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Billet de blog 27 août 2024

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Gauche : interdiction de gouverner en France

Il sera dit qu'une majorité relative s'interprète différemment qu'elle soit de gauche ou de droite chez Emmanuel Macron et le nombre de députés n'a rien à voir à l'affaire, non le Président fait partie de cette élite conservatrice, libérale, colbertiste qui considère que la gauche ne doit pas gouverner.

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La France fait partie de ces démocraties avancées où l'on dénie, par principe, le droit à la gauche de gouverner. Ce n'est pas la seul, le Japon de l'après-guerre est un autre exemple, le Mexique, la Colombie furent longtemps d'autres archétypes avant même que là aussi, en dépit des conflits armées et des trafics, l'alternance opère enfin.

Vous me direz, François Mitterrand, Lionel Jospin et François Hollande ont bien gouverné. Certes, mais ont-ils vraiment gouverné à gauche dans la durée, rien n'est moins sûr, toujours arrivés au pouvoir par effraction, toujours étant poussés par la doxa et les intérêts d'argent à redéfinir in fine un réformisme de gauche dans le cadre du techno libéralisme.

Plus concrètement, pour que les institutions et la technostructure consentent à une alternance de gauche, il faut toujours la force de l'évidence, une majorité absolue bien trempée et, en période de cohabitation, une certaine éthique de responsabilité des chefs de partis de droite et des dirigeants de l'exécutif.

Un "vieux monde" que les Jacques Toubon, Dominique de Villepin et Jean-Louis Debré représentent toujours, mais un monde agonisant là où ces chiraquiens crient seul et dans le vide leur gaullisme obsolète, alors que le Président Macron les méprise et cherche à perdurer pour lui-même sans l'ombre d'une attention pour nos principes démocratiques.

Emmanuel Macron a une pratique brutaliste du rapport à la gauche. Il naquit pourtant politiquement "sur les derniers jours du Parti socialiste", mais son seul mantra est de concasser perpétuellement le PS pour réifier une "autre gauche" déclarée anti-républicaine et donc infréquentable.

Cette modalité du fractionnement politique a atteint ses limites avec le concept d'alliance du Nouveau Front Populaire, y compris pour celles et ceux qui à gauche auraient été tentés une nouvelle fois par la désormais célèbre notion de gauches irréconciliables. Face à ce défi unitaire qui satisfait "le peuple de gauche" et les corps intermédiaires progressistes, le Président n'a eu qu'une seule riposte : le refus de nomination de Lucie Castets, comme formellement la Constitution l'y autorise.

Là où le Président de la République attendait Jordan Bardella et ses 220 députés et à qui en 24h il aurait donné les clefs de Matignon pour mieux se draper dans la défense de nos principes et de la stabilité de nos institutions, le voilà obligé de bricoler un argumentaire ridicule justifiant son rejet du NFP par une hypothétique censure qui concernerait bien plus l'ensemble des configurations de coalitions alternatives.

Cette offense à nos principes élémentaires est assumée par Emmanuel Macron, parce que pour lui, plus profondément que pour tous ses prédécesseurs, la politique n'est qu'un pantomime, un jeu, un théâtre, Emmanuel Macron ne croit pas que la politique transforme la vie des gens, influe sur le monde et les citoyennes, les citoyens.

La gesticulation médiatique du Président autour de la formation d'un gouvernement est un paravent à la perpétuation des politiques de classe qui doivent perdurer coûte que coûte.

Emmanuel Macron refusera toujours le pouvoir à la gauche démocratique car elle ne doit pas détricoter sa réforme des retraites, ses cadeaux fiscaux aux plus aisés ou ses offrandes au patronat, et ce, même s'il faut faire dire à une députée Horizon que le programme du NFP est "un allé simple pour Caracas"...

Aussi, attendons nous, dans quelques jours, à voir apparaître le Mario Monti français, ayant eu dans des temps immémoriaux sa carte au Parti socialiste, pour appliquer un programme économique de rigueur orthodoxe matinée de quelques réformes sociétales et de déport sur les sujets régaliens toujours porteurs dans les médias populistes.

Le Président aura ainsi démontré que l'Assemblée nationale ne sert à rien et que subliminalement le grand ordonnateur des choses se trouve toujours à l'Elysée. Ainsi point de gauche au pouvoir, mais la simple reconduction perpétuelle d'une danse macabre, un couvercle de feu sur l'abîme.

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