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Billet de blog 30 juillet 2025

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Von Der Leyen vient de subordonner l'UE en tant que 51ème État des États-Unis

Le délai raccourci de Trump pour de nouvelles sanctions à venir contre la Russie a été pris dans la panique d’un effondrement imminent de l’armée ukrainienne qui manque de tout, et surtout d’une stratégie réaliste. Cette nouveau délai va néanmoins obliger son auteur à accélérer son programme de reformatage du commerce mondial. Pour quel résultat ?

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 Note de Rocafortis

Le délai raccourci de Trump sur ses nouvelles sanctions contre la Russie a été probablement pris dans la panique d’un effondrement imminent de l’armée ukrainienne qui manque de tout, et surtout d’une stratégie réaliste.

Cette nouvelle foucade trumpienne va néanmoins obliger son auteur à accélérer son programme de mise au pas du commerce mondial (obtenu en instrumentalisant sa position de premier marché du monde).

Dans ce contexte, les taxes, qui visent à affaiblir ses fournisseurs pour les rendre encore plus dépendants (pratique courante du capitalisme monopoleur), est un pari extraordinairement risqué qui risque de se retourner contre le parieur.

Déjà, de nombreux commentateurs font valoir que le pacte avec l’UE, même sans tenir compte de son coté très éphémère, est plus spectaculaire que réellement contraignant.

De plus, ce genre de menace contre l’adversaire russe ne peut se concevoir sans confronter les deux principaux partenaires commerciaux de la Russie, l’Inde et la Chine, pays d’un PIB nominal supérieur au PIB des US (ensemble).

Même si la diplomatie trumpienne semble escompter quelque chose de la séculaire rivalité entre les deux pays les plus peuplés du monde, il semblerait que l’on touche un peu, là, aux limites de l’exercice de la guerre par les sanctions, que pratique les USA depuis plusieurs décennies.

Le triangle transactionnel USA/Chine/Inde ressemble beaucoup au dilemme du prisonnier de la théorie des jeux de Stanford. Cette théorie prétend éclairer le comportement du consommateur et éclairer le vendeur. Dans ce contexte, le consommateur ne voit que son propre intérêt et n’ est donc pas doté de capacités réflexives (c’est donc une sorte d’épure du Trumpisme).

Il en va tout autrement dans la réalité politique du Grand Jeu qui s’effectue, elle, à base d’alliances et de contre-alliances réfléchies et cela, parfois, jusqu’au système ultra-sophistiqué d’accords secrets entre adversaires.

S’’l n’est pas impossible que Trump parvienne à fracturer temporairement et partiellement l’intérêt commun des deux géants d’Orient, on voit mal ce genre de déséquilibre s’inscrire solidement dans la durée et surtout remédier aux intenses difficultés auxquelles fait face le système d'unipolarité qui gouverne le monde au profit des USA.

L’abaissement de l’Europe est donc destiné à ne profiter a personne, il n’aura servi qu’à prolonger pour un peu de temps les déséquilibres du monde en en créant un nouveau.

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Von Der Leyen vient de subordonner l'UE en tant que 51ème État des États-Unis

28 juillet 2025

Andrew Korybko

https://korybko.substack.com

Ce résultat met les États-Unis sur la voie de la restauration de leur hégémonie unipolaire par le biais d'accords commerciaux déséquilibrés séquentiels, car ils concernent aussi les autres Amériques avant de s'attaquer enfin à l'Asie.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a conclu un accord-cadre avec les États-Unis en vertu duquel l'UE se verra imposer des droits de douane de 15 % sur la plupart des importations, s'engager à acheter 750 milliards d'euros d'exportations d'énergie aux États-Unis et investira 600 milliards de dollars dans l'économie américaine, dont une partie sera des achats militaires. Les droits de douane américains sur les exportations de l'UE d'acier et d'aluminium resteront à 50 %, tandis que l'UE a accepté de ne pas le devoir de taxer les États-Unis du tout. L'alternative à cet arrangement déséquilibré était que Trump impose ses droits de douane de 30 % d'ici le 1er août.

La force macroéconomique de l'UE a été considérablement affaiblie au cours des 3,5 dernières années en raison des sanctions anti-russes qu'elle a imposées en solidarité avec les États-Unis à ce qui était jusqu'à présent son fournisseur d'énergie le moins cher et le plus fiable. Elle est donc déjà gravement désavantagée dans toute guerre commerciale future. L’échec de l’UE à conclure un accord commercial majeur avec la Chine depuis le retour au pouvoir de Trump, comme lors de son dernier sommet à la fin de la semaine dernière, a fait du résultat de dimanche un spectacle attendu.

Le résultat final est que l’UE vient de se soumettre en tant que plus grand État vassal des États-Unis. Les droits de douane de 15 % des États-Unis sur la plupart des importations réduiront la production et les bénéfices de l'UE, ce qui rendra plus probable une récession. L'engagement du bloc à acheter plus d'énergie américaine plus chère deviendra plus onéreux à ce cas. De même, son engagement d’acheter davantage d’armes américaines sapera le « Plan ReAr Arm Europe », avec l’effet combiné des concessions susmentionnées qui cèdent en outre la souveraineté déjà réduite de l’UE aux États-Unis.

Cela peut à son tour encourager les États-Unis à faire pression pour de meilleurs termes dans ses négociations commerciales en cours avec d'autres. Sur le front nord-américain, Trump envisage de réaffirmer l’hégémonie américaine au-dessus du Canada et du Mexique par des moyens économiques, ce qui lui permettra d’étendre plus facilement la « forteresse américaine » vers le sud. S'il réussit à subordonner le Brésil, alors tout ce qui existe entre lui et le Mexique s'en acquittera naturellement. Cette série de transactions avec le Japon de la semaine dernière renforcerait la main de Trump avec la Chine et l’Inde.

Il espère idéalement reproduire ses succès japonais et européens avec ces deux poids lourds asiatiques des BRICS, qui représentent ensemble environ un tiers de l'humanité, mais il ne peut pas être tenu pour acquis qu'il y parviendra.

La meilleure chance de Trump de les contraindre à adopter des arrangements similaires exige que les États-Unis se trouvent dans la position géo-économique la plus avantageuse possible au cours de leurs discussions, du fait de la nécessité de construire rapidement la Fortress America via une série d’accords commerciaux, puis de prouver que ses menaces tarifaires ne sont pas des bluffs.

« La rivalité sino-indienne va formater la décision anti-russe des sanctions secondaires de Trump » comme expliqué dans l’analyse précédente, comme variable de la politique de triangulation des États-Unis, laquelle détermine le plus significativement l’avenir de leurs négociations commerciales. S’il échoue, Trump pourrait ne pas imposer de droits de douane à 100 % sur la Chine et/ou l’Inde, mais certains effets en seraient toujours attendus.

Néanmoins, avec le Japon, l'UE, et probablement la « Fortress America » de son côté, cet Ouest mondial pourrait isoler les États-Unis de certaines des conséquences.

L'importance stratégique de l'UE se subordonnant en tant qu'État vassal le plus important des États-Unis est donc qu'il met les États-Unis sur la voie de la restauration de leur hégémonie unipolaire par le biais d'accords commerciaux séquentiels, car ils se tournent probablement vers les Amériques avant de s'attaquer enfin à l'Asie.

Il n’y a aucune garantie que les États-Unis réussiront, sans compter qu’une série d’accords commerciaux déséquilibrés avec les grandes économies ne rétablirait que partiellement une unipolarité dirigée par les États, mais les initiatives de Trump représentent toujours une menace potentiellement existentielle pour la multipolarité.

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