Démocratie ou totalitarisme?
Telle est la question qui est posée par le pouvoir russe à tous les peuples européens et du monde entier.
En envahissant l'Ukraine il ne reconnait pas la voix des ukrainiens à choisir la société dans laquelle ils veulent vivre. En 2014 sur la place Maïdan les ukrainiens disaient préférer la démocratie européenne au pouvoir dictatoriale en place à Moscou. La peur de Poutine est que cette aspiration gagne la Russie. C'est sur la question démocratique que l'affrontement a lieu. Le trucage des élections, l'assassinat de journalistes, l'emprisonnement des opposants, le muselage des médias, l'interdiction des organisations d'opposition , tout a été utilisé pour faire taire les résistances des russes à son pouvoir dictatorial. Une population manipulée par la propagande croit encore aux fables qui lui sont servies. Il nous faut rappeler que c'est la révolution française qui "qui pose clairement l’idée d’une auto-institution explicite de la société (...) par l’activité collective, lucide et démocratique."1.. Depuis la fin de l'empire soviétique les manifestations d'indépendance en Georgie et en Tchétchénie ont été écrasées par la force. Poutine a servi d’auxiliaire à Bachar El Achar pour maintenir en place sa dictature et écraser la ville d'Alep sous ses bombes. Les reculades des pays occidentaux loin de calmer ses appétits expansionnistes ont développé au Kremlin, l'idée d'une Europe inconsistante, faible et divisée, grognant mais s’accommodant au fil du temps de ces coups de force. La menace d'une "guerre totale", nucléaire, est le niveau ultime du chantage exercé.
L'importance de la question posée doit nous interdire de nous perdre dans des considérations secondaires. En 1940 la seule question importante était: collaboration ou résistance. D'autres choix par la suite apparaîtront lorsque l'occupant nazi sera repoussé et qu'il deviendra important de se donner les bases de la nouvelle société à construire. Chaque chose en son temps. En 1940, l'objectif était de rassembler toutes les forces contre l'envahisseur; des royalistes patriotes aux communistes. Nous vivons une période semblable à celle ou les brigades internationales opposées aux armées de Franco, soutenues par l'Allemagne et l'Italie, rassemblaient des combattants venus de plusieurs dizaines de pays et d'horizons politiques différents. Le manque de soutien de la Grande Bretagne et de la France permis aux fascistes d'expérimenter de nouvelles armes et de préparer l'offensive généralisée.
Aujourd'hui nous ne devons pas barguigner sur l'aide militaire à l'Ukraine. Sans s'engager directement dans le conflit, il nous faut apporter tout notre soutien à leur résistance. Poutine s'est totalement trompé en s'imaginant être accueilli en libérateur dans un pays tenus par des "nazis". La résistance est générale. L'armée appuyée sur la défense territoriale armée citoyenne, inexpérimentée mais qui apprend vite, rend la progression de l'armée russe, lente et couteuse en vies humaines. Ses soldats, embarqués dans une guerre pour laquelle ils n'étaient pas préparés, contre une population "frère", parlant pour la plupart la même langue, n'ont pas la motivation de ceux qui défendent leur pays. Une aide militaire et civile doit être apportée immédiatement à la résistance ukrainienne. Les positions de tous les mouvements d’extrême droite dont les représentants en France sont Marine Le Pen et Eric Zemmour, sont dans la continuité de leur allégeance au Kremlin. A gauche, la position de JL Mélenchon a pu surprendre. En refusant un soutien en armes à la résistance ukrainienne ainsi qu'aux sanctions économiques, il demande à ses partisans de rester impassibles, "non alignés", à l'écrasement du peuple ukrainien sous les bombes de l'armée russe. Ce cynisme, cette indécence, confirme ses sympathies maintes fois prononcées pour les pouvoirs totalitaires dans le monde. Après avoir accepté l'annexion de la Crimée et l'occupation du Donbass, après avoir félicité Poutine pour avoir réglé le problème syrien. D'évidence pour JL Mélenchon la démocratie, le droit des peuples à choisir leur avenir, n'est pas un axe fondamental de sa politique. A l'heure où les frontières ne sont pas une protection contre les missiles intercontinentaux porteurs de plusieurs bombes atomiques, capable de détruire n'importe quel territoire sur la terre et Paris en moins d'une demi heure, la position de la France insoumise est un encouragement pour Poutine à continuer son agression. Notre sort est commun à tous les états européens. Pas plus qu'il n'était possible de considérer l'URSS de Staline comme un allié pour construire une société de paix et de justice, il n'est envisageable de rester spectateur de l'invasion en cours.
Ce soutien militaire à ses limites, il va de pair avec un intense activité diplomatique qui n"aboutira que dans un rapport de force. En attendant beaucoup de sang froid est nécessaire. Ce soutien s'accompagne d'un appel au peuple russe qui manifeste courageusement, contre la guerre, malgré la répression féroce et une propagande intensive.
Il faut se battre avec intelligence mais il faut se battre.
Le propos de Georges Orwell : « La vraie distinction n’est pas entre conservateurs et révolutionnaires mais entre autoritaires et libertaires » donne bien l'enjeu de la guerre en cours.
Jamais choisir son camp n'a été aussi limpide. Nous savons que la liberté à un prix et que nous combattrons pour la conserver.
1Cornélius Castoriadis p. 190 L’idée de révolution Entretien publié par Le Débat, n°57, novembre-décembre 1989