées au gymnase. C'était terrible, les personnes pleuraient, la maman de Béni et les sœurs d'Irina criaient leur douleur,

Que c'est difficile d'avoir le geste apaisant devant ces souffrances !La Croix Rougeet le Samu étaient auprès des familles, dans l'attente de Médecins du Monde, pris dans les embouteillages.

Puis toute l'équipe de Médecins du Monde est arrivée et les familles ont ressenti leur présence réconfortante, car elles sont celles qui soignent leur corps certes, mais bien au delà elles sont celles et ceux qui leur apportent une sécurité reconnue par leur compétence qui les rassure et qui est aussi une chaleur humaine dont elles avaient besoin dans ce drame qui les atteignaient tous profondément.

Etaient arrivés sur les lieux la Préfète déléguée à l'Egalité des Chances, des élus de la mairie du 8ème, des élus de la Ville de Lyon...

Puis avec Aurélie et Isabel de MDM, nous sommes retournés vers le squat où devaient se trouver les hommes dont les femmes et les enfants restaient dans le gymnase. En arrivant surla place Bellevuejuste à côté du squat il y avait beaucoup de monde, beaucoup d'hommes, de femmes venus des autres squats ou terrains, apporter par leur présence un soutien et un réconfort à ceux et celles qui sont pour la plupart de leur famille, de leur village.

Avec les retrouvailles de leurs familles qui arrivaient, toutes les douleurs ressurgissaient avec, devant eux, ce bâtiment qui était celui de leur malheur.

Tout le secteur autour du squat était sécurisé, la rue toujours interdite, des voitures de police, des pompiers, des grues et des bulldozers qui continuaient un travail très périlleux, d'une part car avec la chaleur qui se dégageait, peut être y avait-il des risques d'explosion de bouteilles de butane... d'autre part les pompiers étaient obligés de stabiliser avec des planches cette partie de l'immeuble qui risquait de s'effondrer, sans avoir eu le temps de dégager les corps des personnes décédées et de s'assurer qu'il n'y ait pas d'autres victimes.

 Les familles regardaient anxieuses les travaux, une fenêtre était dégagée, puis une autre au bout d'une heure... les familles attendaient que les corps soient sortis et leur soient rendus... Le commandant de la police qui était une femme est venue expliquer aux familles, avec beaucoup de précautions, que les travaux étaient importants et que les corps ne pourraient être sortis avant demain. Qu'ensuite ils devraient être transportés à l'Institut Médico-Légal pour connaître les raisons des décès, ensuite ils seraient rendus aux familles. Cela leur a été expliqué plusieurs fois, avec également un policier roumain qui a pu trouver les mots qu'ils pouvaient entendre.

Puis nous sommes reparties au gymnase, où nous avons appris que des personnes de l'OFII (Office Français Immigration Intégration) étaient passées avec des documents à signer par les personnes "souhaitant" des Retours Volontaires en Roumanie ... incroyable ! Elles ont été repoussées avec "célérité".

La Croix Rougedevait quitter le gymnase sa mission d'urgence prenant fin, laissant la place à Notre Dame des Sans Abris pour les 15 jours où doivent rester les familles dans ce gymnase, certainement afin de trouver des solutions qui doivent être dignes et durables.

Ce soir, Evelyne de la Pastorale des Gens du Voyage m'a téléphoné pour me dire que les corps avaient été sortis du bâtiment par les fenêtres. Chaque fois qu'un corps sortait les familles l'appelaient en pleurant, Evelyne me disait que cela avait été très douloureux.

Puis les pompiers sont venus vers les familles, leur ont expliqué que les corps étaient emmenés à l'Institut Médico-Légal et que les corps leur seraient remis demain.

Et avec beaucoup d'émotions, ils leur ont dit qu'elles avaient été très dignes et qu'ils les remerciaient.

Au fait, je ne vous ai pas dit ce qui avait provoqué cet incendie : d'après les pompiers, c'est une bougie posée sur une poutre en bois qui a mis le feu.

Au fait, je ne vous ai pas dit non plus que la mairie avait coupé l'électricité il y a une dizaine de jours... dommage, c'est plutôt une sécurité pour s'éclairer !

Au fait, je ne vous ai pas dit que pour y voir en fin de journée, il y a toujours les bougies ... dommage, c'est dangereux !

Au fait, qui a pris des décisions qui mettaient en danger au moins une centaine de personnes dans ce bâtiment ? ... dommage, ils n'y avaient pas pensé !

 Gilberte Renard, militante de CLASSES (Collectif Lyonnais pour l'Accès à la Scolarisation et le Soutien aux Enfants des Squats)

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