
Le parquet de Marseille a décidé d'ouvrir une enquête préliminaire pour "trafic d'influence et recel", concernant l'élu socialiste Jean-Noël Guérini et le patron du Renseignement intérieur Bernard Squarcini, a-t-on appris vendredi de source proche de l'enquête.
Le juge Charles Duchaine avait émis une demande de réquisitoire supplétif le 9 février sur la base de soupçons liés aux conditions d'emploi du fils de M. Squarcini, Jean-Baptiste, au sein d'une structure dépendant du conseil général des Bouches-du-Rhône, présidé par M. Guérini.
C'est l'ancien directeur général de Treize Développement, Jean-Marc Nabitz, qui aurait balancé Squarcini junior et les rapports étroits entre les deux Corses, le flic de Sarkozy et le socialiste des Bouches-du-Rhône (et Nabitz en a à raconter, ainsi que ceux qui l'ont côtoyé).
Selon "Le Canard Enchaîné", Jean-Marc Nabitz a fait part aux enquêteurs d'une relation "donnant-donnant" entre l'élu et le patron du Renseignement intérieur. Il aurait notamment évoqué des matchs au stade Vélodrome en loge du conseil général pendant lesquels il aurait vu" à chaque fois", "Bernard Squarcini (...) assis à côté de Jean-Noël Guérini", qui "discutaient souvent en corse." (Nouvel Obs)
Parchi l'amicizia tenga, ch'una manu passi e l'altra venga(1), entre Corses, ce sont des choses qui se font.
Jean-Baptiste Squarcini a évacué le bateau bleu depuis un moment, pour exercer son entregent dans un pays au-delà de tout soupçon en ce qui concerne les malversations financière, le Gabon. Cependant, on notera que mademoiselle Squarcini fille est toujours salariée du Conseil Général (chì vole una bella famiglia, principe per una figlia(2), dit-on dans l'île de beauté). Ça crée des liens.
Mais "le Squale" dément toute compromission, et d'après lui, si sa progéniture a des activités professionnelles au CG13, elle ne le doit qu'à sa valeur professionnelle. Bon sang ne saurait mentir. Et si son entourage se rapproche de Guérini, n'est-ce pas une forme d'"infiltration" ? Les séjours à Calenzana, le fief Guériniste, n'avaient sans doute pas d'autre but. Au pays, on dit : Hè megliu vergogna à piattà chè vergogna à mustrà(3).
De son côté, Jean-Noël Guérini bombe le torse de l'honnête homme, en se drapant du voile des victimes innocentes, et invoque un complot anti-Corse. Comme l'animal blessé qui menace de tous ses crocs, le président Guérini promet d'attaquer en diffamation ceux qui s'intéresseraient de trop près à ses ennuis judiciaires. La meilleure des défenses est souvent l'attaque… Pourtant, les filets de la justice se resserent chaque jour un peu plus.
Même Martine Aubry, la protectrice de Solférino, semble lâcher le patron du 13, en se déclarant pour la levée de l'immunité parlementaire du sénateur. A Calenzana, les vieux disent bien : Ancu l'onori so castichi(4).
Ce mélange entre le sommet de l'état, la police, l'affairisme et la politique, sur fond de communautarisme corse permet toutes les interrogations… Jusqu'à faire penser à l'Italie de Berlusconi, ou d'Andreotti.
Et si dans 3 mois l'Elysée a un nouveau locataire, que deviendront les Squarcini, Frémont et Proglio… Quel sera l'influence de ces protecteurs haut placés ? Quoi qu'il en dise, un changement de régime n'arrangerait pas les affaires de Jean-No.
Aux électeurs de trancher.
Sur le même sujet, et un peu en avance sur la justice, on pourra relire la note du 14 septembre 2011, qui détaille les liens qui vont de Guérini à Squarcini, en passant par Frémont et Proglio.
(1) Pour que l'amitié tienne, qu'une main aille et l'autre vienne (à rapprocher de "les petits cadeaux entretiennent l'amitié")
(2) Qui veut une belle famille commence par une fille
(3) Vergogne à cacher vaut mieux que vergogne à montrer
(4) Les honneurs eux-mêmes sont des châtiments