Y a t-il un Parlement dans l'Empire du management ? Finalement force est de constater que non. Et avec une telle cosmogonie, il n'est pas incohérent qu'Emmanuel Macron entretienne un halo ministériel, des sortes ministres spectraux en train d'arbitrer le budget de la nation et singulièrement s'apprêtant à publier des lettres plafonds de dépenses, sans que l'on sache vraiment comment tout cela va atterrir.
C'est que dans le monde idéal de la technostructure, la délibération et le vote parlementaire sont une perte de temps fâcheux. Depuis le COVID 19, de mauvaises habitudes se sont installées dans la pratique du pouvoir.
En ces temps douloureux, le décret systématique faisait loi, l'urgence forçait la mesure en bordure de la légalité, les laissés passer pour promener son chien le long de l'océan se voulaient la norme. Et le cercle de la Raison s'est ainsi très bien habitué à produire sa vérité révélée dans l'ordre de l'action publique sans s'embarrasser des députés et de leur légitimité populaire.
Déjà, par essence, cette coterie considérait en2017 que les cabinets ministériels ne servaient à rien et qu'une haute administration appliquant la doxa techno libérale de toute éternité (soit 40 ans) était bien suffisante puisqu'une seule politique, dans leur esprit, est utile, nécessaire et possible.
C'est ainsi qu'au début du premier mandat du Président de la République les cabinets, mêmes les plus importants, furent réduits drastiquement. La Politique, au sens de sa noblesse transformatrice, était cantonnée à la simple reconduction ad vitam de l'orientation techniciste, colbertiste et néo-libérale.
Aujourd'hui, nous sommes à l'aboutissement de cette déréalisation démocratique. Du pain, des jeux, et des ministres démissionnaires qui ordonnent des tirs de contre mesure en nouvelle Calédonie, qui rognent à Bercy tous les budgets dépensiers de l'Etat, et qui, comme la porte parole du gouvernement, citent Charles Maurras pour décrire le mouvement LFI se donnant un dernier shoote de gloire avant des vacances bien méritées.
La trêve n'est pas la vie et "rêvant il faut garder la notion de la vie qui passe sans trêve" comme l'écrivait Robert Desnos. Aussi, cette ambiance de farce tragique , ce théâtre d'ombre doivent cesser, il en va d'une forme de propédeutique démocratique et "d'une certaine idée de la France" comme phare du Politique.