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Billet de blog 29 juin 2024

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L'irrépressible engrenage.

Nous y sommes désormais, après avoir laissé Macron détruire savamment et avec acharnement, une à une, toutes les digues et contre-pouvoirs censés empêcher l'extrême droite d'arriver au pouvoir, nous vivons sans doute la dernière semaine de l’État de droit en France.

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Après avoir banalisé l'antisémitisme en l'entendant comme tout propos anti israélien, après l'avoir depuis 2018 et la crise des gilets jaunes utilisé contre tous les opposants politiques , après avoir laissé des empires de l'audiovisuel d'extrême droite contaminer jusqu'au service public de l'audiovisuel, le gouvernement et Macron se sont montrés tout aussi incapables d'empêcher la violence raciste se déchaîner dans les rues. Des milices se constituent et se reconstituent partout, les polices municipales et nationales complices et bienveillantes à leur égard montrent à quel point elles se sont éloignées de leur mission de gardiennes de la paix civile pour devenir des celles fanatiques de l'ordre suprémaciste blanc qui s'installe. 

Le parlementarisme s'est abîmé à grands coups de 49.3, tandis que la Justice est instrumentalisée et contrainte de chasser les "apologistes du terrorisme" terme consacré pour qualifier les défenseurs des Palestiniens massacrés. La justice devient sous le ministère Dupont-Moretti un service externalisé de la Police, les magistrats sont soit serviles soit mis au pas. Le nombre de détenus dans les prisons françaises n'a jamais été aussi élevé et la cour européenne n'a pas de mots assez durs pour décrire les conditions carcérales françaises.

Les droits et libertés publiques sont saccagés depuis les milliers d'arrestations préventives lors des manifestations gilets jaunes , puis entaillés à un point inimaginable lors de la pandémie de COVID si bien que  les couvre feu et les restrictions multiples à la liberté de circulation n'effraient plus que quelques associations de défense des droits humains. Après les outremers d'Amérique la  Kanaky est en flammes. Les droits syndicaux sont piétinés, le droit constitutionnel de manifester est entravé par des décisions préfectorales arbitraires, des militants écologistes sont littéralement bombardés de pluies de grandes lancées depuis des quads de gendarmerie... Plutôt que de regarder en face son échec cuisant, il a trouvé opportun de dissoudre.

L'inflation législative sécuritaire et anti migratoire, associés scandaleusement, ne donne aucun autre effet tangible que la libération sans précédent de la parole raciste. En revanche, les catastrophes humanitaires se multiplient du nord au sud de nos frontières nationales dans une indifférence grandissante.

Ainsi donc après avoir su mendier et profiter par deux fois au moins les voix de ceux-là mêmes qu'il réprime et criminalise depuis maintenant 7 ans, il se refuse aujourd'hui à la réciproque. Le rempart du barrage n'était que le boulevard du dérapage. 

Dans cette France républicaine, les journalistes indépendants sont traqués et placés en garde à vue, quand les propagandistes de haine sont prévenus en amont des décisions qui engagent le destin national. C'est ainsi que P. Praud reçut un appel élyséen pour l'avertir de la dissolution, des heures avant l'annonce officielle.

Alors que les inégalités explosent comme jamais ces 7 dernières années, que le CAC 40 établit des dividendes records chaque année, les services publics sont dépouillés et les Français ne parviennent plus à payer leurs factures d'énergie; tandis que les Restos du cœur n'arrivent plus à servir assez de repas face à la demande, qu'une crise du logement sans précédent secoue la France, le patronat mise désormais ouvertement sur le RN, jugé comme  meilleure assurance vie de son portefeuille. 

Alors que la France n'a jamais été aussi riche, la dette n'a jamais été aussi énorme. L'état organise sa propre faillite pour le bien des banques. 

Sur le plan européen et international, le bilan est tout aussi désastreux. La France ne joue plus aucun rôle de l'Ukraine à Gaza, mais la gestion toute jupitérienne des affaires internationales a conduit la France à déguerpir de tout le Sahel, à se ridiculiser au Liban qu'elle devait reconstruire sans coup férir, à être humiliée par l'Australie pour la vente de sous marins. En Europe, les multiples discours  sur la construction d'une défense européenne allant jusqu'à brader la force de dissuasion nationale n'ont essuyé que des refus polis depuis 7 ans. Seul triste succès, la France est devenue la seconde exportatrice d'armes au monde derrière les États-Unis...

L'accueil des jeux olympiques est des plus périlleux tant les nuages sont chargés sur le plan intérieur et extérieur. Le risque d'un désastre est loin d'être nul, tandis que l'enfer quotidien des Parisiens durant ces "Jeux" est déjà acté.

Ce qui sortira des urnes les 30 juin et 7 juillet sera monstrueux et Néron, nu, pourra contempler l'incendie tout en caressant son chien. On en viendrait même à souhaiter une assemblée ingouvernable, où tout ce qui n'est pas d'extrême droite se rassemblerait pour soutenir un gouvernement technique (entendre de banquiers et de boutiquiers de bas étage). Celui ci ne fera qu'amplifier la prochaine vague sans même être en mesure de maintenir un semblant d'ordre sur le territoire national. Caligula sera peut-être tenté par l'article 16 et les pleins pouvoirs, afin de descendre directement dans l'arène, armé d'un LBD pour dézinguer l'antisémitisme des cités. Ivre, il ne verra pas qu'il ne sera plus qu'un hochet aux mains d'un appareil sécuritaire dont la loyauté va à d'autres.

La France bascule vers l'inédit dans une atmosphère irrespirable. La criminalisation de l'opposition politique et sociale va prendre des proportions immenses dès l'été sous le prétexte de la bonne tenue des JO. La rentrée sociale de septembre sera entravée, rien ne permet de dire que l'exercice constitutionnel du droit de grève pourra encore s'exercer. La culture sera l'une des premières touchées. . Le monde de la culture sera décomposé, tandis que les "artistes républicains" (du régime) seront subventionnés comme jamais (coucou le Puy du Fou, coucou Bigard, coucou Canal+) les autres seront poussés vers la sortie, leurs spectacles menacés leurs subventions coupées et leurs spectacles chahutés violemment par quelque organisation factieuse.

L'engrenage qui mène au chaos et à la barbarie est enclenché et il porte le nom d'ordre républicain. Dans les quartiers défavorisés des métropoles, la violence policière va franchir un nouveau cap, des émeutes réprimées dans le sang vont survenir très tôt. Les cellules d'organisations terroristes vont passer à l'action et recevoir de nouvelles recrues en nombre. Le pays connaîtra une guerre civile que l'on qualifiera, pour les besoin de la cause de "grand combat de la laïcité contre l'obscurantisme islamiste". Les hélicoptères tourneront au dessus des tours, les chiens policiers poursuivront des gamins...

La purge débutera dans les ministères et à l'université. Ici les binationaux seront exclus, là les "islamo-gauchistes" seront contraints au silence. Le monde de l'édition  va passer sous la même emprise (déjà bien avancée) que l'audiovisuel. La presse indépendante devra au départ signer des chartes de bonnes conduite, l'accès à la presse étrangère sera réduit et suspect un.

On m'objectera que le pire n'est jamais certain, certes. Mais soyons honnêtes, qu'est ce qui peut empêcher cela d'advenir hormis une très improbable prise de conscience d'ici au 7 juillet ?

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