Le récit macronien est le parfait prolégomène à l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir, parce qu’Emmanuel Macron est défini par le vide irénique. Il vise à la paix et à la concorde, mais n’obtient et que le désenchantement démocratique et l’accélération de l’Histoire voyant le retour du nationalisme xénophobe à notre porte.
Il n’aura finalement fallu que peu de mois pour déboucher déjà sur la « victoire idéologique » de Marine Le Pen. La pierre cardinale du programme xénophobe de son parti, soit la notion de « priorité nationale », vient d’être votée par la majorité présidentielle et assumée comme tel par le Président du « barrage aux idées d’extrême droite ».
Le goût du noir est donc advenu bien vite. « Noir de mécontent, noir sans gêne, sans compromis, noir qui va avec l’humeur coléreuse » écrivait Henri Michaux et ce n’est qu’un début.
Car quand l’on gouverne à vue, sans majorité et que l’on songe tout de même à sa superbe, on ne maitrise plus rien et Emmanuel Macron a choisi une funeste fuite en avant. Il restera sûrement dans l’Histoire, mais après le vote du 19 décembre 2023 de la loi immigration, je crains que cela ne soit pour de mauvaises raisons.
Demain, le conseil Constitutionnel censurera quelques articles de ce texte scélérat, mais il sera accusé par la nouvelle majorité d’idée LR, RN, d’être contre l’opinion, si tant est qu’elle existe comme le notait Pierre Bourdieu. La même opinion qui plébiscitait tout autant le texte initial avant son remaniement par la droite extrême sénatoriale.
Alors, les lois indignes vont succéder aux décrets honteux et les cris d’orfraies des partisans du Président de la République de début de séquences parlementaires seront balayées par les compromissions de fin de débat.
Voici l’autre pièce maîtresse de la bombe à fragmentation qui va faire imploser le pouvoir en place : comment avoir confiance dans un gouvernement qui propose un texte au débat parlementaire, donc une orientation politique et se satisfait pleinement d’en voter un autre diamétralement opposé et a fortiori inconstitutionnel in fine ?
Ainsi, Borne, Macron, Attal, Le Maire, Darmanin et consorts iront de nouveau à Canossa jurant leurs grands Dieux qu’on les a mal compris et que jamais au grand jamais on ne touchera à l’aide médicale d’Etat et puis, à la fin d’une obscure commission mixte paritaire, l’AME sera démantelée définitivement.
Le programme d’alternative des mouvements xénophobes français pourra cependant continuer à promettre la grand soir patriote et exprimer son insatisfaction puisqu’il faudra attendre 2027 pour s’arranger avec la Constitution de « la gueuse ».
Et adviendra alors, après la victoire du ticket Le Pen-Ciotti, le référendum sur l’immigration et la sortie de notre loi fondamentale du droit international public. Il n’y aura plus alors qu’à aller manifester, comme en Israël, pour défendre les juges suprêmes et l’Etat de droit.
Voilà, donc l’agenda établi. On l’a compris, il ne s’agit plus d’ambiance, mais de réalité, un gouvernement sous tutelle fasciste vient d’accoucher sous nos yeux. La suite n’est pas écrite mais le chemin est escarpé pour l’arc humaniste.
Cette France tolérante existe, elle s’ignore encore peut être encore, elle est plus forte qu’elle ne le croit parfois, elle est, en tous les cas, la seule alternative qui vaille, car l’illusion du « bloc central » invertébré et anhistorique est achevée.